Tigers : patience, risque et chance
Baseball vendredi, 20 oct. 2006. 21:10 samedi, 14 déc. 2024. 04:32
La saison 2003 des Tigers de Detroit a été comme une longue mauvaise journée au bureau qui a duré 162 matchs.
Mike Maroth était devenu le premier lanceur des ligues majeures à perdre 20 matchs depuis Brian Kingman. Brandon Inge avait maintenu une moyenne au bâton de ,203 et une moyenne de présence sur les buts de ,265. Bobby Higginson avait produit un point pour chaque tranche de 227 884$ de son salaire.
Trois ans plus tard, l'amour et les applaudissements qui fusaient des gradins du Comerica Park après l'élimination des Yankees et des A's témoignent de la renaissance du baseball dans la ville de Detroit. Les Tigers ont été si dominants depuis le début des séries qu'ils ont presque été responsables du congédiement du gérant des deux équipes qu'ils ont affrontées.
Comment tout ça a-t-il bien pu se produire? Cette équipe n'a rien d'une bande de joyeux fanfarons qui se plaisent à se décrire comme des "idiots". Elle ne compte sur aucune réelle superstar et ne joue pas à l'ombre de Disneyland. Mais ses dirigeants ont fait un travail magistral en réunissant des joueurs de talent par voie de transactions, de signatures de joueurs autonomes et en passant par le repêchage. Et en Jim Leyland, ils ont trouvé un homme qui a l'impressionnante capacité de rassembler 25 joueurs et d'en faire une équipe unie.
Si les Tigers remportent la Série mondiale, il s'agira d'un deuxième titre pour le directeur général Dave Dombrowski, qui a bâti l'équipe championne des Marlins de la Floride en 1997. On ne fera probablement jamais de film sur cette équipe et la série qu'elle s'apprête à jouer ne générera pas les meilleures cotes d'écoute, mais elle pourrait bien ajouter une bague aux doigts de Dombrowski.
Comment les Tigers ont-ils pu devenir l'équipe que l'on connaît aujourd'hui? Voici six leçons que Dombrowski a apprises.
Écoutez les gens qui vous entourent
Après qu'Alexis Gomez eut frappé le circuit qui a permis aux Tigers de battre les Athletics lors des séries de division, Dombrowski a vite fait de préciser qu'il l'avait réclamé au ballottage des Royals de Kansas City à la suite des recommandations de dépisteur Scott Bream, qui était en admiration devant la puissance et les atouts du jeune joueur.
Ce n'est pas la seule histoire du genre à Detroit. Quand Craig Monroe a été réclamé des Rangers du Texas, c'était grâce à l'éclaireur Dick Egan. L'ancien gérant des ligues mineures Phil Regan a le mérite d'avoir pressé les Tigers pour qu'ils réclament Wilfredo Ledezma quand les Red Sox l'ont laissé aller.
Dombrowski se fie beaucoup sur la contribution de deux de ses assistants qui ont toute sa confiance et son respect, Al Avila et Scott Reid. "La clé du succès, c'est d'avoir des personnes de qualité autour de soi", croit Dombrowski.
Même le frère de Leyland s'en est mêlé cette année! Larry Leyland assiste régulièrement aux matchs des Mud Hens de Toledo, l'équipe-école des Tigers. Il avait juré à son frère que Marcus Thames pourrait frapper 30 circuits si on lui donnait entre 400 et 500 présences dans les majeures. Thames a fait l'équipe et a cogné 28 longues balles en 348 présences.
Agissez de façon décisive
Quand le releveur Ugueth Urbina s'est mis à dos ses coéquipiers après avoir sauté une coche lors d'un voyage en avion en 2005, les Tigers lui ont mis un chou sur la tête et l'ont envoyé à Philadelphie en échange de Placido Polanco - le joueur le plus utile de la série de championnat de l'Américaine cette année.
Quand il est devenu évident que les Tigers ne pourraient faire signer un contrat de plusieurs saisons au releveur Kyle Farnsworth, ils l'ont envoyé aux Braves d'Atlanta en retour de Zach Miner et Roman Colon. Miner a effectué 16 départs cette saison et a compilé une fiche de 7-6 pour pallier la perte de Maroth quand celui-ci a dû être opéré au coude.
Puis en septembre dernier, quand on a décidé que Dmitri Young était devenu un poison dans le vestiaire, on l'a libéré sans hésiter. L'explication officielle, qu'on avait laissé aller Young pour ses performances insatisfaisantes, n'avait pas été gobée par bien des gens, mais les Tigers n'ont certainement pas souffert de son départ.
Prenez des risques, et payez trop cher si nécessaire
Après la saison 2003, les Tigers ont tenté de convaincre Miguel Tejada de signer un contrat avec eux, mais il a préféré prendre la direction de Baltimore. Ils ont donc décidé de dépenser leur argent sur Rondell White, Fernando Vina et Al Levine.
"Quand vous êtes étiquetés comme une équipe perdante, les gens ne viennent pas cogner à votre porte pour être engagés, constate le dg. Parfois, vous devez payer plus cher que ce que vous voudriez. Vous grincez les dents en pensant que vous aimeriez ne pas avoir à faire ça. Mais vous ne vous améliorerez pas si vous n'allez pas chercher ces joueurs."
La tradition perdante n'était pas la seule chose qui nuisait aux Tigers. Si le centre-ville prend de plus en plus de couleurs à Detroit, la vue des nombreux édifices abandonnés aux fenêtres placardées suffit convaincre un joueur autonome d'opter pour New York, Chicago ou Boston. Les Tigers ont donc décidé de mettre l'accent sur les banlieues paisibles et la beauté du Comerica Park.
L'agent Scott Boras, qui représente Magglio Ordonez, Pudge Rodriguez et Kenny Rogers, était conscient de ce qui donnait une mauvaise image à la ville et il a été clair dans ses conversations avec le propriétaire du club, Mike Ilitch.
"J'ai conseillé à Mike de bâtir un noyau avec des joueurs latins qui n'ont pas cette image négative de la ville."
L'argent ne nuit pas non plus. Dombrowski a été en mesure d'accorder 40 M$ sur quatre ans à Rodriguez et 75 M$ sur cinq ans à Ordonez, des contrats assortis de clauses qui protègent l'équipe si les blessures récurrentes à ces deux joueurs devaient refaire surface.
Faites le plein de jeunes bras
Les Tigers n'ont pas été puiser dans les rangs mineurs des autres équipes comme l'ont fait, par exemple, les Marlins l'hiver dernier. Mais le fait que le premier échange bâclé par Dombrowski à son arrivée avec l'équipe a été celui qui a envoyé Jeff Weaver à New York et qui lui a permis d'obtenir Jeremy Bonderman en dit long.
Parfois, il peut être payant de faire des achats en gros. En 2003, Dombrowski a échangé Mark Redman, un lanceur gaucher aux performances médiocres qui était admissible à l'arbitrage, contre trois lanceurs des ligues mineures : Rob Henkel, Gary Knotts et Nate Robertson.
Robertson, le moins connu des trois à l'époque, n'était même pas sur la liste des 30 meilleurs espoirs de l'équipe selon Baseball America. Depuis, il a gagné 32 matchs et lancé en moyenne 200 manches par saison. On n'entend plus parler de Knotts et Henkel.
Soyez patients
Les filiales des Tigers n'ont pas nécessairement regorgé de talent au cours des dernières années. Eric Munson, Kenny Baugh, Kyle Sleeth et Matt Wheatland sont quelques-uns des plus récents choix de première ronde qui n'ont jamais répondu aux attentes, pour une raison ou une autre.
Mais les Tigers ont produit suffisamment de jeunes prometteurs pour complémenter leur noyau de vétérans. Ils ont résisté à la tentation d'échanger Justin Verlander en Floride pour Josh Beckett, ont enduré Curtis Granderson dans son épineux cheminement dans les mineures et trouvé, en Joel Zumaya, un lanceur qui allait bientôt laisser aller des boulets de plus de 100 milles à l'heure, tout ça en 11e ronde.
À la date limite des échanges, cette année, Dombrowski a refusé de donner les prometteurs Cameron Maybin et Humberto Sanchez pour louer Alfonso Soriano pour deux mois.
Soyez chanceux!
Oui, la décision de donner 12 M$ pour deux ans à Troy Percival a été une erreur. Mais ça aurait pu être pire.
Imaginez où pourraient être les Tigers s'il avait fallu que Juan Gonzalez accepte leur offre de 140 M$ en 2000, ou si Rich Aurilia avait signé un contrat à long terme pour devenir leur arrêt-court, ou si Carl Pavano avait été convaincu par Al Kaline et avait décidé de refuser l'offre des Yankees.
Plus souvent qu'autrement, Dombrowski ne s'est pas trompé avec ses acquisitions. Il a volé Carlos Guillen aux Mariners de Seattle. Il a été patient avec Inge dans sa transition de receveur à troisième but. Il a fait rire de lui quand il a offert des contrats de deux ans aux vieillissants Todd Jones et Kenny Rogers.
Ce sont des décisions comme celles-là qui expliquent qu'une équipe passe de 43 victoires à 95 en trois ans.
Mike Maroth était devenu le premier lanceur des ligues majeures à perdre 20 matchs depuis Brian Kingman. Brandon Inge avait maintenu une moyenne au bâton de ,203 et une moyenne de présence sur les buts de ,265. Bobby Higginson avait produit un point pour chaque tranche de 227 884$ de son salaire.
Trois ans plus tard, l'amour et les applaudissements qui fusaient des gradins du Comerica Park après l'élimination des Yankees et des A's témoignent de la renaissance du baseball dans la ville de Detroit. Les Tigers ont été si dominants depuis le début des séries qu'ils ont presque été responsables du congédiement du gérant des deux équipes qu'ils ont affrontées.
Comment tout ça a-t-il bien pu se produire? Cette équipe n'a rien d'une bande de joyeux fanfarons qui se plaisent à se décrire comme des "idiots". Elle ne compte sur aucune réelle superstar et ne joue pas à l'ombre de Disneyland. Mais ses dirigeants ont fait un travail magistral en réunissant des joueurs de talent par voie de transactions, de signatures de joueurs autonomes et en passant par le repêchage. Et en Jim Leyland, ils ont trouvé un homme qui a l'impressionnante capacité de rassembler 25 joueurs et d'en faire une équipe unie.
Si les Tigers remportent la Série mondiale, il s'agira d'un deuxième titre pour le directeur général Dave Dombrowski, qui a bâti l'équipe championne des Marlins de la Floride en 1997. On ne fera probablement jamais de film sur cette équipe et la série qu'elle s'apprête à jouer ne générera pas les meilleures cotes d'écoute, mais elle pourrait bien ajouter une bague aux doigts de Dombrowski.
Comment les Tigers ont-ils pu devenir l'équipe que l'on connaît aujourd'hui? Voici six leçons que Dombrowski a apprises.
Écoutez les gens qui vous entourent
Après qu'Alexis Gomez eut frappé le circuit qui a permis aux Tigers de battre les Athletics lors des séries de division, Dombrowski a vite fait de préciser qu'il l'avait réclamé au ballottage des Royals de Kansas City à la suite des recommandations de dépisteur Scott Bream, qui était en admiration devant la puissance et les atouts du jeune joueur.
Ce n'est pas la seule histoire du genre à Detroit. Quand Craig Monroe a été réclamé des Rangers du Texas, c'était grâce à l'éclaireur Dick Egan. L'ancien gérant des ligues mineures Phil Regan a le mérite d'avoir pressé les Tigers pour qu'ils réclament Wilfredo Ledezma quand les Red Sox l'ont laissé aller.
Dombrowski se fie beaucoup sur la contribution de deux de ses assistants qui ont toute sa confiance et son respect, Al Avila et Scott Reid. "La clé du succès, c'est d'avoir des personnes de qualité autour de soi", croit Dombrowski.
Même le frère de Leyland s'en est mêlé cette année! Larry Leyland assiste régulièrement aux matchs des Mud Hens de Toledo, l'équipe-école des Tigers. Il avait juré à son frère que Marcus Thames pourrait frapper 30 circuits si on lui donnait entre 400 et 500 présences dans les majeures. Thames a fait l'équipe et a cogné 28 longues balles en 348 présences.
Agissez de façon décisive
Quand le releveur Ugueth Urbina s'est mis à dos ses coéquipiers après avoir sauté une coche lors d'un voyage en avion en 2005, les Tigers lui ont mis un chou sur la tête et l'ont envoyé à Philadelphie en échange de Placido Polanco - le joueur le plus utile de la série de championnat de l'Américaine cette année.
Quand il est devenu évident que les Tigers ne pourraient faire signer un contrat de plusieurs saisons au releveur Kyle Farnsworth, ils l'ont envoyé aux Braves d'Atlanta en retour de Zach Miner et Roman Colon. Miner a effectué 16 départs cette saison et a compilé une fiche de 7-6 pour pallier la perte de Maroth quand celui-ci a dû être opéré au coude.
Puis en septembre dernier, quand on a décidé que Dmitri Young était devenu un poison dans le vestiaire, on l'a libéré sans hésiter. L'explication officielle, qu'on avait laissé aller Young pour ses performances insatisfaisantes, n'avait pas été gobée par bien des gens, mais les Tigers n'ont certainement pas souffert de son départ.
Prenez des risques, et payez trop cher si nécessaire
Après la saison 2003, les Tigers ont tenté de convaincre Miguel Tejada de signer un contrat avec eux, mais il a préféré prendre la direction de Baltimore. Ils ont donc décidé de dépenser leur argent sur Rondell White, Fernando Vina et Al Levine.
"Quand vous êtes étiquetés comme une équipe perdante, les gens ne viennent pas cogner à votre porte pour être engagés, constate le dg. Parfois, vous devez payer plus cher que ce que vous voudriez. Vous grincez les dents en pensant que vous aimeriez ne pas avoir à faire ça. Mais vous ne vous améliorerez pas si vous n'allez pas chercher ces joueurs."
La tradition perdante n'était pas la seule chose qui nuisait aux Tigers. Si le centre-ville prend de plus en plus de couleurs à Detroit, la vue des nombreux édifices abandonnés aux fenêtres placardées suffit convaincre un joueur autonome d'opter pour New York, Chicago ou Boston. Les Tigers ont donc décidé de mettre l'accent sur les banlieues paisibles et la beauté du Comerica Park.
L'agent Scott Boras, qui représente Magglio Ordonez, Pudge Rodriguez et Kenny Rogers, était conscient de ce qui donnait une mauvaise image à la ville et il a été clair dans ses conversations avec le propriétaire du club, Mike Ilitch.
"J'ai conseillé à Mike de bâtir un noyau avec des joueurs latins qui n'ont pas cette image négative de la ville."
L'argent ne nuit pas non plus. Dombrowski a été en mesure d'accorder 40 M$ sur quatre ans à Rodriguez et 75 M$ sur cinq ans à Ordonez, des contrats assortis de clauses qui protègent l'équipe si les blessures récurrentes à ces deux joueurs devaient refaire surface.
Faites le plein de jeunes bras
Les Tigers n'ont pas été puiser dans les rangs mineurs des autres équipes comme l'ont fait, par exemple, les Marlins l'hiver dernier. Mais le fait que le premier échange bâclé par Dombrowski à son arrivée avec l'équipe a été celui qui a envoyé Jeff Weaver à New York et qui lui a permis d'obtenir Jeremy Bonderman en dit long.
Parfois, il peut être payant de faire des achats en gros. En 2003, Dombrowski a échangé Mark Redman, un lanceur gaucher aux performances médiocres qui était admissible à l'arbitrage, contre trois lanceurs des ligues mineures : Rob Henkel, Gary Knotts et Nate Robertson.
Robertson, le moins connu des trois à l'époque, n'était même pas sur la liste des 30 meilleurs espoirs de l'équipe selon Baseball America. Depuis, il a gagné 32 matchs et lancé en moyenne 200 manches par saison. On n'entend plus parler de Knotts et Henkel.
Soyez patients
Les filiales des Tigers n'ont pas nécessairement regorgé de talent au cours des dernières années. Eric Munson, Kenny Baugh, Kyle Sleeth et Matt Wheatland sont quelques-uns des plus récents choix de première ronde qui n'ont jamais répondu aux attentes, pour une raison ou une autre.
Mais les Tigers ont produit suffisamment de jeunes prometteurs pour complémenter leur noyau de vétérans. Ils ont résisté à la tentation d'échanger Justin Verlander en Floride pour Josh Beckett, ont enduré Curtis Granderson dans son épineux cheminement dans les mineures et trouvé, en Joel Zumaya, un lanceur qui allait bientôt laisser aller des boulets de plus de 100 milles à l'heure, tout ça en 11e ronde.
À la date limite des échanges, cette année, Dombrowski a refusé de donner les prometteurs Cameron Maybin et Humberto Sanchez pour louer Alfonso Soriano pour deux mois.
Soyez chanceux!
Oui, la décision de donner 12 M$ pour deux ans à Troy Percival a été une erreur. Mais ça aurait pu être pire.
Imaginez où pourraient être les Tigers s'il avait fallu que Juan Gonzalez accepte leur offre de 140 M$ en 2000, ou si Rich Aurilia avait signé un contrat à long terme pour devenir leur arrêt-court, ou si Carl Pavano avait été convaincu par Al Kaline et avait décidé de refuser l'offre des Yankees.
Plus souvent qu'autrement, Dombrowski ne s'est pas trompé avec ses acquisitions. Il a volé Carlos Guillen aux Mariners de Seattle. Il a été patient avec Inge dans sa transition de receveur à troisième but. Il a fait rire de lui quand il a offert des contrats de deux ans aux vieillissants Todd Jones et Kenny Rogers.
Ce sont des décisions comme celles-là qui expliquent qu'une équipe passe de 43 victoires à 95 en trois ans.