Une entrevue qui m'a mené à Silva
AMM jeudi, 3 févr. 2011. 01:56 vendredi, 13 déc. 2024. 03:43
Dans ma chronique précédente, je vous racontais comment j'avais été initié aux arts martiaux mixtes alors que j'étais enrôlé dans les forces armées à Québec. Je vous ai fait vivre ma première ascension au UFC et mes défaites contre Tito Ortiz, Joe Doerksen et Chris Leben.
Mon chemin du retour vers le UFC est passé par une émission de téléréalité qui s'appelle The Ultimate Fighter. Il s'agissait de la quatrième saison de l'émission, qui était intitulée The Comeback. Le but était de donner une deuxième chance à des combattants qui s'étaient déjà battus pour le UFC sans toutefois connaître le succès espéré.
Je trouvais que j'étais parfait pour le rôle. On m'avait appelé pour aller passer une entrevue à Las Vegas et je devais convaincre les patrons que je méritais d'être sélectionné pour l'émission. J'ai sûrement bien vendu ma salade, parce que j'ai été choisi et je suis resté à Las Vegas pour le tournage qui a duré six semaines.
Le concept ressemblait beaucoup à l'émission qu'on connaît aujourd'hui, mais il n'y avait pas vraiment d'entraîneurs attitrés spécifiquement à une équipe. Des gars comme Georges St-Pierre, Randy Couture, Mark DellaGrotte et Marc Laimon étaient là pour nous aider, mais comme on était un groupe de combattants déjà établis, personne n'était en charge d'une équipe en particulier.
Dans notre groupe, c'est Matt Serra qui a pris le plus d'initiative et qui est devenu notre leader, notre coach en quelque sorte. L'équipe dont je faisais partie avec notamment Serra, Shonie Carter, Chris Lytle et Scott Smith s'en était très bien sortie. On avait gagné sept des huit combats préliminaires et nos succès s'étaient poursuivis jusqu'en finale. Chez les mi-moyens, Serra avait battu Lytle pour obtenir un combat de championnat du monde contre Georges tandis que chez les moyens, je m'étais incliné devant Travis Lutter, qui a gagné le droit d'affronter Anderson Silva.
Les deux victoires que j'ai obtenues dans le cadre de l'émission - contre Jorge Rivera et Edwin DeWees - ne sont peut-être pas compilées à ma fiche, mais elles comptaient quand même beaucoup pour moi. À l'époque, ces deux gars-là étaient bien cotés dans la division et ma confiance avait été gonflée par mes performances contre eux.
Malgré tout, j'avais maintenant une fiche de 0-4 au UFC. C'était un peu déprimant, mais j'ai changé beaucoup de choses dans mon entraînement à partir de ce moment. J'ai commencé une association avec DellaGrotte, avec qui j'avais développé une bonne relation lors du tournage de la téléréalité, et il m'a aidé à apporter quelques bons ajustements à ma routine. Je ne le savais pas encore, mais de belles choses allaient découler de ce remue-ménage.
Je suis remonté dans l'octogone deux mois seulement après ma défaite contre Lutter, au UFC 67. J'étais opposé à Scott Smith, qui était devenu un bon ami à TUF 4. Pour cette raison, ça a été un peu bizarre de me battre contre lui, mais on comprenait tous les deux qu'on devait passer en mode business pendant 15 minutes. Je l'ai dominé pendant trois rounds pour finalement savourer ma vraie première victoire au UFC. Du jour au lendemain, j'avais une tonne de pression en moins sur les épaules.
Il y avait quand même loin de la coupe aux lèvres. Même si je venais de gagner, le UFC m'a demandé de retourner me faire la main dans une autre organisation. Je me suis donc fait une place sur la carte du TKO 29, où j'ai battu Jason Day en quatre minutes pour gagner le titre des poids moyens de l'organisation. La machine était partie!
Victoire contre Kendall Grove au UFC 74, puis autre victoire dans la demi-finale du Ultimate Fight Night 12 aux dépens de Drew McFedries, chaque fois par K.-O. au premier round. J'ai ensuite été placé dans le co-main event du UFC 86 face à Ricardo Almeida, contre qui j'ai mis la main sur l'une des victoires les plus satisfaisantes de mon parcours professionnel.
Contre ce Brésilien ceinture noire en JJB et six fois champion du monde de la discipline, j'ai prouvé que je n'étais pas seulement un gars qui pouvait se battre debout. J'ai été capable de repousser plusieurs de ses tentatives de projections et de me relever lorsqu'il réussissait à m'amener au sol.
J'ai gagné le combat par décision pour enfin voir se présenter à moi l'opportunité qui m'avait glissé entre les doigts un an et demi plus tôt : après avoir fait un grand détour, j'étais maintenant l'aspirant numéro un au titre d'Anderson Silva.
La chance d'une vie
Silva m'a battu après 39 secondes du troisième round d'un combat prévu pour cinq.
Quand je l'ai affronté, il venait de gagner ses sept premiers combats avec le UFC et personne n'avait réussi à l'amener au troisième round. Ce n'est donc pas un hasard si, quand la caméra s'est allumée devant moi entre la deuxième et la troisième reprise, j'ai indiqué le chiffre « 3 » avec mes doigts. Je voulais signifier à tout le monde que je venais de réussir ce que personne n'avait pu accomplir avant moi.
Mon apparente confiance était toutefois trompeuse. Pendant que je me préparais à sortir de mon coin, je savais pertinemment que mon genou était complètement fini. Vers la fin du deuxième round, j'avais envoyé un coup de pied que Silva avait bloqué à 50%, L'autre moitié de ma jambe, elle, a lâché. À partir de ce moment, aussitôt que je mettais du poids sur ma jambe, je sentais mon genou disloquer. Ma jambe arrière était vraiment devenue instable.
Dans mon coin après le deuxième round, j'ai fait connaître ma condition à mon entraîneur, qui m'a demandé si je voulais continuer. Je lui ai répondu que tant qu'à être là, j'allais au moins aller essayer quelque chose. Mon plan était d'essayer de rentrer à l'intérieur pour travailler la lutte, mais aussitôt que j'ai mis mon poids sur la jambe, c'était la fin. J'ai essayé de me relever, mais je n'étais plus capable.
Plusieurs personnes m'ont critiqué et ont mis ma volonté en doute parce que je suis sorti de l'octogone sur mes deux jambes ce soir-là. Mais il faut comprendre que lorsque tu te brises un ligament, la douleur est intense pendant 30 secondes et ensuite, tu ne sens plus rien. Mais ton genou ne tient plus sur grand-chose. Tant et aussi longtemps que tu marches droit, tout va bien, mais au moindre petit pivot, ça débarque. Croyez-moi, je ne voulais être nulle part ailleurs que dans un octogone avec Anderson Silva ce soir-là...
Dans le sport que je pratique, l'obtention d'un combat de championnat du monde est l'échelon le plus élevé que l'on puisse atteindre à moins, bien sûr, que l'on soit déjà champion. C'est le rêve de tout combattant, encore plus au UFC, et peu importe ce qui m'arrive à partir d'aujourd'hui, je pourrai toujours dire que je l'ai eu, ce moment-là.
J'ai dû attendre 18 mois avant de revenir sur mes deux jambes. Mon grand retour s'est fait au UFC 113, au Centre Bell, contre Alan Belcher. Plusieurs personnes se demandaient pourquoi j'avais choisi un adversaire aussi coriace après une longue absence, mais c'est exactement ce que je voulais. Je me sentais bien, j'étais en parfaite forme physique et je voulais me frotter à un gros nom en partant.
Ça m'a pris du temps avant de commencer le combat. J'ai eu de la difficulté à embrayer dans les 90 premières secondes, mais une fois que j'ai été capable de mettre l'interrupteur à « ON », je me sentais dans mon élément. Je l'ai amené au sol, j'ai facilement passé sa garde et j'ai fait une tentative de kimura qui a malheureusement échoué de justesse. Au deuxième round, j'ai commencé à trouver ma distance avec mes poings et je sentais que je pouvais aussi le dominer debout.
J'ai ensuite fait une petite erreur, c'est vrai, en laissant mon cou à sa portée, mais jamais je ne m'attendais à ce qu'il me lève et me fasse la descente du marteau pilon. Ça m'a fait perdre la carte pendant quelques secondes et ça lui a permis de me passer la soumission gagnante. Oui, la tactique était controversée et au bord de la légalité, mais je crois que ce qui me met le plus en furie dans tout ça, c'est qu'il a touché le bonus de 60 000$ pour la soumission de la soirée. Celle-là, je l'ai avalée de travers!
Finalement, en octobre dernier, j'ai subi une malheureuse défaite contre Tom Lawlor, signant une fois de plus mon arrêt de mort avec le UFC. Aujourd'hui, je suis de retour à la case départ, j'ai une boule de feu dans le ventre et j'ai la ferme intention de remonter une à une les marches qui mènent vers les sommets que j'ai déjà visités.
Je vous invite à suivre mon cheminement au cours des prochains mois, des prochaines années. Et si vous avez des questions par rapport au monde des arts martiaux mixtes, c'est l'endroit idéal pour les poser.
À bientôt!
*Propos recueillis par Nicolas Landry.
Mon chemin du retour vers le UFC est passé par une émission de téléréalité qui s'appelle The Ultimate Fighter. Il s'agissait de la quatrième saison de l'émission, qui était intitulée The Comeback. Le but était de donner une deuxième chance à des combattants qui s'étaient déjà battus pour le UFC sans toutefois connaître le succès espéré.
Je trouvais que j'étais parfait pour le rôle. On m'avait appelé pour aller passer une entrevue à Las Vegas et je devais convaincre les patrons que je méritais d'être sélectionné pour l'émission. J'ai sûrement bien vendu ma salade, parce que j'ai été choisi et je suis resté à Las Vegas pour le tournage qui a duré six semaines.
Le concept ressemblait beaucoup à l'émission qu'on connaît aujourd'hui, mais il n'y avait pas vraiment d'entraîneurs attitrés spécifiquement à une équipe. Des gars comme Georges St-Pierre, Randy Couture, Mark DellaGrotte et Marc Laimon étaient là pour nous aider, mais comme on était un groupe de combattants déjà établis, personne n'était en charge d'une équipe en particulier.
Dans notre groupe, c'est Matt Serra qui a pris le plus d'initiative et qui est devenu notre leader, notre coach en quelque sorte. L'équipe dont je faisais partie avec notamment Serra, Shonie Carter, Chris Lytle et Scott Smith s'en était très bien sortie. On avait gagné sept des huit combats préliminaires et nos succès s'étaient poursuivis jusqu'en finale. Chez les mi-moyens, Serra avait battu Lytle pour obtenir un combat de championnat du monde contre Georges tandis que chez les moyens, je m'étais incliné devant Travis Lutter, qui a gagné le droit d'affronter Anderson Silva.
Les deux victoires que j'ai obtenues dans le cadre de l'émission - contre Jorge Rivera et Edwin DeWees - ne sont peut-être pas compilées à ma fiche, mais elles comptaient quand même beaucoup pour moi. À l'époque, ces deux gars-là étaient bien cotés dans la division et ma confiance avait été gonflée par mes performances contre eux.
Malgré tout, j'avais maintenant une fiche de 0-4 au UFC. C'était un peu déprimant, mais j'ai changé beaucoup de choses dans mon entraînement à partir de ce moment. J'ai commencé une association avec DellaGrotte, avec qui j'avais développé une bonne relation lors du tournage de la téléréalité, et il m'a aidé à apporter quelques bons ajustements à ma routine. Je ne le savais pas encore, mais de belles choses allaient découler de ce remue-ménage.
Je suis remonté dans l'octogone deux mois seulement après ma défaite contre Lutter, au UFC 67. J'étais opposé à Scott Smith, qui était devenu un bon ami à TUF 4. Pour cette raison, ça a été un peu bizarre de me battre contre lui, mais on comprenait tous les deux qu'on devait passer en mode business pendant 15 minutes. Je l'ai dominé pendant trois rounds pour finalement savourer ma vraie première victoire au UFC. Du jour au lendemain, j'avais une tonne de pression en moins sur les épaules.
Il y avait quand même loin de la coupe aux lèvres. Même si je venais de gagner, le UFC m'a demandé de retourner me faire la main dans une autre organisation. Je me suis donc fait une place sur la carte du TKO 29, où j'ai battu Jason Day en quatre minutes pour gagner le titre des poids moyens de l'organisation. La machine était partie!
Victoire contre Kendall Grove au UFC 74, puis autre victoire dans la demi-finale du Ultimate Fight Night 12 aux dépens de Drew McFedries, chaque fois par K.-O. au premier round. J'ai ensuite été placé dans le co-main event du UFC 86 face à Ricardo Almeida, contre qui j'ai mis la main sur l'une des victoires les plus satisfaisantes de mon parcours professionnel.
Contre ce Brésilien ceinture noire en JJB et six fois champion du monde de la discipline, j'ai prouvé que je n'étais pas seulement un gars qui pouvait se battre debout. J'ai été capable de repousser plusieurs de ses tentatives de projections et de me relever lorsqu'il réussissait à m'amener au sol.
J'ai gagné le combat par décision pour enfin voir se présenter à moi l'opportunité qui m'avait glissé entre les doigts un an et demi plus tôt : après avoir fait un grand détour, j'étais maintenant l'aspirant numéro un au titre d'Anderson Silva.
La chance d'une vie
Silva m'a battu après 39 secondes du troisième round d'un combat prévu pour cinq.
Quand je l'ai affronté, il venait de gagner ses sept premiers combats avec le UFC et personne n'avait réussi à l'amener au troisième round. Ce n'est donc pas un hasard si, quand la caméra s'est allumée devant moi entre la deuxième et la troisième reprise, j'ai indiqué le chiffre « 3 » avec mes doigts. Je voulais signifier à tout le monde que je venais de réussir ce que personne n'avait pu accomplir avant moi.
Mon apparente confiance était toutefois trompeuse. Pendant que je me préparais à sortir de mon coin, je savais pertinemment que mon genou était complètement fini. Vers la fin du deuxième round, j'avais envoyé un coup de pied que Silva avait bloqué à 50%, L'autre moitié de ma jambe, elle, a lâché. À partir de ce moment, aussitôt que je mettais du poids sur ma jambe, je sentais mon genou disloquer. Ma jambe arrière était vraiment devenue instable.
Dans mon coin après le deuxième round, j'ai fait connaître ma condition à mon entraîneur, qui m'a demandé si je voulais continuer. Je lui ai répondu que tant qu'à être là, j'allais au moins aller essayer quelque chose. Mon plan était d'essayer de rentrer à l'intérieur pour travailler la lutte, mais aussitôt que j'ai mis mon poids sur la jambe, c'était la fin. J'ai essayé de me relever, mais je n'étais plus capable.
Plusieurs personnes m'ont critiqué et ont mis ma volonté en doute parce que je suis sorti de l'octogone sur mes deux jambes ce soir-là. Mais il faut comprendre que lorsque tu te brises un ligament, la douleur est intense pendant 30 secondes et ensuite, tu ne sens plus rien. Mais ton genou ne tient plus sur grand-chose. Tant et aussi longtemps que tu marches droit, tout va bien, mais au moindre petit pivot, ça débarque. Croyez-moi, je ne voulais être nulle part ailleurs que dans un octogone avec Anderson Silva ce soir-là...
Dans le sport que je pratique, l'obtention d'un combat de championnat du monde est l'échelon le plus élevé que l'on puisse atteindre à moins, bien sûr, que l'on soit déjà champion. C'est le rêve de tout combattant, encore plus au UFC, et peu importe ce qui m'arrive à partir d'aujourd'hui, je pourrai toujours dire que je l'ai eu, ce moment-là.
J'ai dû attendre 18 mois avant de revenir sur mes deux jambes. Mon grand retour s'est fait au UFC 113, au Centre Bell, contre Alan Belcher. Plusieurs personnes se demandaient pourquoi j'avais choisi un adversaire aussi coriace après une longue absence, mais c'est exactement ce que je voulais. Je me sentais bien, j'étais en parfaite forme physique et je voulais me frotter à un gros nom en partant.
Ça m'a pris du temps avant de commencer le combat. J'ai eu de la difficulté à embrayer dans les 90 premières secondes, mais une fois que j'ai été capable de mettre l'interrupteur à « ON », je me sentais dans mon élément. Je l'ai amené au sol, j'ai facilement passé sa garde et j'ai fait une tentative de kimura qui a malheureusement échoué de justesse. Au deuxième round, j'ai commencé à trouver ma distance avec mes poings et je sentais que je pouvais aussi le dominer debout.
J'ai ensuite fait une petite erreur, c'est vrai, en laissant mon cou à sa portée, mais jamais je ne m'attendais à ce qu'il me lève et me fasse la descente du marteau pilon. Ça m'a fait perdre la carte pendant quelques secondes et ça lui a permis de me passer la soumission gagnante. Oui, la tactique était controversée et au bord de la légalité, mais je crois que ce qui me met le plus en furie dans tout ça, c'est qu'il a touché le bonus de 60 000$ pour la soumission de la soirée. Celle-là, je l'ai avalée de travers!
Finalement, en octobre dernier, j'ai subi une malheureuse défaite contre Tom Lawlor, signant une fois de plus mon arrêt de mort avec le UFC. Aujourd'hui, je suis de retour à la case départ, j'ai une boule de feu dans le ventre et j'ai la ferme intention de remonter une à une les marches qui mènent vers les sommets que j'ai déjà visités.
Je vous invite à suivre mon cheminement au cours des prochains mois, des prochaines années. Et si vous avez des questions par rapport au monde des arts martiaux mixtes, c'est l'endroit idéal pour les poser.
À bientôt!
*Propos recueillis par Nicolas Landry.