LAUSANNE, Suisse - Les leaders du mouvement olympique n'ont pas opté pour une exclusion complète de la Russie aux Jeux de Rio de Janeiro, dimanche, demandant plutôt aux fédérations mondiales de chaque sport de décider si les athlètes russes pourront y participer.

La décision, annoncée après une téléconférence de trois heures de la commission exécutive du Comité international olympique, survient seulement 12 jours avant l'ouverture des Jeux de Rio, le 5 août.

« Nous devions trouver un équilibre entre la responsabilité collective et la justice individuelle à laquelle chaque humain et athlète a droit », a déclaré le président du CIO, Thomas Bach.

Le CIO a rejeté une demande de l'Agence mondiale antidopage (AMA) et de dizaines d'autres organisations antidopage d'exclure l'ensemble de l'équipe olympique russe à la suite de la publication des résultats d'une enquête sur le dopage caché par l'État russe.

L'équipe russe d'athlétisme a déjà été bannie par la Fédération internationale des associations d'athlétisme, une décision qui a été maintenue par le Tribunal arbitral du sport, jeudi, et acceptée à nouveau par le CIO, dimanche.

Les demandes d'exclusion complète de la Russie avaient été multipliées après que Richard McLaren, un avocat canadien, eut présenté lundi les résultats d'une enquête commandée par l'AMA. Le rapport McLaren soutient que le ministère du Sport de la Russie supervisait un vaste programme de dopage de ses athlètes olympiques.

L'enquête de McLaren, basée principalement sur des preuves fournies par l'ancien directeur du laboratoire antidopage de Moscou Grigory Rodchenkov, a conclu que le gouvernement russe avait manipulé des échantillons d'urine récoltés pendant les Jeux d'hiver de Sotchi. De plus, elle mentionne que l'État russe avait été impliqué dans le dopage d'athlètes de 28 sports d'été et d'hiver entre 2011 et 2015.

Le CIO a toutefois tranché contre la peine ultime, une décision conforme aux récents propos de Bach, qui souhaitait que tous les athlètes ne soient pas punis pour les erreurs de certains. Le CIO a déclaré que le rapport McLaren n'avait pas porté d'accusations directes contre le Comité olympique russe « en tant qu'institution ».

« Un athlète ne devrait pas souffrir ou ne devrait pas être puni pour un système dont il ne faisait pas partie », a déclaré Bach aux journalistes lors d'une conférence téléphonique à la suite de la réunion de dimanche.

Bach a admis que la décision ne va « peut-être pas plaire à tout le monde ».

« Ce n'est pas une question d'attentes, a-t-il dit. C'est une question de justice pour les athlètes propres à travers le monde. »

Le président du Comité olympique russe, Alexander Zhukov, a plaidé sa cause à la commission du CIO lors de la réunion de dimanche, promettant une coopération complète avec les enquêteurs et garantissant « une restructuration complète du système antidopage russe ».

Le CIO a aussi rejeté la demande de la dénonciatrice russe Yulia Stepanova de participer aux Jeux olympiques en tant qu'athlète neutre. Stepanova est une spécialiste du 800 mètres qui a déjà échoué à un test antidopage, mais qui a aidé à exposer le programme de dopage en Russie.

Stepanova habite maintenant aux États-Unis, mais le CIO a mentionné qu'elle ne respectait pas les critères pour participer aux Jeux sous la bannière olympique puisqu'elle a déjà échoué un test antidopage, une « condition éthique » nécessaire pour participer aux Jeux. Le CIO a toutefois mentionné que Stepanova et son époux, Vitali Stepanov, allaient être invités à assister aux Jeux.

Tout en rejetant l'exclusion complète de la Russie, le CIO a imposé des critères élevés d'admissibilité, entre autres en bannissant des Jeux de Rio tout athlète russe ayant déjà été puni pour dopage.

Le CIO a mentionné qu'il allait seulement permettre la participation des athlètes russes qui respectent certaines conditions établies par les 28 fédérations internationales.

Les fédérations « devraient effectuer une analyse individuelle du dossier antidopage de chaque athlète en tenant compte seulement des tests internationaux fiables et adéquats (...) pour assurer des compétitions justes », a déclaré le CIO.

La commission a demandé à chaque fédération d'examiner les informations et de noter les noms des athlètes impliqués dans le rapport McLaren. Tous ces athlètes devraient être exclus, selon la commission.

Le CIO a déclaré que les fédérations devront appliquer leurs propres règles si elles souhaitent bannir l'équipe russe des Jeux de Rio dans leur sport, ce que l'IAAF a fait en athlétisme.

La participation d'athlètes russes sera vérifiée et devra être approuvée par un expert du Tribunal arbitral du sport, a ajouté le CIO.

Les athlètes russes qui reçoivent le feu vert pour participer aux Jeux seront sujets à "un programme de tests antidopage hors compétition additionnel et rigoureux".

Le CIO a aussi réitéré ses « inquiétudes sérieuses » au sujet des failles dans le combat contre le dopage, demandant à l'AMA de « réviser dans l'ensemble son système antidopage ».

La décision du CIO est liée à de nombreuses ramifications géopolitiques.

Un pays n'a jamais été banni des Olympiques pour dopage et la Russie de Vladimir Poutine est une puissance sportive, un énorme pays cherchant à réaffirmer son statut sur la scène mondiale et un membre important du mouvement olympique. Plusieurs dirigeants olympiques internationaux ont des liens serrés avec la Russie, qui a qualifié l'exclusion de son équipe d'athlétisme de campagne politique menée par l'Occident.

Poutine, rappelant les boycottages américains et soviétiques des Jeux de 1980 et 1984, a déclaré que le mouvement olympique pourrait « à nouveau être au bord d'un schisme ».

Des leaders du mouvement antidopage ont déclaré que l'étendue du programme de dopage en Russie avait affecté la perception générale du sport au pays et que la seule manière d'assurer des compétitions justes aux Jeux de Rio était en bannissant toute la délégation, même si des athlètes innocents étaient touchés.