À la veille de ce match tant attendu par les amateurs de boxe, on a eu droit à des menaces, des défis, des blasphèmes, des empoignades et quoi encore... Les deux pugilistes ont si bien joué leur rôle d’avant-match que la Commission athlétique du Nevada a refusé leur face-à-face lors de la pesée officielle.

Finies les bravades des derniers jours, empruntées à la lutte pour mousser la popularité de l’affrontement. Maintenant, c’est le temps de présenter le 13e round de cet affrontement. Et souhaitons de tout cœur que cette fois, le verdict ne soit pas nul.

Tout comme vous, j’ai hâte que la parade de mode des deux pugilistes de samedi soir prochain prenne fin et qu’on change les costumes d’Halloween pour des gants de boxe. Parfois, on dirait un concours pour savoir qui ressemblera le plus à l’infâme Joker, de la série Batman.

Cela fait maintenant près de 400 jours que les deux hommes se sont affrontés et rares sont ceux, à ce jour, qui sont pleinement satisfaits du résultat.

Plusieurs prétendent que Wilder aurait dû être proclamé vainqueur par knock-out lors du premier duel. D’autres soutiennent que Fury aurait dû être couronné champion à la suite d’une décision des juges.

Donc, cet argument dure toujours depuis le 1 décembre 2018. Les deux pugilistes ne sont pas demeurés inactifs durant ce temps. Fury s’est mesuré à deux zombies et Wilder a battu deux plombiers.

Disons que la compétition a été plus forte chez Wilder, notamment contre Luis Ortiz, mais les résultats ont été les mêmes. Deux victoires par knock-out, dont cette mise hors de combat dès le premier round contre Dominic Breazeale.

Il ne fait aucun doute que Wilder est un cogneur plus puissant que Fury. Or, si le géant britannique veut remporter la victoire, il lui faudra absolument boxer intelligemment et attendre les opportunités. Une chose est certaine, il devra faire mieux que lors de son match contre Otto Wallin, alors qu’il avait subi une vilaine coupure à l’œil droit.

Parlant de cette entaille qui avait nécessité plus de 40 points de suture, on peut se demander si elle résistera aux nombreux coups de puissance de Wilder?

Une trilogie

Dans le fond, il ne faut pas trop s’en faire avec le gagnant. Que ce soit l’un ou l’autre, il y aura une trilogie entre les deux. C’est Wilder lui-même qui l’a annoncée. Il n’est pas question que le gagnant se mesure à Anthony Joshua, le titulaire des trois autres titres chez les lourds, n’en déplaise aux amateurs qui voudraient bien voir les trois meilleurs poids lourds au monde s’affronter tour à tour. D’ailleurs, Fury n’a pas manqué d’emboîter le pas en voulant une trilogie lui aussi.

Si vous voulez un bon conseil, suivez celui du champion émérite Manny Pacquiao. « Ne gagez jamais contre un puissant cogneur », soutient-il avec raison.

Le « Pacman » n’est pas le seul à croire que Wilder va conserver son titre du WBC. Sugar Ray Leonard, Tommy Hearns, Evander Holyfield, Shawn Porter, Larry Holmes, Adam Kownacki, Keith Thurman, Mikey Garcia, Jermall Charlo, David Benavidez et Anthony Dirrell, pour ne nommer que ceux-là, sont du même avis et favorisent tous le Bombardier bronzé pour éclipser le roi des Gypsies.

La carrière professionnelle de Wilder a commencé en 2008 après avoir remporté la médaille de bronze aux Jeux olympiques de Beijing, en Chine. Depuis ce 15 novembre 2008, il a livré 43 combats. Il en a gagné 42 et seulement deux hommes sont parvenus à rester debout devant lui pendant douze assauts. Ce sont Bermane Stiverne, en janvier 2015, et Tyson Fury, en décembre 2018. Tous les autres n’ont jamais entendu le dernier son de cloche.

Sain d’esprit ou non

Par moment, je me demande si Fury est sain d’esprit ou s’il joue la comédie. Ses paroles ne sont pas toujours celles d’un homme qui a tous ses neurones à la bonne place dans sa boîte crânienne.

Un homme normal, un père de famille de cinq enfants, ne fait pas des déclarations comme celle de Fury à BoxingScene le 18 février dernier sous le titre : « Après ce combat, je vais me faire plein de cocaïne et de prostitués ». Et il a ajouté : « Je me masturbe sept fois par jour pour accroître mon taux de testostérone. Je me livre au sexe oral et je me trempe les mains dans l’essence pour ainsi augmenter mes chances de gagner par knock-out. »

Ce ne sont pas là les paroles d’un homme normal. Certainement pas celles d’un père de famille dont l’épouse a donné naissance à un cinquième enfant en mars de l’an dernier. Peut-être peut-il tenir de tels propos avec des amis, mais certainement pas en public.

Je me rallie à la plupart des experts qui croient que Wilder va poursuivre sa série de succès. Je ne crois pas que Fury puisse tenir sa promesse de passer le knock-out à Wilder dès le deuxième round.

Le meilleur arbitre

Si jamais la blessure à l’œil droit de Fury, subie contre l’Allemand Wallin au 4e engagement de leur match, devait rouvrir, c’est à l’arbitre Kenny Bayless, cette fois, à qui reviendrait la possibilité de le laisser continuer ou non.

Dans ce match contre Wallin, Fury a subi une vilaine entaille à l’œil droit au quatrième engagement, gracieuseté d’un dur crochet de la gauche de son rival.

Tony Weeks, l’arbitre de cette rencontre, a songé à mettre un terme au combat, mais il a laissé faire en respectant le diagnostic du médecin de la Commission athlétique. À la fin des douze assauts, son chemisier était tout teinté de sang tellement la blessure saignait.

Bayless n’est pas reconnu comme le meilleur arbitre pour rien par la communauté des experts. C’est un vétéran de 791 combats dont les plus importants ont été DelaHoya c. Mayweather, Miguel Cotto c. Antonio Margarito, Pacquiao c. Cotto, « Canelo » c. Golovkin et Mayweather c. Pacquiao, pour ne nommer que ceux-là.

Contrairement à Weeks, Bayless est vite sur la gâchette. On prétend qu’il a tendance à favoriser les boxeurs dont le Q.I. du ring est supérieur à celui des bagarreurs.

Si Bayless avait été l’arbitre à la place de Jack Reiss dans le premier match entre les deux géants, on croit qu’il n’aurait jamais laissé Fury continuer après avoir visité le tapis en toute fin de combat. Il aurait soulevé le bras de Wilder et l’aurait déclaré vainqueur.

Quinze secondes au lieu de neuf

Reiss n’est pas dans le même moule que Bayless. Il est reconnu surtout pour la protection du boxeur. Il a donné près de 15 secondes à Fury pour reprendre ses sens au 12e engagement. Et selon les règlements, il avait totalement raison.

On peut revoir sur YouTube sa performance surtout lors de la chute de Fury au 12e engagement. Il regarde le blessé droit dans les yeux et compte les 9 secondes.

Reiss s’est agenouillé au-dessus de Fury. Il voyait ses yeux clairement. Selon lui, ils étaient clairs. Lorsque le géant s’est relevé au compte de 9, il lui a demandé de marcher vers la gauche puis vers la droite et enfin, il lui a permis de continuer. Plusieurs autres arbitres, moins expérimentés auraient tout simplement mis fin au match et accordé la victoire à Wilder par arrêt de l’arbitre.

Reiss avait bon œil, puisqu’après sa chute au tapis au dernier round, Fury a repris ses sens et est revenu plus fort que jamais en assénant quelques bons coups à la tête du champion.

Par contre, on ne peut pas blâmer Wilder de croire dur comme fer qu’il a gagné la première rencontre. Cette fois, il a juré que Fury ne se relèverait pas.

À la télé payante

Combien de gens vont acheter le combat à la télé payante? Si je me fie au promoteur Bob Arum, il devrait y avoir au moins deux millions d’acheteurs. C’est beaucoup. C’est six fois le nombre d’acheteurs de la première bataille. Lors de leur affrontement du 1er décembre 2018, seulement 325 000 foyers s’étaient porté acquéreurs de la retransmission.

Arum a du cran de croire à deux millions de téléspectateurs. Dans l’histoire de la boxe, seulement quatre galas payants ont dépassé les deux millions d’amateurs et tous mettaient en vedette nul autre que Floyd Mayweather fils.

Quant à la garantie salariale, elle est la même pour les deux antagonistes. Chacun se voit garantir 28 millions $ et une part des profits de la télé payante venant des réseaux ESPN et Fox, qui ont uni leurs efforts pour présenter ce gala.

Si vous êtes pour vous gaver d’ailes de poulet pendant ce combat, commandez-les bien avant le début des hostilités, car le match ne devrait pas durer longtemps.

Prédiction : Wilder par K.-O. avant le 6e round

Bonne boxe!