Christine Girard chef de mission du Canada aux Jeux panaméricains
MONTRÉAL - Christine Girard attendait depuis longtemps le moment idéal pour redonner aux athlètes canadiens ce qu'elle avait elle-même reçu des chefs de mission lors de grands jeux internationaux. Ce moment est arrivé jeudi, alors qu'elle a officiellement été nommée chef de mission pour les Jeux panaméricains de Santiago, au Chili, qui seront disputés en octobre et novembre prochains.
« J'ai vu le sport de plusieurs angles différents dans ma carrière, a indiqué l'ex-haltérophile de 38 ans à l'Institut national du sport du Québec, où avait lieu la conférence de presse. Je pense que c'était le temps pour moi de redonner et de partager cette expérience-là. J'ai eu la très grande chance d'avoir de très bons chefs de mission au cours de ma carrière. C'est effectivement une belle boucle, et je suis très contente d'embarquer dans ce projet-là. »
C'est la présidente du Comité olympique canadien (COC), Tricia Smith, qui lui a annoncé la nouvelle au début de décembre.
« J'étais vraiment contente. Quand j'ai passé mon entrevue, je leur avais dit que j'avais confiance en eux pour choisir la meilleure personne qui soit pour ce poste, même si ce n'était pas moi. (...) Ça fait vraiment longtemps que je dois garder le secret et c'est un beau moment que de pouvoir enfin le dire aujourd'hui », a-t-elle mentionné, visiblement soulagée.
L'exemple de Turcotte
Son premier contact avec les grands jeux multisports s'est fait par les Panam de Saint-Domingue, en 2003, où elle a pu côtoyer Maryse Turcotte. Haltérophile comme elle, Turcotte, sa cochambreuse, avait participé aux Jeux olympiques de Sydney, en 2000, et allait être de l'aventure d'Athènes, en Grèce, en 2004.
« Je n'ai pas cessé de la questionner sur ses méthodes d'entraînement, la façon qu'elle pensait, ce qu'elle mangeait: je voulais tout savoir », s'est rappelée avec éloquence celle qui est maintenant ergothérapeute en santé mentale dans une clinique privée d'Ottawa.
« Je trouve ça vraiment merveilleux, a-t-elle poursuivi. C'est comme ça que je suis vraiment entrée dans le sport d'élite, avec les Panam de 2003, à côtoyer une Olympienne. De commencer mon après-carrière comme ça, je trouve que c'est génial.
« Quand moi je participais aux Panam ou aux grands jeux multisports, c'est vraiment le sentiment de communauté, d'être comprise, d'être validée dans ce qu'on fait, dans ce qu'on est, a-t-elle ajouté. C'est vraiment ce que je veux apporter: un environnement confortable, sécuritaire, où on se sent comprise, validée et supportée dans ce qu'on vit. Que ce soient de bons moments ou des moments plus difficiles; les deux font partie du sport. »
Et les moments difficiles, Girard peut en parler, elle qui est passée par toute la gamme des émotions au cours de sa carrière
Après avoir terminé au pied du podium chez les 63 kg lors des Jeux olympiques de Pékin, en 2008, la native d'Elliot Lake, en Ontario, est devenue quatre ans plus tard la première Canadienne médaillée olympique d'haltérophilie en s'emparant du bronze aux Jeux de Londres. Du moins, c'est ce qu'elle croyait.
Or, cette médaille s'est transformée en disque d'or quand, trois ans plus tard, une nouvelle ronde de tests antidopage a épinglé les deux athlètes qui l'avaient devancée - la Kazakhe Maya Maneza et la Russe Svetlana Tsarukaeva.
L'année suivante, en 2016, elle a appris que sa quatrième place acquise aux Jeux de Pékin s'était plutôt transformée en médaille de bronze, la réelle première médaille canadienne en haltérophilie, à la suite de l'exclusion d'une autre haltérophile, la Kazakhe Irina Nekrassova, médaillée d'argent.
C'est un peu tout ce bagage et cette implication qui ont fait en sorte que Girard ait été recommandée par le comité de sélection, qui a étudié de 70 à 75 candidatures, a affirmé Éric Myles, chef du sport du COC.
« Quand on arrive à la sélection des chefs, c'est une des belles portions de mon travail, a-t-il souligné. Mais on a aussi des choix difficiles à faire. On a tellement des athlètes extraordinaires et plusieurs sont intéressés par ce rôle-là. On a un comité de sélection qui est bien structuré, qui compte sur Tricia Smith et David Shoemaker (chef de la direction et secrétaire général du COC), notamment, et d'anciens chefs de mission des Panam comme Bruny Surin. Ce comité-là, à travers sélections et entrevues, choisit un chef avec un profil qui va au-delà du sport.
« Christine apporte beaucoup avec son histoire personnelle, son rôle de mère, de mentor, toute l'intégrité qu'elle apporte à l'équipe. Ce sont les grands points qu'on regarde. Depuis Sylvie Bernier en 2008, ce sont des athlètes qui apportent beaucoup du côté humain qui sont choisis », a rappelé Myles.
Ce qu'elle a vécu a amené Girard à devenir une ambassadrice et une porte-parole engagée pour le sport sécuritaire, juste et éthique. Elle est d'ailleurs l'ambassadrice de l'éducation pour le compte de l'International Testing Agency et membre de la commission antidopage de la Fédération internationale d'haltérophilie, qui a grand besoin de refaire sa crédibilité.
« Ils ont vraiment apporté de grands changements, dit-elle au sujet de la fédération. Ce n'est pas parfait, mais je suis heureuse de pouvoir travailler avec eux sur cet enjeu. »
« C'est clair que (le sport propre), c'est un point que nous défendons au Canada. Mais c'est plus que ça qui l'a menée à ce poste, a assuré Myles. Nous ne sommes toutefois pas mal à l'aise du tout avec ce message-là. Christine en est une grande porte-parole. »
En plus de ses médailles olympiques, Girard a aussi remporté une médaille d'or (2011) et une médaille d'argent (2007) aux Jeux panaméricains. Mère de trois enfants de huit, sept et cinq ans, elle attendait que sa famille grandisse un peu avant de soumettre sa candidature et redonner aux athlètes.
« Ça va être plus facile de passer deux semaines avec papa sans maman! C'est ce qui m'a poussée à le faire », a-t-elle reconnu.
Les Jeux panaméricains de 2023 s'ouvriront à Santiago, au Chili, le 20 octobre. Les compétitions prendront fin le 5 novembre.