Lorsqu’on aperçoit un surdoué exercer son sport de prédilection, ça ne sonne pas pareil. Ils ont une façon de faire différentes des autres joueurs. Un style et une technique qui attirent les regards comme un aimant.

Les recruteurs sont à l’avant-plan pour apprécier ces talents rares avant tous les autres. Jasmin Roy, recruteur québécois des Blue Jays de Toronto, a eu la chance d’assister de près au parcours de surdoués du baseball professionnel.

Roy n’était pas encore un membre des Blue Jays, lorsque Vladimir Guerrero fils a signé une entente professionnelle avec l’équipe à l’âge de 16 ans. On ne sera pas surpris d’apprendre que le nom de Guerrero revient souvent dans les conversations depuis ce temps.

« Dès l’âge de 16 ans, tu vois qu’il y a quelque chose d’exceptionnel avec un joueur comme Vladimir. Il y a des qualités athlétiques et un naturel au bâton qui te permettent déjà de savoir qu’il sera un frappeur du calibre des majeures. Tu ne sais pas comment le joueur va se développer physiquement, mais le talent naturel au bâton, ça ne se perd pas avec l’âge », explique le recruteur.

Dès le moment de la mise sous contrat, les Jays savaient qu’ils avaient mis la main sur un joueur exceptionnel. Il y avait une effervescence au sein de l’organisation lorsqu’on parlait de Vladimir. Cette effervescence est réapparue avec force l’an dernier, lorsque Guerrero fils a terrorisé les lanceurs du baseball affilié, avec une moyenne au bâton globale de ,381.

« Il n’y a qu’un seul meilleur espoir du baseball majeur, donc quand tu l’as au sein de ton équipe, c’est certain que c’est excitant. Toronto a décidé de procéder à une reconstruction et sacrifier des résultats immédiats. Lorsqu’un joueur connaît de tels succès dans le baseball mineur, tu te dis que tu ne fais pas ça pour rien et tu vois l’avenir avec espoir. Ça met un baume sur des moments plus difficiles dans les majeures. »

La formation torontoise a toujours vu le potentiel du joueur étoile avec Guerrero. Depuis ce temps, Vlad a répondu aux attentes et plus encore.

« Tu le regardes jouer et tu te dis qu’il peut devenir meilleur que son père, - membre du Temple de la renommée - ce n’est pas rien. Tu sais qu’il va jouer dans les majeures, après tu constates qu’il peut être un joueur d’impact. Ce n’est plus une question de savoir quand il fera ses débuts. À un certain point, tu réalises qu’il sera un 4e frappeur tout au long de sa carrière », prévoit Jasmin Roy.

Puisque rien n’est parfait, le seul doute qui subsiste chez Vlad se situe sur la balance. Disons qu’il est déjà acquis qu’il ne volera pas 30 buts chaque année. Roy assure toutefois que ce n’est pas une préoccupation chez ses employeurs.

« Il ne faut pas oublier que Vladimir mesure 6 pieds et 2 pouces. On savait déjà dès l’âge de 16 ans qu’il avait une bonne charpente. Les Jays s’assurent que le développement physique suit son cours et je ne sens pas qu’il est en retard à ce chapitre. »

Devenir un joueur complet

Si l’on se fie à ses performances au bâton, Vlad aurait certainement pu faire sa place dans les majeures dès la dernière saison. Un brin d’impatience commence à se faire sentir chez les partisans torontois, qui aimeraient avoir quelque chose à se mettre sous la dent. Jasmin Roy apporte un bémol : « Il ne faut pas penser que le baseball se limite à frapper la balle. L’an dernier, on voulait que Vladimir s’améliore en défense. Malgré tout son talent, Guerrero n’avait que 19 ans l’an dernier. Il y a une maturité qu’un joueur doit acquérir et c’est en disputant des matchs qu’il va le faire », nuance le recruteur des Jays.

Une banque d’espoirs garnie

Il n’y a pas que Vladimir dans le réseau des Jays. Le joueur d’arrêt-court Bo Bichette - le fils de Dante - serait l’espoir le plus prometteur dans la majorité des organisations du baseball majeur. Choix de 2e ronde en 2016, Bichette était aussi déjà voué à un bel avenir. Son potentiel s’est multiplié depuis qu’il a fait le saut chez les professionnels.

« Si c’était à refaire, je te garantis que Bichette serait un choix de première ronde, assure Roy. Je me souviens que mon collègue qui couvre le territoire de Bichette à l’école secondaire aimait vraiment ce joueur. Il souhaitait que les Jays le choisissent en première ronde. Il avait un talent certain, mais c’était un joueur d’arrêt-court et ce n’était pas le plus costaud. On ne savait pas s’il allait avoir la force nécessaire pour évoluer à l’arrêt-court dans le baseball majeur. »

Bichette a donc été sélectionné au 2e tour, ce qui demeure un geste de confiance de la part d’une organisation des majeures, puisqu’une équipe s’attend à ce qu’un choix de 2e ronde évolue dans le baseball majeur.

« Bichette a une grande confiance en ces moyens et les Jays ont reconnu ce trait de caractère. Il était sur une excellente séquence dans les semaines précédant son repêchage. C’est certain que ça a joué en sa faveur. »

Roy convient que Bichette dépasse les attentes placées à son endroit lors du repêchage.

« La vitesse de son élan est exceptionnelle. Il explose littéralement lorsqu’il s’élance. Je n’ai pas vu ça souvent. Après sa première saison au niveau A, tu constates que le joueur a pris un énorme pas dans la bonne direction. On ne croyait pas qu’il allait atteindre un tel niveau aussi rapidement. »

Rien n’assure que Bichette évoluera à l’arrêt-court tout au long de sa carrière dans les majeures. Il pourrait éventuellement faire la transition au deuxième but.

« L’entente que nous avons avec lui est qu’il évolue à l’arrêt-court aussi longtemps qu’il nous démontre qu’il peut occuper ce poste. C’est une denrée rare, parce que des joueurs d’arrêt-courts qui ont la capacité de frapper au-dessus de ,300 dans le baseball majeur, il n’y en a pas beaucoup », fait remarquer le recruteur des Jays.

Malheureusement, il faudra attendre un certain temps avant de voir Bichette à Toronto puisque ce dernier s’est fracturé la main gauche au niveau AAA lundi.