Le Sud-Africain Wayde Van Niekerk a un objectif avoué, être le premier homme sous les 43 secondes au 400 m et la mission de succéder à l'icône de l'athlétisme Usain Bolt, le sprinter quasi invincible retraité à la fin des Mondiaux de Londres.

« WVN » aime explorer les frontières, ayant couru aussi le 100 m en moins de 10 secondes (9,94) et le 200 m sous les 20 secondes (19,84).

Mais, bien sûr, enfreindre le mur des 43 secondes sur le tour de piste, c'est le Graal.

« Abattre le mur est l'expression qui sied au 400 m, car, dans la dernière ligne droite, l'acide lactique vous met dans un drôle d'état. Heureusement, grâce à un entraînement très pointu, je souffre moins depuis l'an dernier », explique à l'AFP l'homme capable de revisiter le record du monde de Michael Johnson (43,18), vieux de 18 ans, pour le porter tout près de la barrière mythique (43.03) en finale des Jeux de Rio, en aveugle au couloir 8.

Cheveux blancs

Pour le guider dans ces explorations, l'entraîneur n'a pas les traits du baroudeur mais les cheveux blancs de « tante » Ans Botha, née en Namibie il y a 75 ans.

Ans Botha ou une main de fer dans un gant de velours. « J'aime tous mes athlètes, mais je sais aussi être rigoureuse. Nous pouvons rigoler mais quand nous devons travailler, nous le faisons durement », avait déclaré l'entraîneuse que le monde avait découvert après la finale olympique.

« Une seconde de gagner en un demi-siècle », rappelle Ans Botha, comme s'il s'agissait de conquête de l'espace. Les Américains Lee Evans et Larry James avaient pour la première fois enfreint la frontière des 44 secondes en 1968 aux Jeux de Mexico, profitant aussi des 2250 m d'altitude et du climat électrisant au sein de la délégation US après que Tommie Smith et John Carlos eurent levé un poing ganté sur le podium du 200 m pour protester contre les discrimations à l'encontre des Noirs aux Etats-Unis. Point de revendication politique chez Van Niekerk, un métis de la nation arc-en-ciel.

Pour sa mère

Ce serait plutôt des raisons personnelles qui le poussent à franchir les frontières. « Ma mère (Odessa Swarts) n'a pu exprimer son talent (de sprinteuse) en son temps (l'Afrique du Sud étant interdite de compétitions internationales à cause de l'apartheid), je cours aussi pour elle », avait-il avoué avant le meeting de Monaco cette année.

Comme l'an dernier pour préparer les Jeux, Van Niekerk (25 ans) a son camp de base durant la saison estivale à Gemona, dans le Frioul, région italienne de frontières entre les mondes germanique, latin et slave.

Il s'y prépare avec Akine Simbine, cinquième du 100 m aux Jeux de Rio et encore samedi à Londres, et le sauteur en longueur Ruswahl Samaai, médaillé de bronze il y a trois jours. Les trois partagent le même agent.

Constamment interrogé sur la succession de Bolt, WVN fait profil bas. « J'ai un immense respect pour lui. Il mérite qu'on le remercie et qu'on l'honore pour tout ce qu'il a fait pour notre sport. Et puis j'ai d'autres qualités. Si je dois être son héritier, ce sera par mes performances, en étant moi-même. Je dois me concentrer d'abord sur mes performances. Alors, prendre la relève de Bolt, j'ai du chemin... »

À Londres, il veut relever le défi du doublé 400/200 m, sur les traces de Michael Johnson. Ca change des sempiternels doublés 100/200 m de la légende Bolt.

Et puis Van Niekerk donne déjà une image « clean » de l'athlétisme sud-africain, englué ces dernières années dans les affaires Oscar Pistorius, l'athlète paralympique multimédaillé assassin de sa compagne, et de la double championne olympique intersexuée du 800 m Caster Semenya.