Une ligue trop prévisible?
NBA jeudi, 15 déc. 2016. 08:51 mercredi, 11 déc. 2024. 10:32Alors, ce premier quart de saison NBA, il vous dit quoi?
Les histoires dignes de mention sont multiples. Par où commencer?
- Russell Westbrook poursuit sa lancée de feu et on se demande ce qui pourra l’arrêter. Mais honnêtement, James Harden est tout aussi époustouflant jusqu’à présent. Il arrive dans le top-5 des points par match, et bon premier passeur de la ligue maintenant que les Rockets lui ont donné carte blanche comme meneur de jeu. Avec un arsenal limité autour de lui à Houston, il mène tout de même les siens à une fiche de 18-7, avec 7 gains consécutifs. Vous ai-je dit que son échange du Thunder aux Rockets en octobre 2012 est probablement le pire des 10 dernières années dans le circuit Silver? Non seulement parce que la récolte de joueurs envoyés à Oklahoma City en retour était déficiente, mais parce que les partisans de la NBA tout entière ont été privés de la chance de voir le trio Durant-Westbrook-Harden évoluer, grandir et dominer ensemble pendant encore quelques saisons.
- Les Warriors dominent la ligue avec 22 victoires et plus de 117 points marqués par rencontre, ce qui était à prévoir. Mais ils ont montré des vulnérabilités ici et là qui donnent le sentiment que le titre de champion n’est pas tout à fait dans la poche cette saison. Défensivement, ils se classent au 19e rang et ne démontrent pas l’acharnement et la régularité nécessaires. Et l’absence d’un joueur de qualité pour protéger efficacement la clé et l’anneau pourrait revenir les hanter en séries.
- Ma déception jusqu’à présent? Les Timberwolves du Minnesota. On dirait vraiment que certaines villes et certaines concessions ne seront jamais faites pour avoir du succès, peu importe la quantité de talent qu’on y regroupe. Difficile de trouver un jeune noyau plus dynamique et talentueux que celui formé par Karl-Anthony Towns, Andrew Wiggins et Zach LaVine. Et pourtant, l’équipe dirigée par le respecté Tom Thibodeau (non, aucune racine québécoise…) a seulement remporté 7 de ses 25 premiers matchs. Il s’agit bel et bien des mêmes Timberwolves qui étaient pressentis pour se battre pour le 8e rang dans l’Ouest.
- Le meilleur joueur que vous ne connaissez probablement pas? Giannis Antetokounmpo, des Bucks de Milwaukee. Et même si vous vouliez le connaître davantage, l’épellation de son nom a de quoi refroidir vos ardeurs. Mais sérieusement, ce jeune homme est tout un joueur!
Prenez 4 minutes pour visionner ce lien. Ça en vaut la peine. Le jeune ailier d’origine grecque (il est né à Athènes d’immigrants nigériens), est capable de tout faire. Il se classe dans le top-20 de la ligue au chapitre des points et rebonds, dans le top-10 des vols de balle et dans le top-5 des tirs bloqués. Il mesure 6 pieds 11 pouces, mais joue avec la fluidité d’un joueur pas mal plus petit. Il peut surveiller aisément n’importe quel joueur opposé à lui. Du meneur de jeu de 6 pieds au centre de 7 pieds et plus. Âgé de 22 ans seulement, son potentiel est tout simplement illimité. Il représente une nouvelle génération d’athlète hors norme. S’il évoluait dans un marché plus en vue, on lui aurait déjà trouvé un surnom inspirant (et plus simple à prononcer), ses matchs seraient fréquemment présentés à la télévision nationale et on parlerait de lui sur une base quotidienne. Mais pour l’instant, il évolue dans le froid du Wisconsin, sur une équipe de milieu de peloton et on l’a rebaptisé « The Greek Freak ». Le mutant grec. Avec justesse.
- Mais ce qui me saute aux yeux plus que toute autre chose avec plus d’un quart des matchs complétés cette saison, c’est l’aspect un peu trop prévisible de l’état des forces. On vous disait en début de campagne que les Cavs seraient dans un monde à part dans l’Est, et c’est ce l’on constate présentement. Le trio LeBron-Irving-Love est impérial et les acteurs de soutien font leur boulot. On vous disait que les Raptors étaient expérimentés et affamés, mais qu’ils n’avaient pas encore les munitions pour déloger Cleveland. Trois de leurs sept défaites cette saison sont venues aux mains des champions en titre. On vous disait que les Warriors seraient ridiculement talentueux en attaque. On vous disait que les Spurs avaient l’organisation la plus structurée de la ligue, avec l’entraîneur-chef le plus chevronné du circuit, ainsi que le remplaçant idéal à Tim Duncan (Pau Gasol) et un « 1-2 punch » exceptionnel avec Kawhi Leonard et LaMarcus Aldridge. Ils ont conséquemment une fiche de 19-5 avec 13 joueurs (!!!) qui jouent en moyenne plus de 10 minutes par match. Et enfin, on vous parlait d’une saison cruciale dans l’univers des Clippers avec un noyau talentueux et ultra-motivé, mais aussi vieillissant. Ils ont 18 victoires en 25 matchs et Chris Paul a le regard d’un enragé tous les soirs. Le regard d’un gars qui refuse de prendre sa retraite dans 5 ou 6 ans sans avoir une seule bague de champion sur ses doigts.
Allez donc consulter le classement et vous verrez que les 5 clubs qu’on attendait le plus sont les 5 qui arrivent déjà en tête du palmarès global. J’ai de la difficulté à concevoir comment l’un d’eux chutera de son rang actuel s’ils évitent tous les blessures majeures.
Êtes-vous un peu déçu, comme moi? Auriez-vous aimé au moins une surprise en ce début de saison pour brouiller les cartes un brin? Oui, les Knicks, Hornets, Grizzlies, Thunder et Rockets dépassent présentement les attentes. Mais il semble impensable que ce ne soit pas un des cinq ténors principaux qui raflera le titre au final. Il s’agit vraiment de la seule des quatre ligues majeures nord-américaines pour laquelle l’intrigue est plus réduite de nos jours. Dans la NFL, la MLB et la LNH, tout peut arriver d’une saison à l’autre. Bien malin est celui qui aurait pu voir venir un an en avance les triomphes des Cubs, Broncos et Penguins en 2016. Je m’interroge depuis une semaine dans le but de déterminer la raison principale de cette tendance au basket. Est-ce une question de structure salariale? Je ne crois pas. Oui, un plafond salarial « flexible » est en place dans la NBA, permettant à certaines équipes de dépenser davantage sur les salaires de ses joueurs. Ce qui n’est pas le cas au hockey et au football. Mais le baseball majeur n’impose aucun plafond salarial et des équipes pas mal moins riches ont réussi quand même à se rendre jusqu’en séries mondiales lors des dernières saisons (Royals et Indians).
Mon constat : la réponse se trouve au niveau de la grosseur des équipes et le côté plus individualiste du sport. Au football, le quart-arrière peut faire une grosse différence, mais si les 45 joueurs l’entourant ne sont pas de taille, le succès sera impossible. Au hockey et baseball, même son de cloche. La majorité des 22 ou 25 joueurs en uniforme aura son mot à dire sur le pointage final. Au basket, non seulement les équipes se limitent généralement à 12 joueurs en uniforme, mais seulement 8 ou 9 auront des contributions significatives à offrir lors d’un match normal. Et sur ces 8 ou 9 joueurs, vous en aurez peut-être trois ou quatre qui marqueront la majorité des points.
Donc avec une bonne sélection au repêchage, combiné à une belle acquisition via la voix des transactions ou l’autonomie, et une équipe moribonde de la NBA pourra vite transformer une situation médiocre en climat gagnant. Plus vite que dans tous les autres sports. À Cleveland, le retour de LeBron a tout changé. À Toronto, la sélection de DeRozan et l’acquisition subtile de Kyle Lowry ont changé la donne. À Golden State, les repêchages apportant Curry, Thompson et Green furent des coups de génie. Kevin Durant a servi de cerise sur le sundae. À Los Angeles, ce fut l’acquisition de Chris Paul et la sélection de Blake Griffin. Et à San Antonio… Ça nécessitera un autre article complet plus tard cette saison pour vous expliquer comment les Spurs arrivent à défier toutes probabilités du sport moderne année après année depuis 1997!
Sur ce, passez un beau temps des fêtes et on se reparle tôt en 2017 avec une nouvelle chronique. Entre temps, j’espère que vous surveillerez comme moi les matchs du 25 décembre. Pour le déjeuner, Celtics c. Knicks à midi. En plat principal, une revanche Warriors c. Cavaliers à 14 h 30! Au dessert, Bulls c. Spurs à 17 h. L’apéritif? Timberwolves c. Thunder à 20 h. Et la berceuse, Clippers c. Lakers à 22 h 30. Il s’agira essentiellement du deuxième lancement officiel de la saison 2016-2017.