Georges St-Pierre a un plan, un plan bien établi, un plan auquel il reste trois chapitres. C’était le 11 janvier dernier, bien attablés devant un bon repas à l’un des restaurants préférés de Georges, le Café Ferreira de la rue Peel à Montréal, entourés d’un groupe d’amis communs, que nous avons passé une excellente soirée à parler du passé, du présent et du futur – comme nous le faisions presque religieusement plusieurs fois par semaine lorsque j’étais son gérant. Ce fut une soirée spéciale, des retrouvailles, oui, mais surtout une soirée où l’on a parlé de sa carrière, de sa stratégie et de ce qui s’en vient pour notre héros national. Il a bien sûr été question de Nick Diaz, de Johny Hendricks, mais aussi d’Anderson Silva.

J’ai été gérant de Georges pendant plus de cinq ans et j’ai eu la chance de côtoyer cet impressionnant athlète à ses tout débuts alors qu’il combattait pour mon organisation de l’époque (UCC), jusqu’à ce qu’il devienne champion mondial de l’UFC une première fois (face à Matt Hughes) et jusqu’à ce qu’il subisse la perte de ce titre pour lequel il avait tant travaillé aux mains de Matt Serra. Nos chemins se sont par la suite éloignés, mais j’ai continué de suivre avec intérêt la carrière d’un athlète qui m’a assurément fait vivre mes plus grandes émotions dans le sport professionnel. À titre de gérant, à titre d’ami, à titre d’être humain. L’athlète a beaucoup changé, mais l’homme est resté le même. Simple, courtois, secret et réfléchi. Par contre, il est beaucoup plus connu et aimé qu’auparavant. Même Me Marcel Aubut, lors de ce fameux souper au Café Ferreira, n’a pu s’empêcher de se lever de table pour venir serrer la main à notre champion mondial et le féliciter pour sa façon à lui de faire briller le Québec sur la scène internationale.

Il fut question de Nick Diaz, son adversaire de samedi soir… À ce moment-là, le 11 janvier, il ne détestait pas Diaz, c’était juste de la business, mais je peux vous confirmer aujourd’hui que quelques mois plus tard, il le déteste à s’en confesser, et il voudra vraiment lui faire mal dans l’octogone samedi soir. Il y aura derrière lui des entraîneurs compétents et un entourage sérieux pour calmer ses ardeurs avant le début du combat afin qu’il ne commette pas l’erreur d’être trop émotif quand la cloche sonnera. Mais le plan de match sera de vaincre Diaz et de lui faire mal. Firas Zahabi sera la force tranquille dans son coin, le stratège, mais il y aura aussi Kristof Midoux, qui lui sera là pour motiver Georges comme jamais. C’était d’ailleurs émouvant de voir Midoux travailler lors de la marche vers l’octogone pour le combat contre Carlos Condit et dans le coin avant le combat. Midoux a ramené la passion dans le jeu de St-Pierre, il lui a rappelé qu’il était un guerrier. Avec Midoux dans son coin, Georges est d’ailleurs invaincu.

Est-ce que Georges a un plan de match pour le reste de sa carrière? Bien évidemment. Son plan est si détaillé et si intelligent qu’il est normal qu’il sorte la cassette lorsque questionné à ce sujet. Même si comme la plupart des athlètes Georges dit refuser de penser au-delà de Nick Diaz, il n’en est rien : le plan est déjà tracé. Et lorsqu’il a été question de ce fameux plan devant nos assiettes du restaurant portugais, j’ai revu le feu dans ses yeux, ce que je n’avais pas vu depuis longtemps. Évidemment, ce plan ne pourra être mis à exécution advenant une défaite contre Nick Diaz, mais soyons honnête, ce scénario ne fait pas partie du plan non plus… Advenant donc une victoire contre Diaz, il affrontera ensuite le gagnant du combat entre Carlos Condit et Johny Hendricks.

Parlons-en justement de ce Hendricks. Georges est d’avis que ce dernier a beaucoup trop parlé depuis sa victoire par K.-O. au Centre Bell contre Martin Kampmann, et c’est quelque chose qui semble lui avoir déplu, qui l’a même agacé plus qu’on ne pourrait le penser. Quand il dit aux représentants des médias que Hendricks ne méritait pas la victoire contre Josh Koscheck en mai 2012, il le pense vraiment. Il a regardé quelques fois les images de ce combat, et sur sa carte de pointage à lui, Koscheck a gagné deux des trois rounds du combat. Mais Hendricks, s’il l’emporte contre Condit bien sûr, fait partie du plan de Georges St-Pierre. S’il n’en tient qu’à lui, Hendricks sera la covedette du deuxième chapitre de son plan. Hendricks est dangereux, et Georges le sait très bien. N’oubliez jamais qu’on garde souvent le meilleur pour la fin lorsqu’on établit un plan.

Mais quel est le 3e chapitre de ce plan établi par Georges St-Pierre lui-même? Eh oui, vous l’avez deviné : il s’agit du célèbre Brésilien Anderson Silva. Arrêtez de croire qu’il ne veut pas affronter Silva, Georges rêve de cet affrontement. Il rêve de se retirer au sommet de sa gloire en étant reconnu comme une légende, comme le plus grand combattant de tous les temps. Et pour ce faire, il doit être considéré comme le meilleur combattant de la planète « livre pour livre »… Pourquoi pas maintenant? Justement parce que Georges a un plan bien établi, et comme tout le reste de sa carrière, il va le suivre à la lettre. Il ne reste maintenant qu’aux étoiles de bien s’aligner pour que le plan demeure parfait… Il doit vaincre Nick Diaz samedi soir, défendre son titre une fois de plus contre le gagnant de Hendricks-Condit et ensuite se préparer à un choc de titans… Parlant des étoiles, il faut aussi qu’elles s’alignent pour Silva, qui lui doit vaincre Chris Weidman.

Il s’agit d’un scénario tellement rêvé, tellement bien planifié, que j’ai l’impression que les étoiles vont s’aligner jusqu’au troisième et dernier chapitre. Georges aura 32 ans en mai prochain et ce combat de rêve pourrait avoir lieu à la fin 2013 ou au début 2014. Et que se passera-t-il par la suite? Si Georges l’emporte lors du choc contre Anderson Silva, j’ai la ferme impression qu’il se retirera dans la gloire, comme tous les grands athlètes ont toujours rêvé de le faire. Si le plan de match va vraiment à la perfection, il se retirera en étant reconnu comme le plus grand athlète de l’histoire des arts martiaux mixtes. Il sera reconnu comme celui qui a dominé et trôné au sommet de la division des 170 livres pendant toutes ces années, ayant défait un par un tous les aspirants qui se sont hissés jusqu’à lui, et il sera aussi reconnu comme le premier combattant à avoir vaincu le terrible Anderson Silva dans l’octogone de l’UFC.

Les plans de matchs ne sont pas toujours parfaits et les astres ne sont pas toujours alignés, mais c’est bel et bien le plan de match de Georges St-Pierre. Chapitre un, samedi soir au Centre Bell.