J’ai suivi d’un œil attentif les deux matchs qui ont eu lieu au Stade olympique et sincèrement, toute cette effervescence m’a fait quelque chose.

Le fait de revoir du baseball majeur à Montréal a ravivé en moi un paquet de souvenirs, bons et moins bons. J’ai eu un pincement au cœur en voyant des images de ce Stade mal-aimé rempli comme dans les bonnes années des Expos. En apprenant que près de 100 000 spectateurs avaient franchi les tourniquets à l’occasion de simples matchs préparatoires, je me suis dit qu’il était possible de rêver à nouveau. De croire à l’avenir du baseball majeur à Montréal.

Ce qui s’est produit dans la métropole en fin de semaine dernière est hautement significatif à mes yeux et je considère que les dirigeants du baseball majeur devront prendre des notes; il est difficile de passer sous silence un tel exploit.

Toutefois, Montréal devra, sans l’ombre d’un doute, se doter d’un nouveau stade au centre-ville pour espérer un jour revoir la MLB à temps plein. Les gens d’affaires aiment l’idée de quitter le boulot et aller relaxer au baseball par une belle soirée d’été. Le PNC Park de Pittsburgh représente en ce sens un bel exemple de success story. Le stade, situé à distance à pied du centre-ville donne un électrochoc à l’économie de la ville lors des jours de matchs : les restaurants, les pubs et les boutiques sont bondés de monde lorsque les Pirates évoluent à domicile. Les touristes sont également au rendez-vous pour passer du bon temps. C’est bien connu, les amateurs de baseball à travers le monde aiment voyager pour assister à une série de trois rencontres et je ne vois pas pourquoi ils ne pourraient pas en faire de même dans cette belle ville qu'est Montréal. Certes, Montréal doit s’inspirer de ce qui se fait ailleurs.

Russell Martin

Comme vous le savez peut-être, j’ai d’abord été sélectionné par l’organisation des Expos, en 35e ronde du repêchage de 2000. Sans cette équipe qui a marqué ma jeunesse et qui a fait partie intégrante de ma vie, je ne pense pas que j’aurais orienté ma carrière vers le baseball. J’aurais définitivement fait autre chose. Qui sait? Je serais peut-être un joueur d’énergie, un vrai grinder au sein d’une équipe de hockey de la Ligue nationale.

Mais j’aimais ce sport qu’est le baseball. J’aimais toutes ses subtilités.

Je n’avais que 11 ans lors de l’été 1994. Néanmoins, je me rappelle que les joueurs composant la formation des Expos étaient tous des étoiles à leur apogée. Rien de moins. Malheureusement, cette équipe d’élite n’a pu atteindre sa destinée. Tout s’est écroulé à la suite de la grève. J’étais trop jeune à l’époque pour comprendre réellement ce qui se produisait, mais aujourd’hui j’estime qu’il y aurait sûrement encore du baseball à Montréal si les Expos de 1994 avaient pu poursuivre sur leur lancée et tout rafler sur leur passage.

Tout au long de ma carrière, j’ai été choyé : j’ai endossé l’uniforme d’illustres organisations et j’ai eu l’opportunité de participer à plusieurs occasions aux séries d’après-saison. Mais il me manque toujours un petit quelque chose – outre un titre de la Série mondiale – pour être totalement comblé : un match à Montréal devant ma famille et mes amis.

Dans mes rêves les plus fous, je me dis que je pourrais mettre un terme à ma carrière dans l’uniforme de la nouvelle concession de Montréal. Ça serait génial, mais disons que les astres devront être alignés pour qu’une telle situation survienne. À plus court terme, j’aimerais faire partie d’un match au Stade olympique comme ceux du week-end dernier. Pour un gars de Montréal qui a toujours rêvé de revêtir les couleurs des Expos, ça serait assurément une expérience des plus émouvantes.

Au sommet de ma forme

Le camp s’est déroulé rondement pour moi, mais je dois avouer que j’avais hâte que la vraie saison commence. J’ai compilé des chiffres raisonnables au bâton, mais c’est derrière le marbre que j’ai gagné en confiance.

Mon jeu défensif a toujours fait ma fierté, mais cette saison, je compte bien être encore plus redoutable. Je ne me suis jamais senti aussi confortable, autant mentalement que physiquement. Grâce à une technique utilisée dans le monde du sport nommée M-A-T (Muscle-Activation-Therapy), je suis parvenu en quelque sorte à réactiver les muscles de ma hanche droite, la même qui était passée sous le bistouri à la fin de la saison 2010. Je constate aujourd’hui à quel point cette hanche était faible et que cette vieille blessure m’empêchait d’être aussi explosif que je le désirais.

J’ai vraiment travaillé fort sur mes faiblesses durant les dernières semaines de sorte que ma puissance, mon endurance, ma mobilité et ma flexibilité sont à leur meilleur.

Sur le plan collectif, il y a beaucoup de positif à retirer du mois de mars dans la Ligue des Pamplemousses. La chimie du groupe démontre que les Pirates seront à nouveau compétitifs en 2014. Nous exigeons le meilleur effort de tous et chacun, et tous les joueurs poussent dans le même sens. L’importance du concept d’équipe. L’unique objectif sera de remporter le plus de matchs possible et je crois que nous possédons l’équipe pour améliorer notre fiche de 94 victoires, 68 défaites. Notre personnel de lanceurs est solide et déterminé à gagner coûte que coûte.

De plus, nous comptons sur un noyau plus que solide. Âgé de 25 ans seulement, Starling Marte est en voie de la future grande vedette des Pirates. Athlète naturel, il n’est pas loin de ce qu’on appelle un 5 tool-player dans le monde du baseball. En plus de savoir tout faire sur un terrain de balle, Marte s’avère un excellent joueur d’équipe. Il y a quelques jours à peine, il a signé une prolongation de contrat de 31 millions de dollars qui le gardera à Pittsburgh pour les six prochaines saisons. Les hauts dirigeants cherchaient sans doute à passer le message que les Pirates veulent non seulement gagner dans le présent, mais aussi pour plusieurs années à venir. C’est du moins ce que j’ai perçu par ce geste.

De mon côté, mon contrat vient à échéance à la fin de la saison. Pour le moment, il n’y a pas eu de pourparlers, mais je conviens que l’équipe a ses priorités. Lorsque les discussions porteront sur mon cas, mon agent et moi-même écouterons avec beaucoup d’attention.

Fini les collisions au marbre

Nate Schierholtz et Russell MartinCette saison, vous ne verrez pas de collisions au marbre puisqu’il y existe un nouveau règlement voulant qu’un coureur cherche à éviter tout contact avec le receveur. La MLB cherchait à tout prix à réduire le nombre de commotions cérébrales et de blessures et j’estime qu’elle s’y prend de la bonne façon.

Bien que logique, cette règle me déçoit à quelques égards puisque dans mon esprit de receveur, les contacts au marbre ont toujours fait partie du jeu.

On m’a rentré dedans à quelques occasions, autant dans les mineures que dans les majeures, mais en aucun temps j’ai été blessé sérieusement. Il existe une variété de techniques pour bloquer le marbre et je me suis toujours fait un devoir de bien absorber le coup. Sans cette facette franchement spectaculaire, ce sont les amateurs qui perdent au change en bout de ligne.

La sécurité à la plaque était une priorité pour les dirigeants et c’est à nous les joueurs de nous adapter. Le baseball est un sport où il faut constamment s’ajuster. Ce sera le cas pour moi cette saison. Je devrai apprendre à me positionner différemment lorsque je recevrai des relais au marbre. Et comme coureur, je devrai changer mon approche, car on m’a toujours enseigné de ne jamais plonger au marbre. Dorénavant, je penserai à glisser, car je n’aurai pas à me préoccuper d’un receveur bloquant le marbre.

Faire parler de moi à New York

Bien malgré moi, j’ai défrayé les manchettes dans les journaux de New York alors que j’ai prononcé les termes « expensive mistake », pour interpréter le contrat de 85 millions attribué au receveur Brian McCann par les Yankees.

Avec le recul, je concède que ce geste fut très maladroit de ma part. Cependant, j’estime que le titre ne rendait pas tout à fait justice à l’article dans son intégralité.

Tout ce que j’ai voulu faire valoir, c’est que les Yankees n’ont pas voulu m’offrir de contrat, car à leurs yeux, je coûtais trop cher. Pourtant, ils auraient pu me garder à un bien moindre coût que McCann. C’est tout.

Pour le reste, je ne veux pas me préoccuper du passé. À New York, j’ai vécu deux saisons extraordinaires et je n’ai que des remerciements à faire à cette organisation, mais je suis un Pirate maintenant et c’est tout ce qui compte maintenant. Quant à Brian McCann, je n’ai que de l’estime pour lui. Il représente une acquisition formidable pour les Yankees qui avaient bien besoin de solidifier le poste de receveur. McCann remplira le rôle avec brio, j’en suis convaincu. C’est un bon gars, je le respecte et je lui souhaite tout le succès au monde avec les Yankees.

Propos recueillis par Nicolas Dupont