Les mots « destruction, demain soir destruction» risquent de passer à l’histoire. Dans 15–20 ans, lorsque viendra le temps de se remémorer la bataille entre nos deux anciens champions du monde, on se rappellera aussi de la prophétie de Bute lancée après la pesée, et ce peu importe le dénouement du combat de samedi. Imaginez si Bute réussit à détruire Jean Pascal. Imaginez maintenant le scénario inverse, et la portée qu’auront eu les mots de Bute. Bref le mot «destruction » fait maintenant partie de la petite histoire de la boxe québécoise.

Un autre élément fait aussi partie de la petite histoire de la boxe québécoise, et c’est le ruban adhésif que Jean Pascal a appliqué sur sa gueu… pardon, sa bouche. Sachez que l’inspiration est venue de Russ Anber, quelques instants auparavant, lorsqu’il a tout bonnement vu une roulette de « duct tape». L’image était forte et marquante. Bref, un éclair de génie.

Cette pesée fort populaire, qui s’est déroulée dans une ambiance survolté devant plus d’une centaine de personnes a mis un terme à une bonne semaine de promotion, dont le point faible aura peut-être été la conférence de presse, qui a été un signe que les boxeurs avaient passé beaucoup trop de temps à parler, et qu‘ils n‘avaient absolument rien de neuf à nous dire.

Lundi et mardi, les entraînements respectifs de Bute et Pascal au Complexe Desjardins ont été des succès populaires, médiatiques, et même promotionnels et même propagandistes. Ma référence à la propagande fait référence au message que chacun des clans a tenu à véhiculer. Ces messages ont été livrés à merveille par les deux boxeurs, avec énormément d‘aplomb et de conviction dans la voix, le propos et dans les yeux.

La dernière impression que je retiens des deux boxeurs est celle de deux guerriers en très bonne forme, extrêmement motivés, et qui n’ont pas froid aux yeux. Pascal est prêt à affronter la foule majoritairement hostile. Il en a eu un avant-goût lors de la pesée et il a longuement défié les amateurs d’un regard dur. Et l’expression peu convainquante de Bute lors de la conférence de presse a laissé place à un faciès défiant remarqué par tous lors de la pesée.

Le combat

Maintenant que les dés sont joués, voici les facteurs que j’aurai en tête lorsque le combat se mettra en branle.

Mon entrevue avec l‘entraîneur Mike Moffa m‘a grandement éclairé sur la manière d‘aborder le combat. L’importance d’utiliser le jab et de réduire la distance pour Pascal. Un Bute qui doit marquer avec la contre-attaque rapide, dévastatrice et précise. Mais même s‘il parvient à atteindre Pascal, est-ce que ce dernier s‘effondrera? Jean Pascal est solide, il n‘a jamais été au plancher. Et comment se débrouillera Pascal face au gaucher? Lors de son combat contre Chad Dawson, un gaucher, il est devenu grandement vulnérable quand l‘américain a commencé à utiliser son jab et à “boxer”. Bute doit s‘inspirer de ces moments.

Bute et Pascal sont deux boxeurs qui en sont à peu près au même point de leur carrière. Deux anciens champion, dans la jeune trentaine, avec sensiblement la même expérience tant en boxe amateure qu’en boxe professionnelle. Sur certains points, l’un à parfois l’avantage sur l’autre…

Vitesse: léger avantage Bute.

Technique: avantage Bute. Mais Pascal, l‘ancien olympien, n‘est pas un pied de céleri.

Tactique: égalité entre Larouche et Marc Ramsay

Capacité d‘encaisser: Pascal

Capacité à mettre de la pression: Pascal

Puissance: Pascal

Agressivité: Pascal

Condition physique: Jean Pascal, pour son association avec Angel Herredia qui a transformé Juan Manuel Marquez.

La question du poids sera aussi déterminante. «Une arme à double tranchant» selon Marc Ramsay, l’entraîneur de Jean Pascal. Ramsay estime que le poids de Pascal sera de 190 livres. Bute, qui était « gras » à 173,6, devrait peut-être boxer à 180 livres La question est de savoir si le scientifique Herredia aura su bien amalgamer la masse de Pascal sans affecter sa vitesse.

Je vous inviter à écouter mon entrevue avec Renan St-Juste où il fait le tour des atouts de chacun des boxeurs.

Que peut-il se passer d‘ici samedi 23 heures? Souhaitons qu‘il n‘y ait pas de test antidopage positif, de chicane irréconciliable, d‘accident ou de virus quelconque.

La suite pour Bute et Pascal

La beauté des choses, c‘est qu‘en plus du combat, nous pouvons spéculer sur la suite des événements pour Pascal et Bute, en cas de victoire comme en cas de défaite.

Voici les scénarios possibles…

Si Bute perd, ses options sont les suivantes…

1) La retraite s‘il s‘est fait dominer par Pascal.

2) Une revanche face à Pascal si la défaite est honorable. Et s‘il perd encore, retraite?

3) Une revanche face à Carl Froch si la défaite est honorable. Et s‘il perd encore, retraite?

Si Bute gagne, ses options sont les suivantes…

1) 2e combat contre Pascal, si Pascal le veut.

2) Revanche face à Carl Froch, au Québec. Si Bute bat Pascal, il peut battre Froch. Et s‘il peut battre Pascal et Froch, il peut aussi battre Andre Ward.

Si Pascal perd…

1) Ça va mal. Aucune victoire significative depuis août 2010, contre Chad Dawson.

2) Demande immédiatement sa revanche contre Bute.

3) Quitte le Groupe Yvon Michel?

4) tente de relancer sa carrière contre un Dawson dans la même situation, ou contre un autre boxeur pour un titre “facile”.

Si Pascal gagne…

1) Demande Hopkins, et parvient cette fois à le battre. Pascal met la main sur le titre IBF du boxeur de 49 ans et s‘enlève du chemin d‘Adonis Stevenson.

2) Accorde une revanche à Bute ou à Chad Dawson. S‘il les bat, il se mesure ensuite, en 2015 à Adonis Stevenson pour déterminer qui est le “boss” en ville.

Je vous souhaite une merveilleuse soirée de boxe.