Le procureur demande 10 ans de prison
Athlétisme vendredi, 17 oct. 2014. 08:36 mercredi, 11 déc. 2024. 09:25PRETORIA - Au dernier jour des plaidoiries du procès d'Oscar Pistorius, le procureur a requis vendredi 10 ans de prison contre le champion paralympique, coupable de l'homicide involontaire de sa petite amie en 2013, alors que la défense a plaidé pour une peine de substitution.
La juge Thokozile Masipa, qui préside le tribunal, rendra sa sentence mardi 21 octobre.
Dans ce procès-fleuve qui dure depuis plus de sept mois et qui a attiré à Pretoria les médias du monde entier, le procureur Gerrie Nel et l'avocat Barry Roux, deux ténors de la justice sud-africaine, se sont livrés à une ultime passe d'armes.
« La peine minimum qui serait satisfaisante pour la société est de dix ans de prison », a lancé Gerrie Nel en conclusion de son réquisitoire.
Avant lui, Barry Roux avait demandé « une peine utile à la société », excluant la prison, pour l'ex-champion paralympique de 27 ans, qui a abattu son amie Reeva Steenkamp de quatre balles en février 2013, en croyant tirer sur un cambrioleur.
Après avoir dénoncé « la suggestion choquante et inappropriée » d'une peine de substitution, le procureur a martelé: « La punition doit refléter le caractère sacré de la vie humaine (...) Reeva a eu une mort horrible, elle était innocente ».
Au long de son réquisitoire, il a mis l'accent sur la douleur des parents de Reeva Steenkamp, laissant entendre que la famille serait choquée si Pistorius n'allait pas en prison.
Puis il est revenu sur les circonstances de la tragédie, martelant : « Pistorius a tiré en sachant que quelqu'un se trouvait là », derrière la porte des toilettes, alors qu'il n'avait en rien été menacé.
Gerrie Nel répondait à la longue plaidoirie de l'avocat Barry Roux, qui pendant une heure et demie a tenté de convaincre que la prison n'était pas la bonne solution pour son client.
Il a d'abord avancé que Pistorius avait subi une terrible épreuve en étant présenté par la presse du monde entier comme un meurtrier de sang froid et une tête brûlée. « Aucune punition ne peut être pire que ce qu'il a traversé depuis 18 mois », a-t-il dit. « On l'a dénigré au point de faire de lui un tueur fou, un tueur de sang froid, et un tas de choses horribles ».
La justice a finalement accepté la version de l'accident, et admis que Pistorius avait tiré en croyant qu'un cambrioleur était caché dans ses toilettes.
« Ubuntu, compassion et humanité »
Me Roux a beaucoup insisté sur les « remords sincères » de l'accusé, qui a tué « une personne qu'il aimait ».
« La douleur d'Oscar ne s'effacera jamais (...) le traumatisme émotionnel est la pire punition », a-t-il martelé, tout en soulignant que l'ancien champion avait « tout perdu » et était actuellement à cours d'argent.
Pistorius a pleuré abondamment lorsque Barry Roux a décrit sa chute du statut d'idole sportive à celle de meurtrier.
Puis l'avocat a rappelé plusieurs cas de la jurisprudence sud-africaine, où un accusé ayant tué une personne de sa famille dans les mêmes circonstances n'a pas été condamné à une peine de prison. Il a notamment fait allusion au célèbre cas de Rudi Visagie, ancien rugbyman international, qui avait tué sa propre fille en 2004 en la prenant pour un cambrioleur, et qui a été dispensé de peine.
« La justice doit être rendue, mais elle doit être rendue avec compassion et humanité », a plaidé l'avocat, citant à plusieurs reprise le principe d'"Ubuntu", un humanisme attentif à l'être humain cher à Nelson Mandela, devenu une valeur de base de la société sud-africaine post-apartheid.
Il a aussi insisté sur le handicap de son client. Selon lui, le placer dans la section médicale de la prison centrale de Pretoria, comme cela a été envisagé, « ne serait pas une punition appropriée ».
Dans cette section, a-t-il plaidé, on est un patient. On ne peut pas sortir en promenade, ou participer aux activités proposées aux autres prisonniers.
Ce à quoi le procureur a rétorqué qu'Oscar Pistorius, pendant sa carrière sportive, avait toujours voulu être considéré comme un homme comme les autres. « Il met en avant son handicap quand ça l'arrange », a raillé Gerrie Nel.
Dans un dernier rebondissement, l'avocat a affirmé que Pistorius refuserait que les parents de Reeva Steenkamp lui rendent l'argent qu'il leur a avancé, comme c'était prévu. « S'ils ne veulent pas garder l'argent, M. Pistorius souhaite que cet argent soit versé à une oeuvre caritative », a-t-il dit, dans une ultime tentative pour brosser le portrait d'un Pistorius écrasé par le remords et avide de rédemption.