Entendez-vous? C'est le bruit du compte à rebours qui nous sépare du coup d'envoi du 97e match de la coupe Grey! Dans quelques heures, les Alouettes tenteront de mettre fin à leur série de malheurs au match de championnat de la Ligue canadienne alors qu'ils affronteront des Roughriders négligés, mais qu'il faut absolument respecter.

Les deux équipes se sont affrontées à deux reprises en saison régulière et Montréal a signé autant de victoires par un pointage combiné de 77-35. Mais le dernier duel remonte au 21 août et beaucoup d'eau a passé sous les ponts depuis. Les Alouettes se sont améliorés, mais les Riders aussi!

La première chose que je remarque en observant les Roughriders, c'est un concept d'équipe bien établi. D'ailleurs, à mes yeux, le match de la coupe Grey de cette année regroupe non seulement les équipes qui ont terminé au sommet du classement de leur section, mais aussi celles qui sont le plus unie. C'est beau à voir : d'un côté comme de l'autre, personne ne se croit plus important que l'équipe.

Les Riders forment une équipe qui joue toujours avec énergie, qui offre toujours un effort maximum, qui est capable de faire face à l'adversité, qui excelle sur les unités spéciales... Il n'y a rien de gratuit contre eux. Même si tu les plantes, ils vont te donner tout ce qu'ils peuvent te donner. Leurs adversaires doivent être prêts à payer le prix, parce que ça va cogner dur. Tu sais que tu seras impliqué dans un match physique quand tu te prépares à affronter les Roughriders.

En plus, on parle d'une équipe qui a été mise à l'épreuve tout au long de la saison. Ça a commencé avec la perte de plusieurs secondeurs sur le marché des joueurs autonomes. Le receveur de passes Weston Dressler a été perdu pour la saison, son collègue Andy Fantuz a raté cinq matchs. Un de leurs bons joueurs de ligne, Wayne Smith, a également dû s'absenter, tout comme le secondeur intérieur Renauld Williams.

Et malgré tout ça, les Riders ont continué d'avoir du succès. C'est la marque d'une équipe résiliente, qui n'abandonne jamais. Jetons donc un œil sur leurs forces et leurs faiblesses, position par position.

À tout seigneur tout honneur, commençons par le jeune quart-arrière Darian Durant. Il n'a pas été mauvais, ni brillant en saison régulière contre les Alouettes, mais en deux matchs, il a été victime de quatre interceptions et un échappé. C'est d'ailleurs la première clé que j'identifierais du côté des Riders : Durant doit couper dans les revirements. S'il n'est pas plus prudent à la coupe Grey, son équipe ne pourra gagner le match.

Durant est un quart-arrière mobile, comme en font foi ses quelque 500 verges amassées au sol en saison régulière. C'est intéressant, parce qu'il s'agira de la deuxième semaine consécutive que les Alouettes affrontement un quart bâti dans ce moule. La différence, c'est que la ligne devant Durant est bien meilleure que celle qui tentait de protéger Casey Printers la semaine dernière.

Je crois aussi que Durant court d'une façon plus intelligente que Printers. J'ai l'impression que ce dernier, en finale de l'Est, courrait davantage à l'horizontal pour sortir de sa poche et prouver à tout le monde qu'il est un bon passeur. Durant, lui, ne courra pas seulement pour éviter la pression et chercher la bombe. Il se servira de ses jambes dans le but d'aller chercher un premier jeu.

Mais attention! Il ne faudrait pas faire l'erreur de croire qu'il est un athlète unidimensionnel. Durant a quand même amassé des gains aériens de 4348 verges cette année, à peine 300 de moins qu'Anthony Calvillo. Les deux ont pratiquement le même nombre de passes de touché : 24 pour Durant, 26 pour son aîné. Mais ce qui les différencie surtout, et ça nous ramène au point que je soulevais un peu plus tôt, c'est que Durant a été victime de 21 interceptions contre seulement six pour Calvillo.

Pour moi, c'est ça le chiffre le plus important. Pour donner une chance aux Riders de l'emporter, Durant devra être parfait.

Un trio redoutable

Durant représente la plus grosse menace des Riders au sol, parce que le reste de leurs armes n'a rien de très menaçant. Wes Cates a déjà connu de bonnes saisons, mais on dirait que cette année, c'est plus difficile. Il n'a récolté que 67 verges contre Montréal cette saison.

Lorsqu'ils attaquent par la voie des airs, les Roughriders privilégient les petites passes rapides. On veut que le ballon parte rapidement de la main de Durant et atteigne celle de ses fabricants de jeux. Je parle ici de leur trio de receveurs canadiens : Fantuz, Rob Bagg et Chris Getzlaf. On ne parle pas ici des gars avec les mains les plus rapides, mais ce sont trois receveurs très intelligents, qui possèdent de très bonnes mains et qui sont capables de décortiquer les zones. La semaine dernière, en finale de l'Ouest, les trois ont capté un total de onze passes pour 183 verges et ont chacun marqué un touché.

J'ai hâte de les voir à l'œuvre. Parce qu'ils ne sont pas des marchands de vitesse, ils utilisent beaucoup de mouvements différents (croisements à la ligne d'engagement, attaques en angles, etc.) pour essayer d'attaquer plus facilement les demis défensifs adverses. Et ils réussissent à le faire semaine après semaine, ce qui est quand même assez spectaculaire.

Je suis convaincu que la majorité des coordonnateurs défensifs qui se préparent à affronter ce trio se disent la même chose. « Ces gars-là ne sont pas rapides, nos demis défensifs sont plus athlétiques... on jouera donc beaucoup de homme à homme. » En tout cas, je m'attends à ce que ce soit la stratégie favorisée par les Alouettes.

Vous savez, il y a deux façons de mettre de la pression sur un quart-arrière. On peut le faire en tentant d'envoyer un maximum d'effectifs dans le champ arrière, comme les Alouettes ont réussi à le faire en traversant la ligne des Lions la semaine dernière. Mais on peut aussi le faire en attaquant agressivement les receveurs de passes, ce qui a pour effet de donner plus de temps au front défensif de faire son travail. Je crois que c'est ce qui arrivera en fin de semaine.

Une chose est certaine, ce sera une belle bataille à surveiller.

Des stratégies originales, mais risquées

Les Roughriders sont très bien équipés sur le front défensif, notamment avec les ailiers John Chick et Stevie Baggs. Les deux lurons ont accumulé 23 sacs du quart, 87 plaqués, huit échappés provoqués et quatre échappés recouvrés en saison régulière. Et tout juste derrière, on retrouve le secondeur intérieur Renauld Williams, auteur de dix plaqués et trois sacs du quart la semaine dernière contre les Stampeders.

On parle d'un front défensif qui utilise des stratégies qui lui sont uniques, c'est-à-dire que personne d'autre ne les utilisent dans la Ligue canadienne. Par exemple, les Roughriders montreront des fronts à deux, trois, quatre ou même cinq gars sur la ligne offensive. On voit souvent des ailiers jouer au poste de secondeurs. Et remarquez bien : parfois, ils regroupent les quatre joueurs de ligne directement en face du centre Bryan Chiu. C'est-à-dire que si vous traciez une ligne à partir du nez du garde Paul Lambert jusqu'à celui de Scott Flory, les quatre joueurs des Riders seraient à l'intérieur de ce rayon.

Personne ne faire ce genre de choses. Le défi sera donc intéressant pour la ligue à l'attaque des Alouettes, et je me permets d'inclure le porteur de ballon, qui devra être particulièrement alerte au niveau des protections et des jeux au sol. Ça prendra une bonne communication parmi tous les membres de l'attaque montréalaise pour reconnaître ce qui s'en vient et réagir adéquatement.

D'un autre côté, les Roughriders peuvent se pendre avec leur propre corde puisque ces choses uniques qu'ils font ne sont pas toujours des choses logiques. Par exemple, il peut arriver que deux corridors de courses collés soient inoccupés et que le porteur de ballon se retrouve par conséquent avec une autoroute devant lui. En bref, les Riders courent souvent le risque de se rendre vulnérables contre les longs jeux.

En conclusion, on parle d'une défensive qui est certainement capable de donner des maux de tête à Calvillo. D'ailleurs, dans le dernier match entre les deux équipes, A.C. avait été victime de quatre sacs du quart - dont trois après la perte du plaqueur Josh Bourke, il faut l'avouer - et n'avait amassé que 170 verges de gains par la passe.

Une attaque avec des bouchons

Le pire ennemi des Alouettes dimanche après-midi pourrait ne même pas être sur le terrain. Selon mon estimation, environ 95% de la foule se rangera du côté des Roughriders. Il y aura beaucoup, beaucoup de bruit et les bloqueurs Josh Bourke et Jeff Perrett auront toute une mission sur les bras si les Alouettes sont forcés d'utiliser une cadence silencieuse en attaque.

La cadence silencieuse est utilisée lorsque le bruit ambiant est trop intense pour que les membres de l'unité offensive entendent les commandes du quart-arrière. Ce dernier remplace alors ses cris par des gestes pour transmettre ses ordres au reste du groupe, notamment le moment où il veut recevoir le ballon.

Pour les deux joueurs aux extrémités de la ligne défensive, il est extrêmement difficile de regarder le ballon pour savoir quand amorcer leur bloc tout en gardant un œil sur le joueur qui leur fait face. Bourke et Perrett risquent donc d'avoir un demi-pas de retard sur Chick et Baggs.

Ça veut aussi dire que le centre, Bryan Chiu, commencera chaque jeu avec la tête entre les jambes. En voilà un qui aura assurément besoin de ses coéquipiers parce que c'est impossible de faire deux choses en même temps. Pendant qu'il attend le signal de Calvillo, il ne voit pas les ajustements qu'apporte la défensive devant lui. Une bonne communication sera primordiale.

La cadence silencieuse affecte également le mouvement des receveurs de passes vers la ligne d'engagement avant que le jeu soit lancé. Il s'agit de l'une des spécialités des Alouettes lorsque les conditions le permettent, mais ça risque d'être un peu moins efficace s'il faut simplifier les choses pour ne pas sacrifier le synchronisme.

Dernières observations

- On dit souvent qu'au football, ce n'est jamais facile de battre la même équipe trois fois dans une saison. Quand tu gagnes, tu n'as pas nécessairement d'ajustements à faire et c'est l'équipe vaincue va généralement travailler plus fort sur les points qu'elle doit améliorer.

En saison régulière, les Alouettes ont d'abord battu la Saskatchewan par 33 points. Le deuxième rendez-vous fut beaucoup plus serré et s'est soldé par un écart de seulement neuf points. Non seulement ça, mais les Alouettes avaient profité de trois interceptions, Larry Taylor avait retourné un botté pour un touché et la défensive avait dû arrêter les Riders trois fois à leur ligne d'une verge. Si seulement quelques-uns de ces jeux vont dans l'autre sens, on a un match complètement différent.

- La semaine dernière, les conditions étaient idéales pour les Alouettes. La foule était de leur côté, la surface rapide les avantageait, il n'y avait pas de vent, ils avaient profité de deux semaines de préparation et affrontaient une équipe amochée et fatiguée. Cette semaine, rien de tout ça.

- Ce qui fait la beauté du football et ce qui rend ce sport si cruel, c'est que tout se décide par une seule partie. Ce n'est pas la meilleure équipe pendant la saison qui gagne, mais celle qui joue le mieux pendant les trois heures que durent le match.

Lors du dernier match de la coupe Grey qui s'est joué à Calgary, Montréal affrontait les Lions. J'ai joué dans ce match. Avec notre fiche de 12-6 en saison régulière, on était largement favoris contre une équipe qui n'avait amassé que huit victoires. Mais on a perdu.

Qui aurait dit que les Patriots de la Nouvelle-Angleterre allaient battre les Rams de St. Louis en 2001? Et que les Giants de New York allaient battre les Pats six ans plus tard? Tout peut arriver et il faut à tout prix respecter l'adversaire.

- Pour soulager les partisans des Alouettes, j'aimerais rappeler qu'ils ont quand même planté les Lions 56-18 la semaine dernière, les mêmes Lions qui ont battu les Riders deux fois cette année. Et les Tiger-Cats de Hamilton, pas plus tard qu'au mois d'octobre, ont battu les Riders 24-6...

- Si jamais les Alouettes devaient échapper celle-là, ils auront complété un carrousel peu enviable. En effet, en 2005, ils ont perdu la coupe Grey aux mains des Eskimos. L'année suivante, ils subissaient le même sort contre les Lions. Et la saison dernière, ils ont vécu une grande frustration contre les Stampeders.

Vous voyez ça? Quatre défaites en quatre occasions contre chacune des équipes de l'Ouest... J'aime autant ne pas y penser!

- C'est l'heure de ma prédiction. J'accorde beaucoup plus de respect aux Roughriders que j'en accordais aux Lions, mais je favorise tout de même les Alouettes pour l'emporter au compte de 34-25.

La planète NFL continue de tourner...

Je vous laisse donc avec mes choix pour la 12e semaine d'activité.

Miami c. Buffalo
Seattle c. St. Louis
Washington c. Philadelphie
Tampa Bay c. Atlanta
Indianapolis c. Houston
Cleveland c. Cincinnati
Caroline c. NY Jets
Kansas City c. San Diego
Jacksonville c. San Francisco
Arizona c. Tennessee
Chicago c. Minnesota
Pittsburgh c. Baltimore
Nouvelle-Angleterre c. La Nouvelle-Orléans

Résultats de la semaine XII: 10 victoires, 3 défaites.

Fiche après 12 semaines : 119 victoires et 52 revers.


*Propos recueillis par Nicolas Landry.