Plusieurs amateurs de baseball se souviennent des Expos de Montréal comme d'une organisation sans moyens financiers qui jouait devant des gradins vides dans un stade sans saveur surnommé le « Big O ».

Steve Rogers, lui, préfère se souvenir des bons moments, lorsque la ville la plus européenne du continent s'était éprise du passe-temps favori des Américains.

« C'était une très grande ville de baseball, a déclaré Rogers, vendredi, lors d'une entrevue téléphonique, et un différent type de ville de baseball. »

Montréal n'a plus d'équipe des ligues majeures depuis que les Expos ont quitté le Québec au terme de la saison 2004, déménageant à Washington pour devenir les Nationals.

La ville francophone tente de regagner une équipe, et l'intérêt semble être au rendez-vous. Les deux matchs préparatoires entre les Blue Jays de Toronto et les Reds de Cincinnati ont attiré plus de 96 000 personnes au Stade olympique au début du mois d'avril. Le maire de la ville, Denis Coderre, a rencontré le commissaire de la MLB Rob Manfred à New York, jeudi, pour lui demander de présenter des matchs de saison régulière à Montréal dès la saison prochaine. Selon Coderre, six ou sept équipes sont intéressées à disputer une série dans l'ancien domicile des Expos.

Rogers, qui a passé les 13 ans de sa carrière avec les Expos, était un partant vedette durant les années de gloire de la concession, au tournant des années 80. Il a lui aussi assisté aux matchs préparatoires du mois d'avril, ce qui lui a donné un véritable aperçu de l'histoire d'amour qui se poursuit entre les Montréalais et le baseball, malgré la manière dont tout s'est terminé il y a 11 ans.

« J'étais triste d'assister à la disparition de la concession, a révélé Rogers. Le baseball a prospéré là-bas pendant quatre, cinq, six ans de suite. C'était très plaisant. »

En fait, les Expos ont été un succès dès le tout premier lancer en 1969, même s'ils ont passé les huit premières saisons de leur histoire dans un stade temporaire qui ne conviendrait même pas aux normes d'un stade des ligues mineures aujourd'hui : le Parc Jarry et ses 28 000 sièges.

Au temps où un million de spectateurs était considéré comme un signe d'un solide bassin de partisans, les Expos ont atteint ce plateau au cours de leurs six premières saisons dans la Ligue nationale, et ce, même s'ils n'ont pas connu une seule saison gagnante.

Au moment où les foules ont commencé à diminuer, les Expos ont déménagé au Stade olympique en 1977, après les Jeux olympiques d'été. Il s'agissait d'un grand pas en avant, mais qui était loin d'être idéal. Le stade n'était pas très populaire auprès des Montréalais notamment en raison de sa position géographique, étant situé à une dizaine de kilomètres du centre-ville.

Malgré ses défauts, le stade procurait un avantage certain aux Expos.

« Ça allait bien là-bas, a dit Rogers. L'acoustique était et est toujours horrible. On ne peut rien entendre à moins d'être assis droit devant un haut-parleur. Le bruit résonne partout dans le stade, mais quand la foule se mettait de la partie, le bruit en faisait un endroit très spécial où jouer. »

Des joueurs comme Rogers, Gary Carter, Andre Dawson, Tim Raines et Larry Parrish ont ensuite attiré plus de deux millions de partisans à quatre reprises en 1979 et 1983. Mais ça n'a pas duré.

On connaît la suite : des propriétaires qui n'avaient plus d'intérêts à investir dans la concession, la saison annulée de 1994 et la tentative ratée de bâtir un stade à ciel ouvert au centre-ville. Le baseball majeur a ensuite pris le contrôle de la concession et a déménagé quelques matchs locaux à Puerto Rico avant de mettre un terme à l'aventure en 2004.

La venue d'une équipe à Montréal ne se fera pas du jour au lendemain. La mise sur pied d'un groupe de propriétaires crédible est la priorité. La construction d'un nouveau stade vient après, même si le Stade olympique pourrait servir de domicile temporaire. Un toit rétractable serait idéal, mais cela impliquerait des investissements majeurs du gouvernement provincial - une position pour le moins impopulaire en des temps de restrictions budgétaires.

Le moment serait cependant idéal puisque l'organisation des Rays de Tampa Bay en arrache. Les partisans ne sont pas au rendez-vous malgré des apparitions répétées en séries de fin de saison, et la ville ne démontre aucun intérêt à participer à la construction d'un nouveau stade qui remplacerait l'hideux Tropicana Field.