Lorsqu’il arrivera sur le tatami dimanche au Grand Prix de Montréal, ce sera une journée de grandes premières pour le judoka Kevin Gauthier : première participation à un Grand Prix chez les seniors et possiblement un affrontement contre celui qui est au sommet du palmarès de l’histoire du judo, le Français Teddy Riner!

Gauthier le mentionne, il n’arrivera pas à Montréal au meilleur de sa forme en raison d’un concours de circonstances, lui qui s’est déchiré le ligament croisé antérieur du genou droit il y a un peu plus d’un an.

« Avant ma blessure, j’étais chez les juniors et à mon retour, je suis chez les seniors. Je me laisse donc du temps. Pour être honnête, ma préparation n’est pas optimale parce que je travaille cet été », relate celui qui est de retour dans son Asbestos natal pour la saison estivale, où il amasse de l’argent afin de payer ses dépenses sportives et scolaires.

Face à l’élite

Dimanche, le judoka de 22 ans affrontera Vladut Simionescu au premier tour. Le Roumain compte quelques médailles en tournois Grand Chelem et Grand Prix, alors la tâche ne s’annonce pas facile. Si le Québécois remporte ce match, il pourrait ensuite affronter la légende vivante de son sport, le Français Teddy Riner, dix fois champion du monde, double champion olympique et invaincu en 144 combats.

« C’est une motivation de plus pour gagner mon premier combat. L’affronter en tournoi, ce serait une occasion incroyable, alors je vais tout faire pour gagner mon premier match. Et je vais espérer que lui aussi gagne le sien », lance l’athlète à la blague qui fera son entrée au baccalauréat en kinésiologie à l’Université du Québec cet automne.

« Je suis content d’être là et j’ai juste une idée en tête : me battre le plus fort que je peux et rentrer dans ce gars-là (Simionescu) comme un bulldozer ! Le pire qui va arriver, c’est que je vais perdre. Gagner ou perdre, je ne pense pas à ça pour ce tournoi-là et je ne suis vraiment pas nerveux. »

La catégorie des +100 kg est une classe à part dans le milieu du judo. À titre d’exemple, Gauthier, qui pèse 125 kg, concéderait 25 kilos à Teddy Riner s’il l’affronte au deuxième tour, l’équivalent de deux ou trois catégories dans les poids inférieurs.

« C’est quelque chose que je travaille beaucoup avec mes entraîneurs. Face à des personnes imposantes, je dois être mobile. En étant plus petit et moins gros, je ne peux pas me permettre d’écraser et de forcer. Il faut que je me déplace pour profiter du fait que je suis plus petit », explique celui qui aura plusieurs amis et membres de sa famille pour le voir en action.

L’esprit du judo

Sans avoir un palmarès international étoffé, Kevin Gauthier est sûrement un des athlètes qui représente le mieux l’esprit du judo.

Aux Jeux du Canada de Prince George (Colombie-Britannique), en 2015, il avait défait Brent Betsina, un athlète des Premières Nations qui avait procuré une première médaille aux Territoires du Nord-Ouest en judo. Après le salut de fin de combat, et même s’il avait remporté le duel, Gauthier s’est rapidement éclipsé pour laisser la place au médaillé d’argent qui a célébré cette performance historique pour son équipe.

Lorsqu’on lui rappelle cette anecdote, Gauthier s’en souvient comme si c’était hier.

« Nous nous étions entraînés ensemble la semaine avant. Je n’ai jamais été un mauvais gagnant et suis quelqu’un de très humble dans la vie, alors c’était tout naturel de lui laisser la place. Mon entraîneur à Asbestos m’avait dit que le judo, ça reste un jeu. On se bat, on se tiraille, on fait de son mieux et ce qu’il faut pour gagner. Mais au final, nous sommes tous des êtres humains. Je me bats contre mon adversaire, mais il n’y a pas de raison que je le déteste à l’extérieur de la surface. Les valeurs du judo sont mes valeurs, alors c’est peut-être pour ça que j’en fais depuis aussi longtemps! »