Quelle est la longueur de foulée des meilleurs coureurs de la planète? Quelle est la vitesse maximale d’un sprinter comme Usain Bolt? Quelle est l’amplitude des sauts aux haies? Les foulées d’une légende du demi-fond comme Mo Farah sont elles toujours identiques? À quelle vitesse le poids quitte-t-il la main d’un lanceur de calibre international?

Autant de questions qui trouvent maintenant des réponses grâce à une étude sur la biomécanique humaine approuvée par l’Association internationale des fédérations d’athlétisme (IAAF) et réalisée par le département des sports de Carnegie de l’Université Leeds Beckett au Royaume-Uni.

C’est du jamais vu dans l’histoire de l’athlétisme! Les chercheurs universitaires ont profité des Championnats du monde de 2017 à Londres pour étudier les meilleurs athlètes de la planète. Ils ont installé une panoplie de caméras haute vitesse et haute définition pour enregistrer les performances des 730 athlètes prenant part aux 76 épreuves individuelles au programme de ces Mondiaux d’athlétisme.

Tous les aspects d’une compétition étaient scrutés par le plus grand nombre de caméras possibles. Par exemple, 23 caméras furent déployées lors des finales du 100 mètres!

Après un an d’analyses, l’Université Leeds Beckett a présenté, le 15 juillet dernier, le produit de ses travaux lors de la réunion annuelle des entraîneurs de l’IAAF à Tampere, dans le sud de la Finlande. 38 rapports détaillés ont été rendus disponibles sur le site de l’IAAF. Ils feront les délices des entraîneurs cherchant à améliorer les performances de leurs athlètes ou à leur éviter des blessures.

Quelques résultats parmi tant d’autres

Se plonger dans la lecture de ces rapports exerce une fascination. On y voit les qualités des meilleurs coureurs, mais également leurs défauts. On réalise rapidement que ce ne sont pas tous les athlètes qui possèdent des techniques ou des aptitudes biomécaniques parfaites.

Infographie Emma Coburn

L’Américaine Emma Coburn n’est pas une des meilleures au 3000 mètres steeple par hasard. Cette discipline éprouvante requiert que l’athlète franchisse à quelques reprises une barrière fixe et atterrisse dans l’eau pendant sa course. Les coureurs doivent allonger leur saut pour ne pas être ralentis par une réception dans une trop grande profondeur d'eau. La technique de Coburn, et du reste de l’équipe américaine, fut la clé de la victoire. L’étude de Leeds nous révèle que la coureuse à la chevelure blonde est celle qui atterrit le plus loin de la barrière. Un saut de 2,30 mètres. L’IAAF a publié d’intéressants montages photographiques sur ses médias sociaux pour illustrer ce que cela représente. C’est un peu comme si Coburn passait par-dessus un dauphin de taille moyenne.

On apprend également que la différence de chrono entre les médailles d’or et d’argent au 4 X 100 mètres masculin résulte d’une meilleure transmission dans la zone des témoins. Les Britanniques furent cinq centièmes plus rapide au total que leurs rivaux américains. Cela représente exactement leur marge victorieuse.

Infographie Balazs Baji

Les spécialistes des courses de haies doivent franchir le plus rapidement possible les haies sans que cela ne diminue leur vitesse. La technique parfaite est celle du Hongrois Balazs Baji. Le médaillé de bronze à Londres amorçait ses sauts deux mètres avant l’obstacle et atterrissait deux mètres plus loin. Un impressionnant bond de quatre mètres. C’est un peu comme sauter par dessus une voiture sport! Ou bien, un peu moins de la moitié des performances des sauteurs en longueur élites qui compétitionnaient à ces mêmes championnats.

La médaillée d’or du 10 000 mètres, l’Éthiopienne Almaz Ayanna, a étonné les chercheurs en raison de ses foulées inégales. Sa foulée droite-gauche est 20 centimètres plus longs que la gauche-droite! Cela aurait été impossible à percevoir à l’œil nu. Si son entraîneur l’aide à éliminer cette asymétrie, Ayanna pourrait courir encore plus rapidement et éviter d’éventuelles blessures. De son côté, le Britannique Mo Farah a des foulées quasi identiques.

Infographie Tianna Bartoletta

Une bonne vitesse est primordiale pour les sauteurs en longueur. Chez les femmes, la palme de la vitesse revient à l’américaine Tianna Bartoletta. La sprinteuse a amorcé son saut pour la médaille de bronze alors qu’elle filait à 9,2 mètres par seconde. C’est la vitesse d’un coyote!

Lors de la finale féminine du 100 mètres, la Néerlandaise Dafne Schippers est celle qui a réalisé les plus longues foulées durant la phase d’accélération, avec des enjambées de 2,3 mètres. Elle a remporté la médaille de bronze avec un chrono de 10 secondes et 96 centièmes.

Infographie Tom Walsh

L’étude de l’Université de Leeds ne s’est pas uniquement attardée aux coureurs ou sauteurs. Par exemple, on découvre que le Néo-Zélandais Tom Walsh projette le poids à une vitesse de 14,15 mètres par seconde. L’amusante image comparative publiée par l’IAAF sur les médias sociaux nous révèle que c’est la vitesse moyenne de course d’un léopard. Lors de ces Mondiaux, Walsh a gagné l’or grâce à un lancer de 22,03 mètres.

La compréhension de la biomécanique est un élément essentiel à maîtriser pour les athlètes et entraîneurs. Dans un sport comme l’athlétisme, où quelques millièmes de secondes ou d’infimes millimètres peuvent faire une différence entre une réussite et un échec, le rapport de l’Université Leeds servira d’outil de travail à plusieurs. Il aidera à mieux comprendre comment se comporte le corps humain lorsqu’il bouge et permettra probablement une diminution des blessures. Son analyse complète occupera les spécialistes de l’athlétisme pour plusieurs années.

Mais surtout, il offre une opportunité parfaite aux amateurs de découvrir les qualités athlétiques exceptionnelles des meilleurs athlètes au monde et d’apprécier les beautés de l’athlétisme.