MONTCLAIR, New Jersey (AP) - Ce n'est pas encore fini pour Yogi Berra. Un des piliers de la dynastie des Yankees de New York dans les années 1950 et celui qui a inventé des tas de mots d'esprit très particuliers, on lui a demandé récemment ce qu'il pensait des octogénaires quand il était un jeune homme.

"Je ne sais pas, a dit le receveur qui est au Temple de la Renommée. Il n'y en avait pas beaucoup de vivants dans le temps."

Jeudi, Yogi, une des figures légendaires les mieux aimées du monde du sport aura 80 ans.

Berra a l'intention de passer la journée avec son épouse Carmen, ses enfants et ses 10 petits-enfants. Il recevra un coup de téléphone de son ami d'enfance Joe Garagiola, le receveur qui est devenu commentateur et qui est lui aussi au Temple de la Renommée. Il a toujours dit que Yogi n'a jamais manqué de l'appeler le jour de son anniversaire en février.

"Il me téléphonera et laissera un message sur ma boîte vocale. Il me chantera Happy Birthday to You et il me dit que c'est lui qui chante, comme si je pouvais le confondre avec Pavarotti ou Bocelli."

Un des grands receveurs de l'histoire du baseball, Berra était derrière le marbre quand Don Larsen a lancé son match parfait en Série mondiale en 1956. Il était là aussi quand Allie Reynolds a réalisé ses deux matchs sans point ni coup sûr.

En 17 saisons de carrière, Berra a participé 14 fois à la Série mondiale, aidant les Yankees à gagner 10 fois. Il a conservé une moyenne en carrière de .258 avec 358 circuits, 2150 coups sûrs et 1430 points produits. En Série mondiale, il a claqué 12 circuits et a participé à 75 matchs en séries, un record.

Berra, choisi 15 fois au sein de l'équipe des étoiles, a été intronisé au Panthéon en 1972 et il est toujours une source d'inspiration pour les joueurs de la présente édition des Yankees.

"C'est toujours très plaisant de voir Yogi dans les parages, a dit Derek Jeter. J'ai appris une chose de Yogi et c'est de s'assurer d'avoir du plaisir tout le temps. C'est la clé. C'est la chose la plus importante."

Lawrence Peter Berra, né le 12 mai 1925, a hérité de son surnom quand il était tout jeune joueur. Un de ses coéquipiers l'a vu assis par terre, les jambes croisées et il croyait qu'il ressemblait à un personnage d'un film indien.

Berra et Garagiola ont grandi ensemble sur la rue Elizabeth du quartier Hill de Saint Louis, un quartier d'ouvriers composé en grande partie de familles italo-américaines.

Le terrain de baseball était un ancien dépotoir et c'est une vieille carcasse de voiture qui servait d'abri aux joueurs. On y jouait au baseball de l'aube jusqu'à la tombée du jour.

"Quand j'étais tout petit, je me disais qu'il n'y avait pas un autre endroit où je pouvais aller travailler pendant trois heures et faire autant d'argent, a dit Berra. Pour moi, ça vaut beaucoup mieux que le travail. En fait, ce n'était pas du travail. Je m'amusais."

Berra s'est joint à la marine américaine pendant la deuxième guerre mondiale et il était du débarquement en Normandie au Jour J. Il a quitté les forces armées en 1946 pour se joindre aux Bears de Newark, filiale des Yankees. Il a été appelé à jouer dans le Bronx le 22 septembre et a claqué un circuit à son tout premier match.

Son sens de l'humour en a vite fait un des favoris auprès de ses coéquipiers Mickey Mantle et Whitey Ford. Ce dernier se souvient encore d'un match contre les White Sox de Chicago.

Ford a donné un double et un simple à la suite d'un amorti, puis a atteint un frappeur et a ensuite vu Ted Kluszewski claquer un coup en flèche sur la clôture de droite.

"Je n'avais effectué que quatre tirs et c'était déjà 3-0 pour les White Sox, raconte Ford. Casey Stengel sort de l'abri et se dirige vers le monticule. Il se retourne vers Yogi et lui demande si j'ai de l'étoffe. Je me demande bien comment je pourrais le savoir, a rétorqué Yogi. Je n'ai pas encore capté un seul de ses satanés tirs.

"Personne n'a jamais rien dit de mal de Yogi. Tout le monde l'aime, a dit Ford. DiMaggio et Mantle ont peut-être été des joueurs adulés, de grandes vedettes, mais tous savaient qu'il fallait absolument avoir Yogi au sein de l'équipe."

Malgré une grande carrière de baseball, Berra restera connu pour ses "Yogiisme", ces petites phrases que lui seul pouvait inventer. Par exemple : "Là, il fait tard très tôt", a-t-il déjà dit au sujet des ombres au champ extérieur. Quand on lui a demandé d'expliquer qu'il n'allait plus à un restaurant pourtant bien réputé. "Personne ne va plus là, il y a trop de monde," avait-il riposté.

On lui avait déjà demandé l'heure et il avait répondu : "Vous voulez dire maintenant ?" Et on ne peut jamais oublier son fameux : "Ce n'est pas fini tant que c'est pas fini."

"Il dit des choses et les gens rient et c'est quelque chose de très utile, a dit le gérant Joe Torre. Ça n'arrête jamais."

Berra a dirigé les Yankees en 1964 et les Mets de 1972 à 1975. Il est revenu avec les Yankees en 1984. Et même s'il avait obtenu l'assurance de George Steinbrenner qu'il aurait toute la saison pour améliorer l'équipe en 1985, il a pourtant été congédié après seulement 16 matchs. Berra a alors juré qu'il ne remettrait plus les pieds au stade des Yankees avant que Steinbrenner ne s'excuse. Il a tenu parole pendant 14 ans.

En 1999, Steinbrenner a rencontré Yogi et s'est excusé personnellement.

"Je veux que tu reviennes, a dit Steinbrenner, qui s'était présenté à la course au rendez-vous.

"Tu es en retard," avait sèchement répondu Yogi.

Steinbrenner avait alors dit que Berra était une perle.

"Il y a peu de gens comme Yogi dans ce monde, a dit Steinbrenner. Il est un homme de famille et il fait partie de notre famille. Bonne fête Yogi."

Berra n'a pas pensé beaucoup au chiffre de 80. Mais il a un plan pour l'an prochain.

"Je commence le compte à rebours, a-t-il dit. L'an prochain, j'aurai 79."