On peut tirer les conclusions qu'on veut des matchs préparatoires qui meublent un camp d'entraînement d'une équipe de football. Sachant que les entraîneurs veulent donner la chance à tous les réservistes de montrer ce qu'ils sont capables d'accomplir, il faut comprendre qu'il faut en prendre, en laisser et souvent prendre les résultats avec un grain de sel.

Ceci étant dit, voici ce que j'ai pensé du deuxième et dernier match préparatoire des Alouettes, qu'ils ont disputé samedi au Stade Percival-Molson.

Quand l'attaque, avec Anthony Calvillo en tête, est embarquée sur le terrain, je n'ai pas été capable de me retenir et je suis parti à rire. Pendant son bref passage dans le match, le vétéran quart-arrière a offert un petit échantillon de ce que c'est, l'attaque des Alouettes. Sur la première séquence, il a complété quatre passes de moins de dix verges à quatre receveurs différents et n'a appelé aucune course.

Bon, pour l'absence de jeu au sol, on va attendre avant de s'emporter, parce que c'est certain qu'en matchs préparatoires, on met toujours plus d'emphase sur le jeu aérien. Mais quand même, les porteurs de ballon n'ont pas été gâtés contre les Argonauts : deux courses pour un grand total de cinq verges en première demie!

Si la première possession des Alouettes s'est terminée par un placement raté de Damon Duval, la deuxième a mené au touché de Ben Cahoon. Disons qu'on n'était pas trop dépaysés!

Par la suite, j'ai bien aimé la performance de Danny Desriveaux. De toute évidence, Adrian McPherson et lui ont développé une certaine complicité parce que le quart-arrière substitut n'avait d'yeux que pour le numéro 82. Et ça, c'est tant mieux pour Desriveaux, qui doit encore une fois ronger son frein derrière Cahoon.

Il y a aussi un petit joueur pas mal dynamique que j'ai aimé : Tim Maypray. Il me fait un peu penser à Andrew Hawkins ou, pour ceux qui suivent les Alouettes depuis plus longtemps, à Thomas Haskins. D'ailleurs, il est allé à la même école que Haskins, soit la Virginia Military Institute (VMI). C'est justement lui et un autre ancien Alouette, Winston October (un entraîneur à VMI), qui lui ont parlé des Alouettes.

On a vu de Maypray qu'il est un gars à qui on peut remettre le ballon rapidement pour qu'il crée quelque chose. Il est capable de faire des gros jeux, il est explosif. C'est un playmaker, comme on dit. Dommage pour lui, par contre, il a échappé une longue passe de McPherson pour un touché certain au troisième quart, mais il avait quand même effectué un beau tracé et était parvenu à se démarquer.

Pour ce qui est de la défensive, la première chose qui saute aux yeux, ce sont les huit revirements qu'elle a causés contre Toronto. Ceux qui ont porté attention au déploiement défensif des Alouettes auront noté qu'ils ont joué énormément de « homme à homme ». Ce n'était rien de compliqué, on a opté pour la simplicité. Je pense qu'on a surtout voulu travailler nos techniques sans dévoiler quoique ce soit à l'adversaire.

Bref, on a gardé les grandes stratégies pour le match d'ouverture en Saskatchewan.

S'il y a un petit bémol à apporter - tout en vous ramenant à la précision que j'ai faite en début de chronique - c'est qu'en deux matchs préparatoires, les Alouettes ont accordé en moyenne près de 200 verges au sol. Ça, il ne faudrait pas que ça devienne une tendance, parce que c'est une recette pour te mettre dans le trouble. Ils ont accordé beaucoup de longues courses... Alors je ne veux alerter personne, mais ce serait peut-être un point à surveiller.

Au niveau des unités spéciales, on a eu droit à une performance typique des matchs préparatoires. Damon Duval qui rate deux placements, qui fait un botté d'envoi illégal, un long retour accordé sur un autre botté d'envoi... J'ai vu des formations à onze joueurs et même une à dix!

Je peux comprendre qu'en matchs préparatoires, tu as plus de joueurs en uniforme et ça devient un peu chaotique sur les lignes de côté, mais faudrait que ça s'arrête là. D'après moi, Trestman ne perdra pas de temps à faire passer le message à son entraîneur des unités spéciales. Une équipe travaille trop fort dans les entraînements pour arriver dans un match et se tirer dans le pied avec des erreurs aussi bêtes.

L'exploit de Brouillette, le moteur de Morin-Soucy

Ancien quart-arrière des Carabins de l'Unviersité de Montréal, Marc-Olivier Brouillette se retrouve maintenant chez les professionnels à tenter d'apprivoiser la position de secondeur extérieur. Si vous ne le réalisez pas, je peux vous dire que ce qu'il est en train d'accomplir est absolument exceptionnel.

C'est fou! On ne parle pas ici d'un joueur qui fait ce genre de transition au cégep ou encore à l'université. Il le fait chez les pros! On a vu Mathieu Bertrand passer de quart-arrière du Rouge & Or à centre-arrière pour les Eskimos d'Edmonton, ce qui est tout aussi exceptionnel, sauf que Brouillette en rajoute en passant de l'autre côté du ballon, au sein de l'unité défensive!

On savait que Marc-Olivier avait des qualités athlétiques indéniables. Il avait fait très bonne figure aux tests d'évaluation de la LCF. On savait aussi qu'il était très intelligent. Les Alouettes se sont dit qu'ils pouvaient bâtir quelque chose d'intéressant autour de ça.

Mais la plus belle qualité de Brouillette est probablement le fait qu'il est facile à coacher. Les entraîneurs ont toujours un faible pour les joueurs qui comprennent immédiatement une directive qui leur est donnée, à qui on n'a pas besoin de répéter. C'est le cas de la recrue québécoise.

En plus, samedi, quand des petites blessures ont commencé à apparaître dans la tertiaire, on a demandé à Brouillette d'aller jouer à la position de maraudeur. Il n'avait jamais joué là de sa vie et pourtant, il est loin d'avoir eu l'air fou. Sur un jeu en particulier, il a plaqué un joueur tellement solidement qu'il lui a fait perdre son casque. Sur un autre jeu, un long gain a été accordé, mais c'est tout simplement parce qu'il n'a pas pris le bon angle de poursuite. Sa lecture du jeu était bonne.

Je suis aussi content pour Nickolas Morin-Soucy qui, à pareille date l'an passé, s'était déchiré un ligament dans un genou. Lui aussi a très bien fait contre les Argonauts.

La grande force de Nickolas, c'est son moteur. Il doit encore développer sa technique et ses stratégies pour attaquer le passeur, mais sa grande marque de commerce, c'est son moteur. Il a une vitesse et c'est 100 milles à l'heure. C'est une qualité que les entraîneurs, et surtout les joueurs, apprécient parce que tu veux jouer avec des gars comme lui qui vont se présenter à coup sûr pour chaque jeu.

En plus de leur contribution à leur position respective, Brouillette et Morin-Soucy font sentir leur présence sur les unités spéciales. Ils sont gros et intenses. Ça fait quelques années que les Alouettes disent vouloir se grossir sur les unités spéciales et ces deux athlètes pourraient certainement aider.

D'autres observations

C'est certain que ce n'est pas une situation idéale pour les jeunes joueurs cette année. Les équipes ont un noyau solide, une équipe de vétérans. Et quand je parle d'une équipe de vétérans, je ne parle pas d'une vieille équipe.

C'est ce qui rend la tâche difficile pour les jeunes qui tentent de faire le club. Les Alouettes ont une équipe aguerrie, mais c'est une jeune équipe. À part Calvillo, Flory et Cahoon, et peut-être un Anwar Stewart en défensive, c'est rempli de jeunes jambes dans le vestiaire. C'est pourquoi il ne faut pas s'attendre à beaucoup de changements lorsque les dernières coupures seront annoncées.

Quand même, il faut s'attendre à quelques nouveaux visages, surtout en défensive avec les départs de Davis Sanchez et Keron Williams. Je m'attends à ce que De'Audra Dix prenne la place de Sanchez et à voir Jermaine McElveen et Darrell Campbell alterner pour remplacer Williams.

Ça démontre que les Alouettes sont une équipe qui possède énormément de profondeur. Les nouveaux partants sont des gars qui connaissent déjà le système. Quand je regardais les pratiques au camp d'entraînement, je voyais une équipe qui était déjà rendue à la 15e semaine du calendrier régulier. C'est pour ça que je m'attends à ce que les Alouettes, fidèles à leur habitude, connaissent un autre excellent début de saison.

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À l'attaque, c'est certain que le départ de Bryan Chiu va faire en sorte qu'une petite bataille s'installera à la position de garde à gauche, puisque Paul Lambert remplacera Bryan au centre. Cette bataille semble impliquer Luc Brodeur-Jourdain et Andrew Woodruff.

Ils ont connu un camp en dents de scie, mais en raison de l'expérience qu'il a acquise l'an passé, j'ai l'impression que Brodeur-Jourdain sera le partant pour débuter la saison. Il connaît ses affectations, il ne fait pas d'erreurs mentales, c'est un gars intelligent. Ce sont des qualités importantes pour tous les entraîneurs, mais particulièrement Marc Trestman, un coach très cérébral.

Sauf que son poste ne sera pas coulé dans le béton et il devra continuer de faire ses preuves à mesure que la saison progressera. Les deux joueurs ont passé un peu de temps au centre dans le deuxième match préparatoire et peuvent occuper les deux positions de garde. Ils seront en compétition pour un petit bout de temps, de sorte que ni l'un ni l'autre ne pourra s'asseoir sur ses lauriers. Cette situation ne peut que leur permettre de s'améliorer.

Pour ce qui est de Lambert, on ne peut pas parler de transition parce que la position de centre a toujours été sa meilleure. Ce n'est qu'en 2003, quand il a quitté Hamilton pour se joindre aux Alouettes, qu'il a été muté au poste de garde. Après tout, il ne fallait pas s'attendre à ce qu'il prenne la place de Chiu, qui venait de gagner le titre de meilleur joueur de ligne de la Ligue canadienne!

Paul a très bien fait comme garde, mais je pense qu'il est plus à l'aise au centre. Il n'a peut-être pas la rapidité son prédécesseur, donc il ne sera peut-être pas capable de réussir certains blocs que Bryan faisait. Par contre, il est plus gros, plus fort, plus costaud, plus pesant. Il aura donc un peu moins de problèmes dans certaines situations de protection sur des jeux de passes. Alors dans le fond, ça s'équivaut.

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À la position de retourneur, j'ai bien aimé Chad Owens, notamment sur les bottés de dégagement. J'ai aimé sa combativité et le fait qu'il n'a pas trop niaisé avec le ballon. Souvent, les retourneurs vont se mettre à danser et à piétiner sur place, donnant la chance à l'équipe adverse de se placer. Mais Owens attaquait verticalement aussitôt que le ballon lui tombait dans les mains. Et c'est ça le secret d'un bon retourneur. Si tu peux éviter la première vague de plaqueurs, tu te retrouves avec de l'espace pour bifurquer vers les lignes de côté.

Samedi contre Toronto, Owens a réussi un retour de 26 verges et j'ai aimé sa façon d'attaquer.

Les Alouettes ont aussi Andrew Hawkins, présentement blessé, et Brian Bratton, qui peuvent faire ce boulot. Mais mon préféré, c'est Owens.

*Propos recueillis par Nicolas Landry.