La décision du Marathon de Montréal d'annuler son épreuve phare, la course de 42,2 kilomètres, était la bonne. Celle de devancer d'une heure le départ du demi-marathon en était une autre. On ne badine pas avec la santé des coureurs.

Avec la température caniculaire annoncée pour le jour de la course, donner le départ du marathon aurait constitué un véritable danger pour certains coureurs. Et ce sont eux que l'organisation a voulu protéger. Si les coureurs élites n'auraient eu aucune difficulté à franchir la distance avant l'arrivée du gros de la chaleur, il en aurait été tout autrement pour le reste de la masse. Car il y a une différence entre courir en moins de trois heures un marathon et le faire en plus de cinq heures. Dans ce dernier cas, ça signifie que des hommes et des femmes se seraient trouvés à négocier le dernier quart du parcours sous une chaleur annoncée de près de 40 degrés avec le facteur humidex. Les coups de chaleur auraient été nombreux. Aucune organisation ne veut voir ses participants prendre de tels risques.

Il faut saluer le courage des dirigeants du marathon montréalais puisque cette nouvelle représente des pertes financières importantes. Des sommes d'argent considérables avaient déjà été engagées pour la préparation et le repérage du parcours qui ne servira finalement qu'à moitié. Les coureurs se sont vus offrir la possibilité d'être remboursés ou d'obtenir un autre dossard à un marathon de la série « Rock'n Roll ». Ils pourront également, s'ils le souhaitent, prendre le départ du demi-marathon. Une chose est certaine, peu importe quel sera leur choix, le plaisir ne sera pas celui anticipé.

Pour les coureurs, c'est une petite tragédie. Lorsque la nouvelle de l'annulation du marathon est tombée sur les fils de presse mercredi après-midi, il fallait lire sur les médias sociaux les commentaires des participants pour réaliser à quel point plusieurs voyaient la réalisation d'un rêve être entravée. C'est tellement vrai.

Participer à un marathon, cette distance mythique de 42,2 kilomètres qui inspire le respect, nécessite une préparation sérieuse. On ne s'inscrit pas à une telle course sans avoir au préalable entrepris une réflexion. Cela représente de longues semaines d'entraînement avec parfois d'aussi longues sorties de courses pour suivre un plan bien établi permettant de se présenter au départ de l'épreuve choisie dans des conditions physiques et psychologiques optimales. On porte une attention particulière à son alimentation, on se prive de bien des choses et on doit même parfois sacrifier certaines activités sociales ou familiales pour aller courir.

La très grande majorité des coureurs qui se préparaient à participer au Marathon de Montréal ce dimanche avaient suivi un plan d'entraînement qui leur permettait d'être dans une forme optimale juste au bon moment. Ce ne sera pas le cas s'ils choisissent une autre course du calendrier. Il auront « peaké » au mauvais moment!

C'est encore une plus grande tragédie pour les coureurs de l'extérieur de la région montréalaise qui avaient réservé leur chambre d'hôtel, leurs restaurants ou leurs billets d'avion. N'oublions pas les nombreux coureurs de l'Ouest canadien, les Américains et les Européens qui avaient choisi la métropole québécoise pour y courir.

Pourtant, c'était la décision à prendre. J'ai déjà participé à des courses où il faisait très chaud. Hawaï et Miami me viennent en tête. Mais les coureurs savaient à quel genre de température ils auraient affaire et s'étaient longuement préparés en conséquence. Ce n'est pas le cas avec l'événement montréalais puisque le mercure prévu dimanche sera nettement au-dessus de ce qui était prévisible.

Si l'organisation du Marathon de Montréal n'avait pas pris cette décision, elle se serait exposée à son lot de critiques. Souvenez-vous du Marathon de New York annulé à la toute dernière minute en 2012 après le passage de la tempête Sandy. Le maire de l'époque, Michael Bloomberg, avait affirmé que la course aurait lieu malgré tout en raison des retombées économiques importantes (300 millions de dollars) qui aideraient la ville à se redresser. On avait surtout reproché à l'organisation d'avoir attendu beaucoup trop tard pour annuler alors que la majorité des 40 000 coureurs étaient arrivés en ville.

En 2011, le Marathon des Deux Rives à Québec avait annulé l'épreuve reine de 42,2 kilomètres alors qu'on était en attente du passage des retombées de l'ouragan Irène. Tous les marathoniens avaient été invités à participer au demi-marathon. Les coureurs, lorsque c'est pour leur protection, comprennent ce genre de décision. Encore faut-il en prendre une et le faire le plus rapidement possible.

C'est ce qu'ont fait les membres du comité organisateur du Marathon de Montréal. Les coureurs comprendront et se remettront de leur déception initiale. C'est une question de sécurité. Je salue cette décision courageuse.