MONTRÉAL - Si vous pratiquez les arts martiaux mixtes, il serait surprenant que vous ayez plus de vécu dans le domaine que Jonathan Goulet.

Neuf années se sont écoulées depuis la première fois où Goulet a touché un chèque de paie pour monter dans un ring, à l'âge de 22 ans. Une décennie au cours de laquelle le combattant de Victoriaville est devenu l'un des visages les plus reconnus de son sport au Québec.

Comme tous ceux qui ont décidé de gagner leur vie avec leurs jointures, il a vécu des moments forts et a dû passer par-dessus d'intenses déceptions. Il a côtoyé les grands et atteint le fond du baril. Il a tout fait, tout vu. Ou presque.

Quelque chose lui a toujours échappé.

David Loiseau a été le champion des poids moyens de l'organisation TKO avant de faire sa marque aux États-Unis. Georges St-Pierre a défendu sa ceinture de monarque des mi-moyens du Universal Combat Challenge (UCC) à deux reprises avant de recevoir l'appel inévitable des grandes ligues. Patrick Côté a détenu des distinctions similaires chez TKO et au sein du Maximum Fighting Championship (MFC) à travers ses onze combats contre la crème de sa profession.

Mais Goulet, un vétéran aguerri qui est demeuré invaincu en neuf combats avec TKO avant de parvenir lui aussi à atteindre l'échelon le plus élevé de son sport (il montre une fiche de 4-5 avec le UFC), n'a jamais eu la chance de récolter les mêmes honneurs.

"Ça me surprend toujours chaque fois que j'y pense, avoue Goulet. Il était temps!"

Portant les cicatrices de ses 35 combats professionnels, Goulet s'est finalement vu offrir l'opportunité d'aller chercher la décoration qu'il convoite. Samedi soir au Centre Pierre-Charbonneau de Montréal, il tentera de porter à sa taille la ceinture vacante de champion des mi-moyens de l'organisation québécoise Ringside. La seule personne qui se tient entre lui et son objectif est l'Ontarien Chris Clements.

"Quand j'ai été libéré par le UFC, j'ai demandé à mon gérant de me trouver une place où j'aurais la chance d'être champion. À la fin de ma carrière, j'aimerais ça avoir mes certificats. Ceux qui vont à l'université ont des diplômes qu'ils peuvent accrocher sur le mur. Moi, c'est la même chose. Si un jour j'ai mon propre gym, j'aimerais avoir une ceinture à montrer. Pour avoir plus de crédibilité."

"Avec TKO, j'avais eu des offres pour me battre pour une ceinture. Le problème, c'est que le gars que je devais affronter à l'époque, Steve Vigneault, s'était blessé à quelques reprises, se remémore Goulet. Je devais donc chaque fois me battre contre d'autres gars, comme Travis Axworthy par exemple. C'est pour ça que quand on regarde ma fiche, on dirait que j'ai affronté plein de no names."

Goulet a fait le saut avec le UFC en 2005, une promotion qu'il devait alors à une succession de huit victoires en sol québécois. L'association s'est terminée en mai dernier, quand il a été libéré dans les jours qui ont suivi sa douloureuse défaite contre Marcus Davis au Centre Bell.

Ringside a sauté sur l'occasion et a fait miroiter un avenir intéressant au Road Warrior, qui a décidé de poursuivre sa carrière devant les siens. À son premier combat sous sa nouvelle affiliation, en juillet, Goulet a défait Matt McGrath en 1:39, abattant la dernière étape qui le séparait de son dernier combat de championnat.

"C'est sûr que ça ne vaudrait pas une ceinture du UFC, mais ça équivaut à un titre de n'importe quelle autre organisation en Amérique du Nord, croit-il. Ringside est une compagnie qui a les reins solides et qui est là pour rester. Et jusqu'à maintenant, notre association se déroule à merveille."

"Je n'ai pas eu la chance de devenir champion du monde du UFC, mais je serais vraiment heureux de devenir le champion des Québécois."

Un adversaire unidimensionnel

La feuille de route de Clements (6-4) n'a rien pour faire reculer Goulet, qui s'est presque battu quatre fois plus souvent que son prochain rival.

"À part son surnom (The Menace), Clements n'a rien pour me menacer, avance calmement le Montréalais d'adoption. On ne sait jamais en arts martiaux mixtes. Peut-être aussi qu'il s'est amélioré depuis son dernier combat. Mais à mon avis, mon niveau de lutte est meilleur que le sien. Même chose au sol. C'est dans ces deux aspects que je me vois le dominer et le battre."

Pas besoin de lire entre les lignes, donc, pour comprendre que Goulet ne sortira pas de son coin avec l'intention d'échanger avec Clements. Le coéquipier de Mark Hominick, Chris Horodecki et Sam Stout chez Team Thompkins a signé ses six victoires par K.-O., dont une en seulement trois secondes, un record mondial. Il a aussi subi trois de ses quatre défaites par soumission.

"L'envoyer sur le dos? C'est exactement mon plan de match, dévoile Goulet. J'ignore quand je vais le faire, mais aussitôt que je vais voir une ouverture, je vais essayer de la prendre."

Goulet non plus n'a pas l'habitude de s'éterniser dans l'arène. Il s'est écoulé plus de quatre ans depuis qu'il a laissé l'issue de l'un de ses combats entre les mains des juges. Cette fois, pour la première fois de sa carrière, il a dû s'entraîner dans l'éventualité de passer cinq rounds dans la cage.

"C'est sûr que je n'ai pas eu le choix de pousser un peu plus côté cardio, mais je ne pense pas que le combat atteigne la limite. Si ça fait cinq rounds, je vais lui lever mon chapeau et lui payer une grosse bière. Sinon, il devra se contenter d'un shooter", propose Goulet en riant.

Et en se disant sûrement que l'important, ce sera de boire à sa victoire.