« Il n’y a pas grand-chose de plus à dire que ce qu’il y a déjà été dit, lance d’abord Alex Agostino lorsqu’on lui demande de commenter le scandale de tricherie associé aux Astros de Houston.

Le célèbre recruteur québécois au service des Phillies de Philadelphie s’ouvre un peu plus par la suite, mais on sent qu’il n’a pas perdu une minute de sommeil par sympathie pour les Astros.

« Disons que je n’échangerais pas ma place avec Rob Manfred - commissaire du baseball majeur -, parce que c’est tout un dossier. Son message envers les gérants et directeurs généraux est clair : c’est votre responsabilité. Vous ne pouvez pas dire que vous ne le saviez pas, c’est vous qui êtes responsables. Les joueurs eux, s’en sortent bien par contre. Ça devient très complexe de connaître le rôle qu’ont joué les joueurs. Par exemple, à quel point les lanceurs des Astros étaient au courant de la situation. »

NDLR : Carlos Beltran, joueur des Astros durant le scandale, a remis sa démission au poste de gérant des Mets de New York depuis l’entrevue.

Agostino dresse également un lien entre la situation et un changement de génération qui s’effectue à travers le baseball majeur.

« Il y a beaucoup de jeunes surdoués qui prennent place dans les bureaux du baseball majeur et on remarque parfois qu’ils ont un sentiment de supériorité envers ceux qui pratiquent le métier depuis 30 ans. Pour certains, ce n’était pas de la tricherie, c’est l’évolution de la technologie », déplore Agostino.

Sympathie pour certains, moins pour d’autres

Les échos qu’Agostino a reçus en discutant avec divers personnages de l’univers du baseball majeur sont assez clairs. Tout comme le Québécois, très peu sont emphatiques avec les Astros.

« Ils ont obtenu beaucoup de succès et ils ont développé d’excellents joueurs, c’est indéniable, mais c’est une équipe qui se croyait un peu au-dessus de la mêlée et qui fonctionnait avec ses propres règles, notamment dans ces relations avec les autres équipes du baseball majeur. »

Agostino constate d’ailleurs que personne ne semble pleurer sur le sort de Jeff Lunhow, directeur général déchu des Astros. Un personnage brillant, mais qui était loin de faire l’unanimité. 

« Je sens que c’est un peu différent pour A.J. Hinch et Alex Cora parce qu’ils étaient très appréciés dans le baseball majeur. Ils vont peut-être finir par se retrouver du boulot. Si on voit la face d’Alex Rodriguez à la télévision chaque semaine, je crois qu’on pourrait finir par pardonner à Cora et Hinch », analyse Agostino.

Comme on l’a rappelé à maintes reprises depuis l’éclatement du scandale, les équipes professionnelles ont toujours tenté de deviner les signaux des équipes adverses. Les plus observateurs tentaient de deviner les tendances de l’entraîneur au 3e but ou de déceler certaines manies d’un lanceur avant d’effectuer une balle rapide ou un changement de vitesse.

« Cet aspect fait partie du jeu et toutes les équipes le font d’une façon ou d’une autre. La différence, c’est que jamais une autre équipe ne l’a fait de façon aussi directe que les Astros. La technologie apporte beaucoup à notre sport. Ça permet de nous améliorer et de se perfectionner, mais est-ce qu’à partir de 19 h 05, on peut laisser la technologie de côté et laisser aux athlètes et à leur talent le soin de décider du sort du match », souhaite Agostino.

Le travail d’Agostino récompensé

Recruteur avec les Expos de Montréal et les Marlins de Miami plus tôt dans sa carrière, Alex Agostino est employé des Phillies depuis 2006. Il a reçu une promotion à la fin de l’automne qui changera passablement son mandat. Agostino est devenu ce qu’on appelle dans les cercles du baseball un « cross-checker », ce qu’on peut traduire par un superviseur. Notamment attitré à couvrir le territoire new-yorkais et d’autres territoires du Nord-Est des États-Unis, le Québécois se voit confier la garde de trois jeunes recruteurs. Il voit également son territoire s’accroître, allant jusqu’à la Caroline du Nord.

Il devra donc analyser la liste de ses trois protégés et se déplacera notamment pour épier les joueurs plus prometteurs répertoriés par ses recruteurs. Agostino passera donc moins de temps à épier la potentielle perle rare qui sera repêchée en 35e ronde.

« C’est certain que c’est plus stimulant, parce je vais passer plus de temps à regarder les joueurs qui ont le talent pour se faire repêcher à l’intérieur des dix premières rondes. J’aurai également un lien direct avec le recruteur en chef et une place au repêchage amateur du mois du juin. C’est flatteur parce que tu sens que tu as une voix plus importante », explique-t-il.

Agostino fait d’ailleurs partie des cinq superviseurs qui occupent le même titre que lui chez les Phillies.