QUÉBEC - « J’ai repoussé beaucoup trop de fois mes limites et je ne devrais même pas être ici pour en parler. Je me suis souvent retrouvé dans des situations très dangereuses. Quand je repense aux choses que j’ai faites dans le passé, je m’estime chanceux d’être encore en vie. »

Adam Braidwood revient de loin. L’ancien plaqueur défensif des Eskimos d’Edmonton semblait pourtant promis à une belle carrière, après avoir été sélectionné au premier rang du repêchage des joueurs canadiens en 2006 à la suite de son passage avec l’Université Washington State.

Mais les blessures ont bouleversé à jamais le cours de son existence et une série de mauvaises décisions l’ont ensuite conduit entre les barreaux, après avoir été notamment condamné à quatre ans et demi de prison en avril 2013 pour agression sexuelle sur son ancienne petite amie.

Braidwood le reconnaît aujourd’hui sans détour, il n’a que lui à blâmer pour son exclusion du sport qu’il aimait tant. Deux graves blessures à un genou l’ont incité à abuser des antidouleurs, puis à consommer de la cocaïne sans modération avant de complètement perdre le contrôle.

« J’ai été blessé et je n’arrivais tout simplement pas à dealer avec cela, a reconnu, mercredi, l’athlète âgé de 32 ans en marge de la conférence de presse faisant la promotion de la sous-carte du gala qui mettra en vedette Lucian Bute et Eleider Alvarez vendredi soir à Québec.

« Avec mes problèmes de santé mentale et de drogue, je n’ai jamais pensé une seconde aller demander de l’aide. J’avais consciemment décidé de baisser les bras. Si j’avais demandé de l’aide, probablement rien de tout cela ne serait arrivé. C’est pourquoi j’en parle ouvertement. »

Passionné de sports de combat depuis toujours, Braidwood avait eu le temps de disputer un duel d’arts martiaux mixtes et deux de boxe professionnelle alors qu’il évoluait toujours dans la Ligue canadienne de football. Ce n’est donc pas totalement une surprise s’il s’est tourné vers la boxe professionnelle à sa sortie du pénitencier et qu’il y consacre maintenant tout son temps.

« Les arts martiaux mixtes et la boxe m’ont sauvé la vie, admet celui qui gagne également sa vie comme menuisier. Le monde des arts martiaux mixtes est très respectueux et il m’a accueilli à bras ouverts. J’ai toujours aimé être dans le gymnase et toujours beaucoup aimé m’entraîner.

« J’avais eu l’occasion d’essayer les arts martiaux mixtes et la boxe pendant la saison morte au football, mais je n’avais jamais vraiment pris cela très au sérieux parce que je jouais toujours au football. Sauf qu’avec tout ce qui est arrivé, j’ai enfin pu sauter à pieds joints dans la boxe. »

Depuis son retour « aux affaires » en décembre 2015, Braidwood a remporté ses cinq combats, dont quatre avant la limite, et est même parvenu à venger la seule défaite qu’il avait subie au début de sa carrière en passant le knock-out à Lee Mein au premier round à sa dernière sortie.

C’est ainsi qu’il affrontera Éric Martel-Bahoeli vendredi soir au Centre Vidéotron dans un combat pour le titre vacant des poids lourds de la World Boxing Union (WBU). Même s’il s’agit d’un organisme de sanction de deuxième ordre, Braidwood ne s’en soucie guère et voit plutôt l’occasion de devenir champion du monde comme un formidable cadeau venu du ciel.

« Je le répète à tout le monde tout le temps : je ne mérite pas ce qui m’arrive, mais je m’assure d’aller au bout de chaque opportunité qui se présente à moi, explique le pugiliste originaire de la Colombie-Britannique. Je suis très chanceux d’être entouré de gens qui se soucient de moi.

« Je suis conscient que je profite d’opportunités qui ne se sont jamais présentées à d’autres. Je suis très humble là-dedans et c’est pourquoi vous ne me verrez jamais dénigrer ou insulter mes adversaires. Je suis extrêmement respectueux, car je sais ce que c’est que de tout perdre. »

Braidwood sait pertinemment que le défi sera de taille. Il ne compte que 12 petits rounds d’expérience en sept combats et son duel le plus long a été de 4 rounds. À l’opposé, Martel-Bahoeli a déjà livré 88 rounds en 18 sorties et a évidemment eu une opposition nettement plus relevée.

« Quand j’ai été appelé pour ce combat, je me suis dit que je ne pouvais pas du tout passer à côté de cette opportunité. Se battre sur une carte organisée par Yvon Michel, c’est quand même gros!, explique l’ex-footballeur. À la limite, je me foutais un peu contre qui j’allais me battre!

« Mais Éric est très bon. Il est explosif, tough et s’est battu contre un gars qui est ensuite devenu champion du monde. Sauf qu’il s’agit de la seule véritable façon d’apprendre. Si vous regardez mon parcours, vous remarquerez extrêmement rapidement que je n’évite aucun adversaire. »

Au final, Braidwood entend aller jusqu’où la boxe voudra bien le mener, mais chose certaine, il entend se battre avec l’énergie du désespoir, question de respect pour ceux qui ne l’ont jamais abandonné et qui ont accepté de lui accorder une deuxième chance qu’il n’espérait même pas.