MONTRÉAL - Quand il se met à penser aux Jeux olympiques de Tokyo remis à l'an prochain, l'escrimeur Joseph Polossifakis avoue qu'il stresse. Et pour cause. Non seulement n'a-t-il toujours pas mérité sa qualification, mais il ignore à quel moment il pourra disputer la compétition qui lui permettrait de l'obtenir.

Qui plus est, le confinement obligatoire des dernières semaines dans la foulée de la pandémie de coronavirus l'oblige à repenser tout son entraînement.

« Je vis beaucoup d'incertitude en ce moment et quand je me mets à trop y penser, le stress prend le dessus », reconnaît l'olympien de 29 ans qui fait partie des quelque 40 pour cent d'athlètes qui n'ont toujours par leur laissez-passer pour Tokyo.

« Et en plus, il me reste à savoir comment ça va se passer pour la suite du processus de qualification. Nous attendons toujours des précisions de la Fédération internationale. »

Un seul athlète de la zone des Amériques peut se qualifier par épreuve et Polossifakis occupe actuellement le 2e rang, derrière son coéquipier Shaul Gordon.

« Le Canada est donc en bonne position pour obtenir la place olympique réservée au meilleur sabreur des Amériques, note celui qui s'est classé 23e aux Jeux de Rio de Janeiro en 2016. Mais on ne sait toujours pas quand la compétition pour compléter le processus de qualification aura lieu. »

Comme elle réunira 220 escrimeurs de tous les pays, il faudra sans doute patienter jusqu'à l'automne avant que toutes les restrictions de voyage soient levées.

Source de fierté

Heureusement pour lui, Polossifakis est également un athlète qui occupe un emploi, ce qui l'aide à garder une routine. Et il estime aussi important de sortir de sa bulle d'athlète pour venir en aide à autrui en cette période de crise sanitaire.

Il a donc répondu présent lorsque le Comité olympique canadien (COC) lui a demandé son concours dans le cadre de sa campagne "Nous sommes tous Équipe Canada".

« Le COC et ses partenaires ont fait don de toutes les denrées qui devaient être envoyées au Japon ce mois-ci. Le report des Jeux de Tokyo à l'an prochain est certes dommage pour les athlètes, mais cette initiative fera beaucoup de bien car les besoins sont énormes en ce moment. J'aime m'impliquer dans ce genre de cause et redonner aux autres, c'est un facteur de fierté pour moi.

« Les banques alimentaires font actuellement face à une demande historique et j'ai été surpris d'apprendre que Moisson Montréal, l'une des plus importantes au Canada, remet chaque mois plus deux millions de kilos de denrées à différents organismes communautaires. »

Le COC évalue son don à environ 60 000 $.

Sacrifices

À bientôt 30 ans - il les aura le 21 août - Polossifakis reconnaît que le report d'un an des Jeux l'oblige à revoir ses plans d'avenir. Il envisageait déjà son après-carrière mais tout est désormais remis à plus tard.

« C'est une partie du casse-tête dans les décisions à prendre. Je vais être obligé de revoir l'échéancier avec mon employeur - Petro-Canada - jusqu'aux Jeux. Il y a aussi que c'est beaucoup de sacrifices, sur les plans mental, financier et physique. La dernière année a été très taxante et ça devient difficile de concilier mon sport et le travail.

« Mais s'il n'y a pas trop de compétitions d'ici la fin de l'année qui m'obligent à voyager pendant de longues périodes, je suis prêt à continuer. »

L'autre défi qui se dresse devant lui, c'est la difficulté de s'entraîner dans des conditions optimales puisque les installations au Stade olympique sont fermées.

« L'escrime est un sport tactique, qui exige du synchronisme et de la stratégie. Et ce n'est pas évident de s'entraîner adéquatement sans installation et partenaire.

« Présentement, je dois faire les choses différemment. Je tente de garder la forme. À chaque jour, je fais un peu de course à pied ou du vélo à l'extérieur pour maintenir mon cardio. Mais c'est certain que je bouge moins qu'avant. »