Avant d’offrir mon pronostic en vue du combat revanche que se livreront Timothy Bradley et Manny Pacquiao en fin de semaine à Las Vegas, un retour dans le passé s’impose...

Lors du premier affrontement entre les deux pugilistes, le 9 juin 2012, Bradley n’avait pas la feuille de route pour nous inciter à croire qu’il avait des chances de sortir de l’arène avec sa fiche parfaite intacte. Il avait bien obtenu des victoires intéressantes sur Lamont Peterson, Devon Alexander et Kendall Holt, mais les combats suivants de chacun de ces boxeurs avaient prouvé qu’ils n’appartenaient pas au niveau ultime en boxe professionnelle. Bradley n’avait jamais vraiment vécu des combats qui l’avaient mis dans la misère, qui l’avaient obligé à puiser au plus profond de ses viscères pour se relever et finalement l’emporter.

À l’époque, on s’attendait tous à ce que Pacquiao prévale grâce à son intensité, son pouvoir offensif et son expérience des combats majeurs. Mais Bradley, malgré d’importantes blessures aux pieds, avait résisté aux charges de la véritable machine qui se dressait devant lui. La majorité des boxeurs se seraient écrasés et auraient abandonné, mais lui n’a jamais perdu confiance jusqu’au douzième round.

Je croyais, comme bien d’autres observateurs, que Pacquiao méritait de l’emporter lorsqu’il a été déclaré perdant par décision partagée. Mais néanmoins, ce soir-là, Timothy Bradley a posé les premières pierres de ce qui est devenu avec le temps une imposante citadelle.

Après cette soirée de première, les deux boxeurs ont continué leur route chacun de leur côté. Personne ne voulait entendre parler d’un combat revanche. Pacquiao a préféré faire un quatrième combat contre Juan Manuel Marquez, une option plus attrayante et, surtout, plus payante. Même si Bradley se retrouvait avec la ceinture de champion du monde, peu de gens étaient attirés par l’idée de le revoir dans le même ring que le Philippin.

C’est à ses deux combats suivants, contre Ruslan Provodnikov et Juan Manuel Marquez, qu’il nous a vraiment été permis de constater quelle était l’étoffe véritable de Tim Bradley.

Contre Provodnikov, le jeune Américain a été placé dans des situations extrêmement pénibles et a réussi à s’en sortir. Il a alors gagné beaucoup d’estime de la majorité des experts en boxe. On l’avait même comparé à Evander Holyfield pour sa capacité de refaire ses forces d’un round à l’autre et de surmonter les obstacles, de trouver les ressources nécessaires au moment où il était en état d’urgence.

Déjà, après sa victoire, la perception à son égard avait complètement changé. Ceux qui l’avaient auparavant qualifié de « fraudeur » disaient désormais qu’il était un « vrai ». On l’avait vraiment mal étiqueté. Contre Marquez, il a décroché la victoire sans trop de difficulté en imposant son style rapide axé sur ses qualités athlétiques, la défensive et la contre-attaque. Le vieux Mexicain n’avait jamais été vraiment capable de s’installer.

Pour Pacquiao, la suite n’a pas été si glorieuse. Marquez lui a passé un K.-O. brutal en six rounds, après quoi il a décidé de prendre une longue pause. Il a bien paru à son retour contre Brandon Rios, mais ce dernier était le boxeur parfait pour bien faire paraître Manny Pacquiao. Bagarreur, mais pas extrêmement rapide, ni très mobile. PacMan, dans ce combat, avait vraiment eu l’air du jeune coq qu’il était à ses meilleures années.

En regardant le parcours de chacun depuis ce soir de juin où leurs chemins se sont croisés, je suis surpris de voir que Pacquiao est établi comme favori. À mon avis, ce statut a une saveur sentimentale. Si on analyse froidement le récent parcours des deux hommes, en tenant compte du fait que finalement, Bradley n’a jamais perdu, je m’attends à ce que ce soit un combat très difficile pour l’aspirant.

Encore affamé?

Quoiqu’il advienne en fin de semaine, l’héritage de Pacquiao sur le monde de la boxe est assuré et une place l’attend déjà au Temple de la renommée de la boxe. Son nom est déjà inscrit à l’encre indélébile dans l’histoire de son sport.

On ne peut en dire autant de son adversaire, qui sera assurément le boxeur le plus affamé sur le ring du MGM Grand Garden Arena. Bradley peut aborder ce combat en se disant que lors du premier duel, il a été capable de s’en tirer et de survivre dans les pires des circonstances. Je suis convaincu qu’il est survolté et extrêmement confiant à l’approche du deuxième chapitre.

On avait senti Bradley nerveux et dépaysé dans les premiers rounds du tome initial, mais il possède maintenant l’expérience des méga-combats. Il n’animera jamais le spectacle comme Pacquiao peut le faire – il est beaucoup plus du style éteignoir que showman – mais il a les atouts pour rivaliser avec lui.

Pacquiao est un feu roulant offensif qui veut toujours en mettre plein la vue, mais Bradley sait comment contrôler cette énergie. Il est plus athlétique, très fort physiquement et possède une superbe défensive.  Il va tenter de ralentir le rythme, d’amener le combat au centre du ring, où il est confortable. Ça va être serré, peut-être un peu controversé, mais je m’attends à ce que Bradley remporte une décision.

Contrairement au premier opus, ce combat est maintenant très légitime et devrait être un bon vendeur. Si personne ne voulait revoir une reprise immédiatement après le premier choc, il ne fait pas de doute que Bradley est maintenant le meilleur adversaire pour Manny Pacquiao, à l’exception bien sûr de Floyd Mayweather.