Depuis l’annonce du combat entre Johny Hendricks et Georges St-Pierre, une bonne partie des réflecteurs a malheureusement été tournée vers le jeu de coulisses concernant les tests antidopage. À quelques jours du combat, c’est encore et toujours cette question qui refait surface avec la publication par l’équipe de Georges St-Pierre des résultats de ses tests inopinés de septembre et octobre dernier. Allons-y d’un survol complet de ce qui s’est réellement passé dans ce dossier auquel ont été mêlés les clans Hendricks et St-Pierre, mais aussi la Commission athlétique du Nevada ainsi que le UFC.

Depuis le début de sa carrière, Georges St-Pierre a été accusé à plusieurs reprises d’utiliser des substances interdites afin d’améliorer ses performances et, chaque fois, le Québécois a balayé du revers de la main ces allégations tout en précisant qu’au fond ces accusations lui faisaient un velours puisque si ses adversaires ont cette impression, c’est qu’il fait quelque chose de vraiment bien sans même n’avoir jamais utilisé ce type de substance. En tant que gérant de Georges St-Pierre jusqu’à juillet 2007, je peux certifier que jusqu’à cette période de sa carrière jamais il n’a eu recours à aucune substance interdite – je peux même dire qu’il n’a jamais été question de même simplement y songer puisqu’en plus d’être contre cette pratique à 100 %, Georges a une peur bleue de tout ce qui s’appelle drogue ou médicament.

Depuis les deux dernières années, ces accusations se sont quelque peu intensifiées et c’est devenu un sujet agaçant pour St-Pierre compte tenu que plusieurs athlètes ont été pris la main dans le sac et suspendus autant par les commissions athlétiques que par l’organisation du UFC. Le champion des 170 livres s’est alors donné comme mission de tenter de démontrer qu’il était possible d’être le meilleur de sa profession en étant propre et pour montrer l’exemple il s’est lancé dans une bataille d’opinion publique sur les tests antidopage.

Avant de continuer, il est important de noter que Georges St-Pierre et Johny Hendricks ont tous les deux été testés à de multiples occasions par différentes commissions athlétiques en Amérique du Nord depuis le début de leur carrière et les deux ont toujours été déclarés négatifs à chacun de ces tests.

Juillet 2013

Lors d’une conférence de presse pour mousser le combat que vont se livrer Hendricks et St-Pierre le 16 novembre, Georges propose à son adversaire de passer avec lui les plus stricts tests antidopage disponibles sur le marché afin de démontrer à tous qu’ils allaient tous les deux être « propres » à l’occasion de ce très important combat. St-Pierre propose même de payer de sa poche pour les tests des deux athlètes. Hendricks donne son aval à cette proposition en ajoutant que tout ce qui serait découvert dans son sang serait du sanglier, du chevreuil ainsi que des protéines d’entraînement. 

Quelques temps plus tard, Hendricks apprend que l’agence qui est proposée par St-Pierre est la VADA (Voluntary Anti-doping Association), une organisation indépendante qui dit s’associer à des athlètes dont le but premier est de purifier leur sport. Plusieurs athlètes de pointe ont prêté leur nom à l’organisation VADA justement dans ce but – et en parcourant le site de VADA ont peut y voir les noms de Manny Pacquiao, Timothy Bradley, Ruslan Provodnikov et justement Georges St-Pierre. C’est à la vue de la photo de Georges St-Pierre sur le site de la VADA que les choses ont mal tourné et que les questionnements ont commencé dans l’esprit de Johny Hendricks et son équipe. Dans l’esprit du gérant d’Hendricks, Ted Ehrhardt, il est inconcevable qu’un organisme qui a une « relation » avec St-Pierre puisse être celui qui allait être responsable de ces tests. Selon Ehrhardt, Georges St-Pierre est celui qui se promène avec un nuage gris au-dessus de la tête depuis plusieurs années sur cette question du dopage.

« Beaucoup de gens dans le milieu croient que St-Pierre utilise des hormones de croissance ou ce type de substance et il décide aujourd’hui qu’il veut se blanchir de ces accusations contre lui et ça tombe que c’est à l’aube de son combat contre Johny. On n’a rien à cacher et nous allons faire tous les tests, les plus exigeants qui soient, qui nous seront mandatés par la Commission athlétique du Nevada ou par le UFC et il n’y a qu’une seule chose à laquelle Johny sera déclaré positif et c’est à un haut taux de cholestérol puisqu’il mange beaucoup de fast-food. »

La conférence téléphonique avec la Commission athlétique du Nevada

Ayant appris dans les médias les intentions de St-Pierre et Hendricks à la suite de la fameuse conférence de presse, le directeur de la Commission athlétique du Nevada (État où aura lieu le combat) Keith Kizer décide d’organiser une conférence téléphonique avec les deux clans ainsi que des représentants du UFC afin de clarifier la situation. Comme il l’a fait lors d’autres grands combats en boxe, Kizer propose au UFC ainsi qu’aux deux clans d’utiliser l’Agence mondiale d’antidopage WADA et son laboratoire de Salt Lake City. Proposition à laquelle le clan Hendricks donne son approbation immédiatement. Puis à la surprise d’un peu tout le monde, principalement du directeur de la commission athlétique, Rodolphe Beaulieu le gérant de Georges St-Pierre se met à poser des questions au sujet des tests qui seraient effectués par le laboratoire affilié à l’agence WADA.

« Quelles seront les substances qui seront testées? Est-ce que ces tests incluront les hormones de croissance? À quel moment ces tests seront-ils pris? Peut-on avoir la liste détaillée des substances testées afin de la faire approuver par le médecin de Georges? »

La réponse de Kizer ne s’est pas fait attendre.

« Oui nous testons pour tout, mais il s’agit de tests inopinés alors nous n’allons pas vous donner de dates. Votre réponse aurait dû être OK, mais je vais prendre votre réponse comme un non. Vous voulez faire le test VADA de votre côté de façon indépendante, c’est votre choix. Nous ferons de notre côté les tests que nous jugerons nécessaires. Bonne fin de journée.  »

Kizer a ajouté que la liste des substances testées par WADA est la même que celle utilisée par VADA, mais que la différence est qu’en utilisant directement l’organisme VADA il n’y avait aucun intermédiaire entre St-Pierre et la VADA alors qu’en utilisant le programme proposé par la commission athlétique, cette dernière allait être l’intermédiaire entre le laboratoire et les deux athlètes. Visiblement irrité par la situation, Kizer a tenu à préciser qu’il n’en avait pas contre St-Pierre et que ce dernier n’était probablement même pas au courant des questions posées par son représentant.

La situation à ce jour

Depuis cette conférence téléphonique, Georges St-Pierre a tenu parole et a poursuivi les démarches avec l’agence VADA et à trois reprises déjà il a reçu la visite de l’agence autant chez lui qu’au gymnase afin de subir des tests à l’improviste. Les trois prélèvements ont été pris le 4 septembre, le 11 septembre et le 15 octobre dernier et au moins un autre est prévu d’ici le combat. Hier, St-Pierre a d’ailleurs publié via les médias sociaux les résultats de ces prélèvements, tous négatifs. La Commission athlétique du Nevada n’a jamais donné suite à sa proposition d’utiliser un laboratoire indépendant de l’agence WADA et aucun formulaire à ce sujet n’a été envoyé ni à St-Pierre ni à Hendricks.

Le clan Hendricks quant à lui est demeuré sur ses positions : ils vont faire tous les tests qui seront demandés par la Commission athlétique du Nevada ou par l’organisation du UFC en marge du combat. Hendricks a d’ailleurs été très clair à ce sujet.

« Je n’ai jamais pris aucune substance et je n’en prendrai jamais. Si on me demande de passer des tests, je ne vais poser aucune question et je vais m’y plier. Pourquoi poser des questions? Si tu es propre, tu es propre. Dans le fond, je n’en ai rien à cirer si St-Pierre prend des substances ou pas. Tout ce que je veux, c’est qu’il se présente dans l’octogone le 16 novembre… »

Keith Kizer a confirmé qu’en plus des tests subis par St-Pierre, les deux athlètes allaient aussi être testés par la commission athlétique avant et après le combat de samedi prochain. Évidemment que cette histoire peut être vue de toute sorte d’angles, mais il demeure quand même qu’il faut lever notre chapeau à Georges St-Pierre pour à tout le moins tenter d’éveiller les gens et les médias sur la question du dopage dans le sport professionnel. Comme l’a dit Dana White lors d’une entrevue récente, oui les intentions de St-Pierre sont bonnes et c’est quelque chose qui devrait être fait de façon plus régulière et assidue, mais c’est peut-être la manière utilisée par l’équipe de St-Pierre qui a rendu cette situation un peu chaotique.

Mais mise à part toute cette histoire qui a trop retenu l’attention ces dernières semaines, une chose est certaine, samedi soir prochain à Las Vegas nous aurons droit à tout un combat entre deux athlètes qui j’en suis sûr seront propres à 100 %.