R.A. Dickey, le roi de la montagne
Baseball jeudi, 15 nov. 2012. 15:26 jeudi, 12 déc. 2024. 21:33
Par Stéphane Morneau - En remportant le Cy Young mercredi, R.A Dickey a ajouté plus qu'une belle plaque sur le manteau de son foyer.
À 38 ans, le lanceur des Mets a déjoué la logique médicale et, surtout, la vieille mentalité du baseball majeur qui démonise les athlètes inorthodoxes en les dissuadant rapidement de poursuivre une carrière professionnelle au moindre signe d'une anomalie physique ou psychologique.
Dickey, à force de courage et de travail acharné, a fait mentir la médecine, l'ordre établi et toute la logique qui entoure l'énigmatique présence du lanceur sur sa butte.
Avec un dossier de 20 victoires et 6 défaites en 2012, Dickey a récolté 27 des 32 votes de première place pour remporter confortablement la plus haute distinction qu'un lanceur peut recevoir annuellement. Autre petite parenthèse à cette saison incroyable, Dickey est le premier spécialiste de la balle papillon à se mériter un Cy Young, une autre boutade significative au métier de lanceur qui est sûrement le plus affecté par la «vieille école» du baseball.
Pourtant, personne ne prédisait autant de succès à Dickey. En 2010, les Mets offraient un contrat à Dickey pour ensuite le rétrograder dans la ligue AAA, chez les Bisons de Buffalo. Il ne s'agissait pas du premier passage de Dickey dans les mineures, sauf que des airs de dernière chance planaient dans l'air pour l'excentrique lanceur qui, depuis, est devenu l'as des Mets et l'inspiration de plusieurs hommes bien au-delà du losange.
Du rêve au cauchemar
Choix de première ronde des Rangers du Texas en 1996 (le 18e au total), Dickey laissait derrière lui un fructueux passage à l'Université du Tennessee et une spécialisation en littérature anglaise pour entreprendre une carrière prometteuse au sein d'une organisation qui lui offrait un beau vote de confiance, accompagné d'une prime à la signature de 850 000 dollars.
Sauf que le rêve de Dickey tourna vite au cauchemar quand une photo à la une d'un magasine mis la puce à l'oreille de Danny Wheat, l'un des physiologues des Rangers, qui suggéra à l'équipe d'effectuer des évaluations supplémentaires sur le bras droit de Dickey. Après une batterie de tests, ils ont découvert que le ligament collatéral ulnaire (ex-ligament latéral interne ou LLI) du coude droit de Dickey n'était pas présent. Il n'est pas déterminé s'il s'agit d'une malformation à la naissance ou d'une désintégration du tissu ligamentaire, mais l'anomalie refroidit les espoirs des Rangers qui retirent leur offre initiale, la réduisant à un contrat de 75 000 dollars. Pour vous mettre en contexte, il s'agit du ligament que l'on traite généralement lors de l'épineuse chirurgie de Tommy John qui hante la carrière de plusieurs lanceurs dans les majeurs. De l'avis des médecins, Dickey ne devait pas être en mesure de tourner une poignée de porte sans ressentir de douleurs, donc encore moins de pouvoir lancer une balle avec la vélocité nécessaire pour être efficace dans le baseball majeure.
Dickey, qui n'était pas au courant de sa condition médicale, se retrouve devant le dilemme de courir le risque d'obtenir une autre offre ailleurs ou d'accepter celle des Rangers, même réduite, qui lui permettrait de prouver sa valeur chez les pros. De 1996 à 2001, Dickey peaufina son arsenal dans les ligues mineures, présentant une variété de tirs sans éclat qui ne laissait pas présager une carrière spectaculaire dans les majeurs.
De la chenille au papillon
En 2001, Dickey se joint pour la première fois à l'alignement des Rangers avec une balle rapide très moyenne, une balle tombante sans artifice et une déformation de la balle fronde qu'il surnomme « la chose ». De 2001 à 2005, Dickey joue sur base régulière, mais ne récolte jamais un poste permanent au sein de la rotation partante. On parle ici d'un lanceur de relève avec des départs occasionnels et une moyenne de points mérités quand même élevée (plus de 5,00 à chaque saison). Dickey vivait la vie d'un lanceur anonyme sans savoir qu'il possédait le secret de son succès entre les doigts, littéralement.
En 2005, Dickey rencontre l'ancien artiste de la balle papillon à la retraite Charlie Hough qui remarque que la balle fronde de Dickey ressemble plus à son tir de prédilection qu'à la définition classique du lancer. Après quelques séances de tutorat, Hough corrige la prise de balle de Dickey et lui enseigne les rudiments de la balle papillon, semant ainsi la graine vers une récolte inattendue dans la vie du lanceur. Sauf que la transformation de la chenille en papillon ne se fait pas sans une longue et difficile période de gestation.
Dickey fit l'apprentissage de cette réalité à la dure le 6 avril 2006. Lors de son premier (et seul) départ de la saison avec les Rangers. Il accorda 6 circuits en moins de quatre manches ce jour-là, une première dans les majeurs depuis 1920. Cette difficile sortie signa le départ de Dickey vers les mineures et il s'agira aussi de son dernier match dans l'uniforme des Rangers, organisation avec laquelle il évolue depuis près de dix ans.
Armé de son nouveau tir, Dickey se mérite un contrat des ligues mineures avec les Brewers de Milwaukee, mais il n'évoluera jamais pour l'équipe. À la conclusion de sa saison transitoire en 2007, il se mérite le titre du lanceur par excellence de la Pacific Coast League, lui qui a compilé un dossier de 12-6 avec les Sounds de Nashville. Il redevient alors un joueur autonome des ligues mineures et reçoit une invitation au camp d'entraînement des Twins du Minnesota, avant de voir son nom réclamé lors du repêchage de règle 5 par les Mariners de Seattle.
Compilant un dossier de 5-8 en 32 matchs (dont 14 départs), le passage de Dickey avec les Mariners n'a pas fait tourner beaucoup de têtes. À la suite de son refus de retourner dans les mineures, Dickey redevient un agent libre à la fin de sa seule saison à Seattle. Les Twins lui offrent alors un contrat de ligues mineures, mais Dickey se taille une place au sein de l'équipe pour laquelle il effectuera 35 présences en 2009.
Entretemps, Dickey étudiait méticuleusement l'histoire de la balle papillon, son utilisation et particulièrement ses artisans. Il a même passé une journée avec le membre du Temple de la renommée Phil Niekro qui lui a enseigné quelques-uns de ses secrets par rapport à cette bête volatile qu'est la balle papillon. Dickey était bien au courant que Niekro avait remporté 121 matchs dans les majeures après avoir passé le cap des 40 ans, le temps ici n'était donc pas l'ennemi de Dickey. Ne lui restait qu'à développer les subtilités de l'imprévisible lancer.
Les débuts avec les Mets
C'est en 2010 que R.A Dickey reçoit une offre de contrat de la part des Mets de New York, qui l'assigneront rapidement à leur filiale AAA des Bisons de Buffalo. C'est là que Dickey peaufinera ses deux versions de la balle papillon, la rapide et la lente. Il connait beaucoup de succès avec les Bisons, retirant même 27 frappeurs d'affilée après avoir donné un coup sûr au premier frappeur de la rencontre le 29 avril. En mai, les Mets rappellent Dickey et il fera 27 apparitions pour l'équipe récolta sa meilleure moyenne en carrière (2,84) au terme de la saison. Sa balle papillon en deux déclinaisons est de plus en plus aiguisée et Dickey récoltera son premier contrat lucratif en 2011, cette fois sans avoir à passer par les mineures pour faire ses preuves.
C'est en 2011 que Dickey ouvre la saison dans la rotation des Mets, atteignant des sommets personnels au niveau des départs (32), des manches lancées (208 et deux tiers) et des retraits au bâton (134). Sa fiche de 8-13 à la fin de la saison n'était pas représentative de sa bonne moyenne de 2,84 et de ses solides prestations tout au long de la saison.
La saison morte qui changera sa vie
C'est à l'hiver 2012 que la vie de Dickey prendra un virage drastique qui propulsera le lanceur vers des sommets inespérés.
Il annonce aux Mets qu'il effectuera l'ascension du mont Kilimandjaro dans l'espoir d'amasser des fonds pour combattre le trafic humain qui sévit en Inde. De ce fait, Dickey risque son salaire de 4,25 millions qu'il doit recevoir en 2012 car il n'est pas garanti en cas de blessures subies lors de la saison morte. Hanté par la nouvelle Les Neiges du Kilimandjaro d'Ernest Hemingway, Dickey assume le risque de perdre son contrat et poursuit son projet d'ascension qui s'avéra être un succès incontestable, tant au niveau de l'accomplissement personnel que de la bonne presse que génère le courage du lanceur.
Ce courage retournera d'ailleurs sous les projecteurs quand Dickey annonce la publication d'un mémoire sur sa vie : Wherever I Wind Up : My Quest for Truth, Authenticity and the Perfect Knucklelball. L'autobiographie, résultat de longs entretiens avec le journaliste Wayne Coffey, lève le voile sur les abus sexuels dont a été victime Dickey durant sa jeunesse, des idées suicidaires qui ont hanté sa vie adulte et du spectre des stéroïdes qui planaient des les vestiaires des Rangers du Texas. Dickey avoue avoir jonglé avec l'idée d'une autobiographie depuis plus de sept ans avant de finalement trouver le courage d'assumer son passé. En publiant son histoire, qu'il n'avait pas avouée à personne avant ses 31 ans, Dickey espérait briser la honte qui est trop souvent associée avec ce genre d'abus, tout en s'ouvrant au maximum pour s'épanouir en tant qu'athlète, mari et père de famille.
Cet hiver chargé de Dickey mit la table pour la saison 2012 avec la conclusion que l'on connait. D'anomalie médicale à monarque du monticule, la carrière de R.A Dickey n'a rien d'ordinaire, même si avant hier son nom ne résonnait pas énormément dans l'imaginaire collectif.
Qui plus est, l'anomalie médicale qui devait le tenir à l'écart du baseball complètement avant même d'avoir foulé la butte pour la première pourrait bien être le secret de sa longévité et de ses performances qui terrorisent aujourd'hui les frappeurs adverses. En raison de l'absence de ligament, Dickey ressent moins la fatigue dans son bras droit et son temps de récupération entre ses départs est considérablement réduit, lui qui n'affiche pas de signe de fatigue à la fin de ses sorties.
Il ne faudrait donc pas se surprendre de voir Dickey poursuivre sur sa bonne séquence, lui qui à 38 ans effleure seulement le début d'une fructueuse carrière, même s'il roule sa bosse depuis plus de 15 ans déjà. Comme quoi les deuxièmes vies majestueuses ne sont pas exclusivement réservées aux chenilles - les hommes de courage comme R.A Dickey peuvent eux aussi se réinventer et atteindre de nouveaux cieux sous la forme de majestueux papillons.
À 38 ans, le lanceur des Mets a déjoué la logique médicale et, surtout, la vieille mentalité du baseball majeur qui démonise les athlètes inorthodoxes en les dissuadant rapidement de poursuivre une carrière professionnelle au moindre signe d'une anomalie physique ou psychologique.
Dickey, à force de courage et de travail acharné, a fait mentir la médecine, l'ordre établi et toute la logique qui entoure l'énigmatique présence du lanceur sur sa butte.
Avec un dossier de 20 victoires et 6 défaites en 2012, Dickey a récolté 27 des 32 votes de première place pour remporter confortablement la plus haute distinction qu'un lanceur peut recevoir annuellement. Autre petite parenthèse à cette saison incroyable, Dickey est le premier spécialiste de la balle papillon à se mériter un Cy Young, une autre boutade significative au métier de lanceur qui est sûrement le plus affecté par la «vieille école» du baseball.
Pourtant, personne ne prédisait autant de succès à Dickey. En 2010, les Mets offraient un contrat à Dickey pour ensuite le rétrograder dans la ligue AAA, chez les Bisons de Buffalo. Il ne s'agissait pas du premier passage de Dickey dans les mineures, sauf que des airs de dernière chance planaient dans l'air pour l'excentrique lanceur qui, depuis, est devenu l'as des Mets et l'inspiration de plusieurs hommes bien au-delà du losange.
Du rêve au cauchemar
Choix de première ronde des Rangers du Texas en 1996 (le 18e au total), Dickey laissait derrière lui un fructueux passage à l'Université du Tennessee et une spécialisation en littérature anglaise pour entreprendre une carrière prometteuse au sein d'une organisation qui lui offrait un beau vote de confiance, accompagné d'une prime à la signature de 850 000 dollars.
Sauf que le rêve de Dickey tourna vite au cauchemar quand une photo à la une d'un magasine mis la puce à l'oreille de Danny Wheat, l'un des physiologues des Rangers, qui suggéra à l'équipe d'effectuer des évaluations supplémentaires sur le bras droit de Dickey. Après une batterie de tests, ils ont découvert que le ligament collatéral ulnaire (ex-ligament latéral interne ou LLI) du coude droit de Dickey n'était pas présent. Il n'est pas déterminé s'il s'agit d'une malformation à la naissance ou d'une désintégration du tissu ligamentaire, mais l'anomalie refroidit les espoirs des Rangers qui retirent leur offre initiale, la réduisant à un contrat de 75 000 dollars. Pour vous mettre en contexte, il s'agit du ligament que l'on traite généralement lors de l'épineuse chirurgie de Tommy John qui hante la carrière de plusieurs lanceurs dans les majeurs. De l'avis des médecins, Dickey ne devait pas être en mesure de tourner une poignée de porte sans ressentir de douleurs, donc encore moins de pouvoir lancer une balle avec la vélocité nécessaire pour être efficace dans le baseball majeure.
Dickey, qui n'était pas au courant de sa condition médicale, se retrouve devant le dilemme de courir le risque d'obtenir une autre offre ailleurs ou d'accepter celle des Rangers, même réduite, qui lui permettrait de prouver sa valeur chez les pros. De 1996 à 2001, Dickey peaufina son arsenal dans les ligues mineures, présentant une variété de tirs sans éclat qui ne laissait pas présager une carrière spectaculaire dans les majeurs.
De la chenille au papillon
En 2001, Dickey se joint pour la première fois à l'alignement des Rangers avec une balle rapide très moyenne, une balle tombante sans artifice et une déformation de la balle fronde qu'il surnomme « la chose ». De 2001 à 2005, Dickey joue sur base régulière, mais ne récolte jamais un poste permanent au sein de la rotation partante. On parle ici d'un lanceur de relève avec des départs occasionnels et une moyenne de points mérités quand même élevée (plus de 5,00 à chaque saison). Dickey vivait la vie d'un lanceur anonyme sans savoir qu'il possédait le secret de son succès entre les doigts, littéralement.
En 2005, Dickey rencontre l'ancien artiste de la balle papillon à la retraite Charlie Hough qui remarque que la balle fronde de Dickey ressemble plus à son tir de prédilection qu'à la définition classique du lancer. Après quelques séances de tutorat, Hough corrige la prise de balle de Dickey et lui enseigne les rudiments de la balle papillon, semant ainsi la graine vers une récolte inattendue dans la vie du lanceur. Sauf que la transformation de la chenille en papillon ne se fait pas sans une longue et difficile période de gestation.
Dickey fit l'apprentissage de cette réalité à la dure le 6 avril 2006. Lors de son premier (et seul) départ de la saison avec les Rangers. Il accorda 6 circuits en moins de quatre manches ce jour-là, une première dans les majeurs depuis 1920. Cette difficile sortie signa le départ de Dickey vers les mineures et il s'agira aussi de son dernier match dans l'uniforme des Rangers, organisation avec laquelle il évolue depuis près de dix ans.
Armé de son nouveau tir, Dickey se mérite un contrat des ligues mineures avec les Brewers de Milwaukee, mais il n'évoluera jamais pour l'équipe. À la conclusion de sa saison transitoire en 2007, il se mérite le titre du lanceur par excellence de la Pacific Coast League, lui qui a compilé un dossier de 12-6 avec les Sounds de Nashville. Il redevient alors un joueur autonome des ligues mineures et reçoit une invitation au camp d'entraînement des Twins du Minnesota, avant de voir son nom réclamé lors du repêchage de règle 5 par les Mariners de Seattle.
Compilant un dossier de 5-8 en 32 matchs (dont 14 départs), le passage de Dickey avec les Mariners n'a pas fait tourner beaucoup de têtes. À la suite de son refus de retourner dans les mineures, Dickey redevient un agent libre à la fin de sa seule saison à Seattle. Les Twins lui offrent alors un contrat de ligues mineures, mais Dickey se taille une place au sein de l'équipe pour laquelle il effectuera 35 présences en 2009.
Entretemps, Dickey étudiait méticuleusement l'histoire de la balle papillon, son utilisation et particulièrement ses artisans. Il a même passé une journée avec le membre du Temple de la renommée Phil Niekro qui lui a enseigné quelques-uns de ses secrets par rapport à cette bête volatile qu'est la balle papillon. Dickey était bien au courant que Niekro avait remporté 121 matchs dans les majeures après avoir passé le cap des 40 ans, le temps ici n'était donc pas l'ennemi de Dickey. Ne lui restait qu'à développer les subtilités de l'imprévisible lancer.
Les débuts avec les Mets
C'est en 2010 que R.A Dickey reçoit une offre de contrat de la part des Mets de New York, qui l'assigneront rapidement à leur filiale AAA des Bisons de Buffalo. C'est là que Dickey peaufinera ses deux versions de la balle papillon, la rapide et la lente. Il connait beaucoup de succès avec les Bisons, retirant même 27 frappeurs d'affilée après avoir donné un coup sûr au premier frappeur de la rencontre le 29 avril. En mai, les Mets rappellent Dickey et il fera 27 apparitions pour l'équipe récolta sa meilleure moyenne en carrière (2,84) au terme de la saison. Sa balle papillon en deux déclinaisons est de plus en plus aiguisée et Dickey récoltera son premier contrat lucratif en 2011, cette fois sans avoir à passer par les mineures pour faire ses preuves.
C'est en 2011 que Dickey ouvre la saison dans la rotation des Mets, atteignant des sommets personnels au niveau des départs (32), des manches lancées (208 et deux tiers) et des retraits au bâton (134). Sa fiche de 8-13 à la fin de la saison n'était pas représentative de sa bonne moyenne de 2,84 et de ses solides prestations tout au long de la saison.
La saison morte qui changera sa vie
C'est à l'hiver 2012 que la vie de Dickey prendra un virage drastique qui propulsera le lanceur vers des sommets inespérés.
Il annonce aux Mets qu'il effectuera l'ascension du mont Kilimandjaro dans l'espoir d'amasser des fonds pour combattre le trafic humain qui sévit en Inde. De ce fait, Dickey risque son salaire de 4,25 millions qu'il doit recevoir en 2012 car il n'est pas garanti en cas de blessures subies lors de la saison morte. Hanté par la nouvelle Les Neiges du Kilimandjaro d'Ernest Hemingway, Dickey assume le risque de perdre son contrat et poursuit son projet d'ascension qui s'avéra être un succès incontestable, tant au niveau de l'accomplissement personnel que de la bonne presse que génère le courage du lanceur.
Ce courage retournera d'ailleurs sous les projecteurs quand Dickey annonce la publication d'un mémoire sur sa vie : Wherever I Wind Up : My Quest for Truth, Authenticity and the Perfect Knucklelball. L'autobiographie, résultat de longs entretiens avec le journaliste Wayne Coffey, lève le voile sur les abus sexuels dont a été victime Dickey durant sa jeunesse, des idées suicidaires qui ont hanté sa vie adulte et du spectre des stéroïdes qui planaient des les vestiaires des Rangers du Texas. Dickey avoue avoir jonglé avec l'idée d'une autobiographie depuis plus de sept ans avant de finalement trouver le courage d'assumer son passé. En publiant son histoire, qu'il n'avait pas avouée à personne avant ses 31 ans, Dickey espérait briser la honte qui est trop souvent associée avec ce genre d'abus, tout en s'ouvrant au maximum pour s'épanouir en tant qu'athlète, mari et père de famille.
Cet hiver chargé de Dickey mit la table pour la saison 2012 avec la conclusion que l'on connait. D'anomalie médicale à monarque du monticule, la carrière de R.A Dickey n'a rien d'ordinaire, même si avant hier son nom ne résonnait pas énormément dans l'imaginaire collectif.
Qui plus est, l'anomalie médicale qui devait le tenir à l'écart du baseball complètement avant même d'avoir foulé la butte pour la première pourrait bien être le secret de sa longévité et de ses performances qui terrorisent aujourd'hui les frappeurs adverses. En raison de l'absence de ligament, Dickey ressent moins la fatigue dans son bras droit et son temps de récupération entre ses départs est considérablement réduit, lui qui n'affiche pas de signe de fatigue à la fin de ses sorties.
Il ne faudrait donc pas se surprendre de voir Dickey poursuivre sur sa bonne séquence, lui qui à 38 ans effleure seulement le début d'une fructueuse carrière, même s'il roule sa bosse depuis plus de 15 ans déjà. Comme quoi les deuxièmes vies majestueuses ne sont pas exclusivement réservées aux chenilles - les hommes de courage comme R.A Dickey peuvent eux aussi se réinventer et atteindre de nouveaux cieux sous la forme de majestueux papillons.