FRISCO, Texas – Est-ce Sergey Kovalev qui a su se réinventer ou ne serait-ce plutôt pas Eleider Alvarez qui a livré une contre-performance notoire pour expliquer sa déconfiture à sa première défense de sa ceinture des poids mi-lourds de la WBO présentée samedi soir à Frisco, au Texas?

 

Les amateurs risquent de débattre longtemps pour répondre à cette question, mais l’entraîneur du Montréalais d’origine colombienne, Marc Ramsay, est convaincu que ce n’est pas l’aspirant russe qui s’est signalé pour se sauver avec la victoire obtenue par décision unanime des juges.

 

« Je n’ai pas trouvé Kovalev [samedi] soir plus fort qu’il ne l’était à Atlantic City [en août dernier], a lancé Ramsay en mêlée de presse après la défaite de son protégé dans les coulisses du Ford Center at The Star. Kovalev avait tendance à se déplacer avec son jab, à garder sa tête un peu plus à sa droite et à se décaler vers la gauche, ce qui empêchait Eleider de placer son jab en bas et sa droite en haut.  Mais ce n’était rien de majeur, rien d’insurmontable.

 

« Il n’a tout simplement pas été assez actif. Il a connu quelques bons moments ici et là dans le combat, il aurait fallu qu’il répète ça une bonne dizaine de fois par round. Il ne lançait pas assez de coups de poing. Il y a des soirs comme ça et c’est très difficile à expliquer. Il va falloir analyser ça beaucoup plus profondément, puisqu’il avait connu un bien meilleur camp d’entraînement. »

 

Selon les données compilées par CompuBox, Alvarez n’a lancé que 369 coups pendant tout le combat, alors qu’il avait tentés 251 en l’espace de 7 rounds en août dernier. À l’opposé, Kovalev a lancé 816 coups contre 339 en août. Nul besoin d’avoir un lien de parenté obscur avec John Nash pour comprendre que le champion a laissé l’aspirant travaillé à sa guise pendant le duel.

 

« J’ai changé la stratégie : c’est certain que je voulais lui passer le knock-out, a reconnu Alvarez en réponse aux questions des journalistes québécois présents. Il a lancé beaucoup de coups, ç’a été un combat très serré, mais comme je l’ai mentionné ensuite sur le ring, je n’ai pas d’excuses. »

 

« Kovalev a été meilleur, a ajouté le promoteur Yvon Michel. Il était bien préparé et au lieu de tenter le coup de circuit comme il le faisait avant, il a laissé aller ses mains. Eleider n’a pas suivi son plan de match et avait peut-être une mauvaise perception des choses. Il va sûrement finir par comprendre, parce que pendant tout le combat, il n’a pas été en mesure de s’ajuster.

 

« En répartissant ses énergies, Kovalev avait évidemment moins d’intensité, mais Eleider n’a pas été intense en lançant aussi peu souvent. Eleider ne l’a jamais mis en danger. Au premier combat, tous les jabs d’Eleider lui faisaient mal. Cette fois, son jab n’était pas aussi incisif et il n’y avait rien derrière pour l’appuyer. Mais ce n’est pas dramatique, il va finir par apprendre. »

 

Si Alvarez a donné par moments l’impression de suivre la même stratégie qui lui avait permis de surprendre Kovalev au premier combat, Ramsay a confirmé que ce n’était pas du tout l’intention de départ. Au contraire, il souhaitait voir son protégé mettre beaucoup de pression rapidement.

« C'est très difficile à expliquer »

 

« J’aurais aimé le voir plus en jambes et utiliser sa vitesse et ses combinaisons, surtout pendant les trois ou quatre premiers rounds, a expliqué l’entraîneur. Il avait l’occasion de lui faire mal en début de combat parce qu’il y avait peut-être encore des doutes dans la tête de Kovalev. C’était important de le mettre à sa place avant de l’attaquer vers le quatrième ou le cinquième round.

 

« Mais dès le deuxième round, Eleider m’a dit qu’il était plus confortable en restant statique. Il n’avait pas les jambes aussi vigoureuses qu’au premier combat et il s’est battu avec ça toute la soirée. Il n’y avait pas beaucoup de contre-attaques et trop peu de combinaisons, alors ç’a été très peu efficace. La défense était bien, il travaillait bien, mais ne travaillait pas suffisamment. »

 

Dramatique ou pas?

 

Au-delà du lucratif contrat de sept combats avec ESPN qui lui a glissé entre les doigts, personne ne s’entend vraiment sur les conséquences de cette défaite pour Alvarez. Pourtant, Michel évoquait plus tôt cette semaine qu’elle constituerait un très important recul pour sa carrière.

 

« C’est un bon pas de recul, mais Eleider a déjà connu des défaites dans les rangs amateurs et il a été en mesure de revenir et même de devenir champion du monde, a rappelé Ramsay. Il n’y a rien qui l’empêche de refaire le même cheminement. C’est juste de recommencer le travail. »

« Il n'y a pas d'excuse »

 

« Dans l’entente avec ESPN, Eleider a un combat filet qu’il peut demander n’importe quand et une victoire le ramènerait, donc ce n’est rien de dramatique, a précisé Michel. Je suis convaincu qu’il pourrait retourner en championnat du monde cette année : les autres champions voudront voir ce qu’ils peuvent faire contre lui. Il ne s’est pas fait passer le knock-out ou fait déclasser. »

 

À ce stade-ci, il est peut-être important de souligner qu’Alvarez a attendu deux ans et demi avant d’obtenir sa chance en championnat du monde, même s’il était aspirant obligatoire. Il est acquis que personne ne lui fera de cadeau, étant donné qu’il a les habiletés pour l’emporter.

 

Que s'est-il passé avec Eleider Alvarez?

 

« Kovalev a été meilleur »
« Ce n'était pas flamboyant. C'était la base. »
« Je veux affronter les autres champions »