J'ai terminé ma saison en série Champ Car en fin de semaine dernière avec une cinquième place à Mexico, ce qui me permet de boucler l'année au huitième rang du classement des pilotes.

Contrairement à ce qu'on pourrait penser en regardant le classement final, je suis vraiment satisfait de ma saison. Quand je regarde toutes les courses que je n'ai pas pu terminer en raison de la malchance, je suis triste de voir que la possibilité de connaître ma meilleure saison en carrière et de procurer de meilleurs résultats à mon équipe Team Australia m'a glissé entre les doigts, mais je ne suis pas frustré.

J'ai déjà parlé en détail de toute la guigne qui s'est acharnée sur moi dans ma chronique précédente. En calculant le nombre approximatif de points que j'ai perdu par malchance, on peut conclure que j'aurais facilement pu atteindre mon objectif de début de saison qui était de terminer parmi les trois premiers au classement des pilotes.

Admettons que je termine une - une seule! - des sept courses lors desquelles je n'ai pu croiser le fil d'arrivée : je termine quatrième. Le classement est serré à ce point, mais tu ne peux pas espérer être dans la lutte pour un championnat quand tu ne récoltes des points que dans la moitié des épreuves.

Une autre statistique vient encore plus appuyer mes dires : celle des tours complétés. Le meneur, mon coéquipier Will Power, a roulé pendant 1191 tours sur une possibilité de 1251. C'est du tour, ça! Je viens en 13e place dans cette catégorie avec 898 tours. J'ai terminé le championnat avec 205 points, Power 213. Huit points nous séparent, même s'il a complété près de 300 tours de plus que moi. Si je passe mon année dans les puits alors que les autres sont en piste, comme est-ce que je peux me battre contre ça?

Il s'en est fallu de peu…

Mais je le répète, ça ne serait pas fair de dire que je suis frustré. J'ai toujours dit, en tant que pilote, que la chose la plus importante dans une carrière, c'est d'avoir une voiture pour pouvoir batailler avec les meilleurs. Si j'avais conduit une boîte à savon qui ne m'aurait pas permis de m'amuser pendant que j'étais en piste, j'aurais été frustré, parce que me rendre au circuit dans le seul but de compléter une course, ça ne m'intéresse pas.

Toutes les courses que j'ai complétées, à l'exception de celle de Portland où j'ai pris le neuvième rang, j'ai terminé dans le Top 6. Dans toutes les autres courses où la malchance a fait des siennes, j'étais en position pour en faire autant. Voici une statistique qui va vous faire réaliser bien des choses : en sachant qu'une neuvième place donne 13 points, si je suppose que j'aurais fini à cette position lors d'une seule des sept courses où j'ai dû abandonner, je me retrouve au cinquième rang du championnat des pilotes.

Remplaçons maintenant deux abandons par deux neuvièmes places : me voilà quatrième au championnat, avec A.J. Allmendinger à ma portée.

La raison pour laquelle je suis triste et non frustré, c'est que j'ai été frappé par des événements qui étaient hors de mon contrôle. Que voulez-vous que je fasse?

Dans la peau d'un entraîneur

Je compare ma situation à celle d'un entraîneur au hockey qui a tous les éléments nécessaires pour gagner la coupe Stanley. Son équipe se bat toute la saison, arrive en finale et dans le match décisif, un de ses joueurs frappe le poteau alors que l'autre équipe s'en va répliquer avec un but chanceux. L'entraîneur va-t-il être frustré ou déçu?

Il va être triste de voir une belle occasion lui glisser entre les doigts parce qu'il avait tout ce qu'il fallait pour aller jusqu'au bout, mais il va être content d'avoir pu se battre pour les grands honneurs pendant toute l'année. C'est quand même mieux que d'avoir bûché constamment tout en n'étant même pas certain de faire les séries.

Pour un joueur de hockey comme pour un pilote, c'est difficile de se présenter au travail à chaque jour en se disant qu'on a plus de chances de perdre que de gagner. Si je prenais l'avion pour chaque Grand Prix en me disant que j'ai peut-être des chances de terminer 10e s'il y a quelques abandons, je perdrais la motivation bien assez vite.

Si vous me donnez le choix entre une saison comme celle que je viens de connaître ou une comme celle d'Andrew Ranger, par exemple, qui n'a presque jamais pu se battre pour le Top 5 mais qui a terminé bien des épreuves, je choisis la mienne.

Du changement en vue

J'ai parlé avec plusieurs équipes et tout est positif pour que je continue en Champ Car l'an prochain. J'ai eu des pourparlers avec Rocketsports, avec Dale Coyne Racing et avec RuSPORT.

Même s'il n'y a rien de confirmé, je ne m'attends pas à être de retour avec Team Australia, l'équipe avec laquelle j'ai passé les deux dernières saisons. Je sais que l'équipe aimerait miser sur deux pilotes australiens dès l'an prochain et je ne peux vraiment la blâmer.

Quand on courait avec Player's, personne ne critiquait l'équipe de ne pas donner la chance à un Japonais ou à un Australien. Player's était une compagnie canadienne qui donnait la chance à des pilotes de chez nous et on en était bien content. Imaginez si, dans le temps, Player's avait enlevé la possibilité à un Canadien de courir à la faveur d'un Australien!

Difficile de dire où je vais me retrouver, mais je dois avouer que mon cœur penche pour Rocketsports, pour qui j'ai couru en 2003 et 2004. J'ai obtenu de très bons résultats avec cette écurie que j'ai vu naître. J'avais dû quitter parce que d'autres pilotes étaient arrivés avec de l'argent sur la table et depuis ce temps ils ont connu toutes sortes de difficultés.

Je m'entends super bien avec le propriétaire Paul Gentilozzi et un retour aux sources pourrait faire en sorte qu'on reprenne le temps perdu et qu'on continue ce qu'on avait commencé ensemble. Ça pourrait être le fun, et comme tout le monde recommence à zéro l'année prochaine, ça va être important d'être avec une équipe avec qui ça clique. Je devrais être fixé sur mon avenir en Champ Car d'ici la mi-décembre.

D'ici ma prochaine course en Grand-Am en janvier, j'effectuerai deux séances d'essais, j'assisterai au banquet de la série Champ Car et je serai de retour à Montréal la semaine prochaine pour parler avec les commanditaires.

Je vous tiens au courant de tous les prochains dénouements!

Propos recueillis par RDS.ca