Jonathan Goulet a réussi à remonter à la surface. Après quatre mois d'entraînement intensif, il est fin prêt pour son retour dans l'octogone, qui se concrétisera samedi soir contre l'Américain Marcus Davis, en sous-carte du UFC 113 au Centre Bell. Mais il ne cache pas qu'il a dû traverser une période sombre avant de revoir la lumière.

"J'ai touché le fond du baril. Je n'ai pas peur de le dire, j'ai vraiment vécu la dépression totale, raconte l'orgueil de Victoriaville, qui est aujourd'hui établi à Montréal. C'était problème par-dessus problème, tout ce qui m'arrivait était négatif. Plus je m'enfonçais et pire c'était."

À l'été 2009, Goulet venait de se remettre d'une vilaine blessure à un genou subie lors de sa défaite expéditive contre Mike Swick et était de retour dans le gymnase en vue de sa participation au UFC 100, le gala le plus attendu de l'histoire de l'organisation au cours duquel il devait affronter, deux jours avant son trentième anniversaire, le Sud-Coréen Dong Hyun Kim.

"Tout était numéro un. J'arrivais d'Albuquerque, au Nouveau-Mexique, où j'étais allé m'entraîner avec Greg Jackson. J'avais embauché une nutritionniste, que je voyais régulièrement. J'étais entouré de positif. Puis c'est arrivé..."

Un mois avant d'affronter Kim, Goulet s'est déchiré un ligament de l'épaule droite à l'entraînement.

"C'est ça qui m'a vraiment mis à terre. J'ai arrêté de m'entraîner, totalement. Au début, je continuais d'aller au gymnase pour voir les gars, mais ça me frustrait trop de ne pas pouvoir participer. J'ai arrêté d'y aller et j'ai commencé à rester enfermé chez moi. Je crois que j'ai passé à travers tous mes jeux vidéo. Plus le temps passait et plus je me retrouvais seul."

L'oisiveté est mère de tous les vices, a appris Goulet d'une façon brutale. "J'aimais l'alcool. Je n'étais pas suicidaire, mais aussitôt qu'il m'arrivait quelque chose de négatif, je pétais quelque chose. Je n'ai jamais été violent avec ma femme, mais je me défoulais sur le matériel", confesse-t-il sans gêne.

Voltaire a déjà dit que « travailler, c'est vivre ». Quand Goulet a finalement reçu l'assurance du médecin que son épaule avait retrouvé sa solidité d'antan, son premier réflexe a été de retourner au gymnase pour se délier les muscles.

"Ça a été difficile, mais quand je suis revenu à la maison, j'avais un énorme sourire dans le visage. J'ai réalisé que j'avais vraiment besoin de bouger pour être bien et présentement, je ne suis plus capable de m'arrêter."

Marcus Davis, trois ans plus tard

Même s'il avait encore une raison de broyer du noir, Goulet n'en aurait de toute façon plus le temps. Entre l'entraînement, les nombreux coups de téléphone de son gérant et un important rendez-vous au salon de coiffure (fidèle à sa réputation, il s'est fait tailler sur le crâne le nom de deux de ses commanditaires, mmafightshop.ca et Headrush, une œuvre d'art qui a nécessité presque trois heures de travail), il court à gauche et à droite pour remplir les engagements qui viennent avec un contrat de combattant du UFC.

L'horaire ultra-chargé ne fait pas son bonheur, mais il s'y plie avec le sourire. C'est l'envers de la médaille pour un athlète qui puise son oxygène dans le son bien senti d'un coup de poing dans un sac de sable, la sueur qui perle sur son front ou les cris d'encouragement d'une foule en liesse.

"Ce qui me manque le plus, c'est le moment de gloire. Je suis bien dans un gym, je suis bien à l'entraînement. L'adrénaline que je recherche, je la trouve dans l'octogone."

Ironiquement, celui dont le parcours lui a mérité le surnom de "Road Warrior" a insisté pour effectuer son retour à Montréal, où il se battra pour la première fois depuis qu'il avait touché la prime remise aux combattants qui ont offert le "combat de la soirée" au UFC 83. Son adversaire, Marcus "The Irish Hand Grenade" Davis, tente de se remettre de défaites consécutives contre Dan Hardy et Ben Saunders.

"Je suis stressé, mais en ce moment, ce que je ressens le plus, c'est une écoeurantite aïgue. Je ne suis plus capable de rêver à Marcus Davis. Ça fait longtemps que je sais que je vais me battre contre lui et il est souvent dans ma tête", se plaint le vétéran de 33 combats en hochant la tête.

Goulet connaît bien Davis pour avoir partagé le même gymnase que lui il y a trois ans. Le Québécois était à la recherche d'une équipe et était allé tâter le terrain du côté de Boston pendant quelques semaines. "Je pouvais l'amener au sol comme je voulais et rendu là, je le maîtrisais. Mais on s'entend que debout, il était meilleur que moi", raconte Goulet, qui avait finalement opté pour le Tristar Gym de Montréal.

Bien des choses ont changé depuis cette rencontre fortuite entre les deux futurs rivaux, mais l'évolution de son adversaire n'est pas ce qui chicote le plus Jonathan Goulet. Depuis sa défaite contre Josh Koscheck en août 2006, neuf de ses onze combats n'ont pas atteint le deuxième round, tantôt pour le meilleur, tantôt pour le pire. La défaite contre Swick, une histoire de 33 secondes, a laissé une trace indélébile dans sa mémoire.

"Ça a été le plus gros travail à faire dans mon plan de match : prendre mon temps. Je dois me battre intelligemment. Contrairement à ce que j'ai fait contre Swick, je n'irai pas foncer tête première vers Davis."

Tête première ou pas, Goulet, qui revient de loin, peut maintenant la garder bien haute. Avec ou sans sa nouvelle coupe de cheveux.