Montréal – Premier grand rendez-vous de la saison de judo, le Grand Chelem de Paris débutera samedi, en France. C’est une équipe canadienne bien différente de celle présente aux Jeux de Londres qui foulera les tatamis. Une équipe en pleine transition qui a déjà les yeux tournés vers Rio de Janeiro où auront lieu les prochains Olympiques d’été, en 2016.

Des huit judokas présents à Londres l’été dernier, seuls Amy Cotton (78 kg), Antoine Valois-Fortier (81 kg) et Kelita Zupancic (70 kg) seront en action cette fin de semaine.

Le Grand Chelem de Paris sera donc l’occasion de découvrir de nouveaux visages au sein de l’équipe nationale. Des jeunes comme Catherine Beauchemin-Pinard (63 kg), Étienne Briand (73 kg), Patrick Gagné (66 kg), Ecaterina Guica (52 kg), Alexis Morin-Martel (73 kg) et Kyle Reyes (100 kg) sur qui Judo Canada pourrait bien choisir de miser pour les prochaines années. D’autres recrues se joindront au groupe plus tard en février pour disputer l’Open de Budapest en Hongrie, celui d’Oberwart en Autriche et le Grand Prix de Düsseldorf en Allemagne.

« C’est ce qui était anticipé. Qu’après Londres, il y aurait un changement de garde dans plusieurs catégories. On avait quand même un bon groupe d’athlètes qui en étaient à leur deuxième cycle olympique, ce qui est excessivement demandant. Ce sont des exceptions qui réussissent à poursuivre et à se maintenir pendant trois cycles, explique l’entraîneur de l’équipe nationale, Nicolas Gill. On a des jeunes qui s’en viennent et qui sont prêts à prendre la relève. Dans la plupart des catégories, ils seront deux ou trois à se bagarrer pour la place de leader. »

Parmi les habitués du circuit international, Marylise Lévesque (78 kg), Michal Popiel (66 kg) et Frazer Will (60 kg) ont pris leur retraite au cours des derniers mois. Nicholas Tritton (73 kg) a fait de même après avoir participé à ses deuxièmes Jeux, à Londres.

Certains vétérans qui ont aussi vécu l’expérience olympique sont restés au sein de l’équipe. C’est le cas d’Amy Cotton, de Joliane Melançon (57 kg) et de Catherine Roberge (78 kg). Victorieuse la semaine à l’Open d’Arlon en Belgique, cette dernière sera de la délégation canadienne à Paris. Du côté masculin, Sasha Mehmedovic (66 kg) a choisi de poursuivre sa carrière même s’il n’est plus breveté par la fédération canadienne. Quant à Alexandre Émond (90 kg), opéré à l’épaule droite à l’automne dernier, il devrait reprendre la compétition à temps pour défendre son titre de champion panaméricain à la fin avril.

« Dans leur cas, l’engagement est plus sur une base annuelle que pour un cycle olympique de quatre ans, précise Gill. Ils sont rendus à des âges où les années peuvent les rattraper rapidement et où les performances peuvent diminuer assez drastiquement. Ils doivent aussi penser à organiser leur vie. Il faudra voir comment vont les résultats et les décisions seront prises en conséquence. »
Vers les Jeux de Rio

Les Olympiens Sergio Pessoa (60 kg), Kelita Zupancic et Antoine Valois-Fortier sont maintenant les nouveaux piliers de l’équipe. Après avoir subi une opération au genou gauche, Pessoa pourrait effectuer un retour aux Championnats panaméricains, à San Jose au Costa Rica. Autour de ces trois judokas gravitent plusieurs jeunes qui tenteront de faire leurs marques dans les prochaines années.

« Pour les Jeux de Rio, il y une dizaine de jeunes de 19-20 ans qui vont tenter se qualifier. Pour eux, la priorité est de progresser pour atteindre un bon niveau au début du processus de qualification olympique, explique Gill. Présentement, il y en a qui sont en avance sur d’autres, mais ça risque de changer rapidement dans les deux prochaines années. »

« Antoine est un bel exemple, poursuit l’entraîneur. Il y a quatre ans, c’était un jeune que nous avions identifié. Nous pensions qu’il serait très bon rendu à Londres, mais ce n’était pas notre meilleur. Il a fait ses premiers Championnats du monde en 2011. Sa progression a été graduelle, un peu accélérée à un moment donné. Son cas représente bien comment les choses peuvent évoluer et débloquer rapidement quand on investit dans les athlètes qui sont plus jeunes et qui ont une marge de progression. »

La plupart des recrues de l’équipe participeront à leurs premiers Championnats du monde chez les seniors en août prochain, à Rio de Janeiro. « Ça leur permettra de découvrir l’ampleur de la tâche à accomplir. Évidemment, les attentes seront plus modestes à leur endroit », précise Gill.

S’adapter aux nouvelles règles

Cette saison, les judokas canadiens auront également comme défi de s’adapter aux nombreux changements de réglementation apportés par la Fédération internationale de judo au lendemain des Jeux de Londres. Outre les changements logistiques et structurels (concernant notamment la pesée et le système de repêchage de certains tournois), certaines techniques ne seront plus acceptées lors des combats.

« En gros, sur la prise du judogi, il y a des choses qui ne seront plus permises. Comme dans beaucoup de sports, les athlètes développent toutes sortes de méthodes et de stratégies pour contrer leurs adversaires et garder les combats serrés. L’objectif de cette nouvelle règle est de stimuler l’offensive. Aussi, les prises en ramassement de jambes, qui étaient déjà limitées, seront maintenant complètement bannies », indique Nicolas Gill.

« Les athlètes devront s’ajuster. Ceux qui ont une bonne base technique et qui ont une bonne capacité d’adaptation le feront plus facilement évidemment. Ce sont les athlètes un peu plus unidimensionnels qui seront sévèrement touchés par ces changements-là. »

L’importance des différentes compétitions a également été revue par la fédération internationale. Les Coupes du monde sont devenues des Opens continentaux et auront beaucoup moins de points à offrir aux judokas. « Les Grands Chelems et les Grands Prix seront beaucoup plus importants qu’auparavant. Le but de la fédération est de rassembler les meilleurs athlètes dans une série de tournois. De leur point de vue, c’est meilleur pour le spectacle », précise Gill.

Ce changement aura un impact direct sur le processus de qualification olympique. « Ça va accentuer l’écart entre les meilleurs et le groupe qui suit. Pour les dix premiers, la sélection devrait être relativement facile et pour les autres, encore plus difficile, explique l’entraîneur québécois. Pour une organisation comme Judo Canada, ça risque de compliquer la tâche par rapport au dernier cycle. Surtout si on garde la philosophie d’essayer de qualifier un bon groupe d’athlètes. Nous avons 18 mois pour analyser et réfléchir à tout ça avant le début du prochain processus de sélection. »