MONTRÉAL – Efe Ajagba, Ivan Dychko, Filip Hrgovic, Bakhodir Jalolov, Joe Joyce, Tony Yoka : la prochaine génération de poids lourds qui parfait son apprentissage dans les rangs professionnels depuis les Jeux olympiques de Rio en 2016 est particulièrement impressionnante.

 

À ce groupe, il faut évidemment ajouter Daniel Dubois et Arslanbek Makhmudov, qui laissent croire que la relève derrière les Anthony Joshua, Tyson Fury et Deontay Wilder de ce monde est assurée et que la catégorie reine de la boxe conservera ses lettres de noblesse un temps perdu.

 

Si Ajagba, Dubois et Joyce ont déjà eu l’occasion de se faire voir sur les plus grandes scènes grâce à leur association avec les promoteurs les plus en vue de la planète, ce n’est pas exactement le cas de Makhmudov, qui a choisi Eye of the Tiger Management et le Québec comme tremplin.

 

Mais ce n’est pas parce que le Russe originaire d’Ossétie-du-Nord-Alanie a confié la destinée de sa carrière à l’entraîneur Marc Ramsay et au promoteur Camille Estephan que ses chances de réussites se sont amenuisées, s’il faut en croire ces deux derniers lorsqu’interrogés à ce sujet.

 

« C’est une véritable jungle, a avoué Estephan à RDS.ca la semaine dernière en marge des deux galas qu’il a organisés le 16 mars au Cabaret du Casino de Montréal. Les profits potentiels sont tellement énormes que tout le monde veut avoir son as. À mon avis, nous avons le meilleur!

 

« Il faut se rappeler que mon premier boxeur était Bermane Stiverne, alors mon équipe et moi avons appris beaucoup de choses. Le monde des poids lourds, c’est différent. Même les négociations sont différentes. Pour les fédérations, ce sont les champions des champions... »

 

« Je n’ai aucun complexe d’infériorité par rapport aux autres boxeurs ou aux autres promoteurs, a ajouté Ramsay avec son franc-parler habituel. Je sais que Camille n’hésitera jamais à faire les associations qu’il aura à faire quand ça sera le temps d’aider tous ses boxeurs à progresser. »

 

Dans le cas de Makhmudov, le coach a déjà obtenu carte blanche d’Estephan afin d’utiliser toute son expertise pour aider le poids lourd à développer son immense potentiel, surtout en amont.

 

« Je suis vraiment impressionné par le support de Camille, a confié Ramsay. Arslanbek était dans des combats de quatre rounds et Camille me laisse faire ce que j’avais à faire pour son évolution. Je me rappelle d’un combat où Oscar [Rivas] et Simon [Kean] n’étaient pas libres et il m’avait dit qu’il n’y avait pas de limites. Je pouvais faire venir les partenaires d’entraînement que je voulais.

 

« Pour son dernier combat [contre Avery Gibson], qui était seulement prévu pour huit rounds, il y avait deux partenaires d’entraînement américains. On parle d’un investissement de dix ou douze mille dollars. C’est énorme, mais ça fera toute une différence dans quelques années. Ça en fait déjà une maintenant, car Arslanbek relève tous ses défis avec énormément de facilité. »

 

Celui qui a mené Jean Pascal, David Lemieux, Artur Beterbiev et Eleider Alvarez à la conquête de titres mondiaux n’est toutefois pas prompt à passer en deuxième vitesse avec le développement de Makhmudov, même si ce dernier a enregistré six de ses sept victoires dès le premier round.

 

À titre comparatif, le champion du WBC Deontay Wilder – médaillé de bronze aux Jeux de Pékin en 2008 – a remporté 10 de ses 12 premiers duels au 1er round et a dû patienter jusqu’à sa 33e sortie avant d’atteindre le 5e round. Il s’agissait de sa victoire par décision unanime sur Stiverne qui lui a permis de s’emparer de la ceinture qu’il défendra pour la 9e fois le 18 mai prochain.

 

« Je veux m’assurer que le jour où il va tomber dans un huit rounds, qu’il soit confortable avec ça, a expliqué Ramsay. Je ne suis pas inquiet, parce que je le vois tous les jours dans le gymnase, mais il va devoir le vivre en compétition. Mais je ne suis pas du tout inquiet, ça va venir un jour.

 

« Rappelez-vous, tout le monde disait la même chose de Beterbiev. Il a fini par se retrouver dans un douze rounds (contre Enrico Kölling dans un choc pour le titre vacant des mi-lourds de l’IBF, NDLR) et il avait extrêmement bien réagi. Il n’y a donc aucun intérêt à aller trop rapidement. »

 

Mais comme Ramsay aime bien le répéter, il a le luxe d’être patient avec un athlète du calibre de Makhmudov. « Il est encore désorganisé techniquement, mais ça demeure du fine tuning. »