Au cours des derniers jours, RDS a procédé à un sondage concernant l'unique champion de boxe en ville, Adonis Stevenson. La question sondage a été formulée comme suit : « Qui souhaiteriez-vous voir Adonis Stevenson affronter advenant une victoire contre Tony Bellew? »

Le sondage a produit un échantillonnage intéressant. Des 2 300 répondants, pas moins de 48 % ont choisi Carl Froch. On a opté à 19 % pour Bernard Hopkins et à 16 % seulement pour le gagnant du combat Pascal-Bute. Andre Ward (10 %) et Sergey Kovalev (7 %) ont été considérés dans une moindre mesure.

Comment faut-il interpréter cette réponse? Voudrait-on voir Stevenson affronter Froch parce qu'on aimerait constater ce qu'il pourrait faire de celui qui a déjà battu deux autres représentants québécois, Bute et Pascal? Est-ce que ça veut dire que Stevenson capte à ce point l'attention des amateurs qu'il a fini par donner une importance secondaire à la bataille longtemps attendue entre Pascal et Bute?

Les deux promoteurs de ce combat, Jean Bédard et Yvon Michel, réfutent tout de suite la seconde hypothèse.

« À la boxe, tu es toujours aussi bon que ton dernier combat, explique Bédard. Peut-être qu'on entretient encore des doutes au sujet de Lucian. Peut-être que Jean n'a pas été suffisamment impressionnant lors de son dernier combat. Ce résultat est probablement normal dans les circonstances, mais je vous invite à refaire le même sondage le 20 janvier prochain quand on connaîtra le gagnant entre ces deux-là. Ce sondage ne constitue pas une grande surprise pour moi. Il représente l'opinion publique en ce moment. »

Curieusement, une bataille Stevenson-Froch aurait pu avoir lieu bien avant que le combattant de samedi soir ne devienne une vedette instantanée à l'échelle internationale. En janvier dernier, quand Stevenson était l'aspirant obligatoire de Froch, les autorités de la IBF ont contacté Michel pour lui demander de procéder à un appel d'offres pour un combat qui aurait été présenté au Centre Bell en mars.

« Nous avons tout fait pour que le combat se réalise, rappelle le promoteur. Nous étions prêts à investir beaucoup d'argent pour amener Froch à Montréal. Nous avions amassé les ressources pour y parvenir. Malheureusement, une heure avant le dépôt de l'appel d'offres, la IBF nous a annoncé qu'elle avait plutôt choisi un combat pour l'unification des titres entre Froch et Mikkel Kessler. Il n'y a aucun doute dans notre esprit qu’Adonis aurait remporté ce combat. »

Stevenson est-il vraiment devenu le pôle d'attraction au Québec? On semble n'en avoir que pour lui, probablement avec raison. Les amateurs de boxe affectionnent ceux qui peuvent régulièrement passer le K.-O. à leurs adversaires. Or, Stevenson est le boxeur le plus puissant que le Québec ait connu. Ses 12 derniers combats ont été remportés par K.-O. On ne devient pas champion du monde en 76 secondes sans avoir une matraque à la place des poings.

Michel analyse la situation d'une façon réaliste. « Je pense que la notoriété de Pascal et de Bute est supérieure à celle d'Adonis, dit-il. Adonis est champion depuis moins de six mois. Toutefois, il a tout un potentiel. Il est le boxeur du Québec qui jouit de la plus belle réputation internationale. Dans le passé, HBO était venu quatre fois au Québec. Pour Adonis seulement, le réseau est venu ici trois fois en six mois. »

Quand on allumera des feux

Les deux promoteurs sont convaincus d'une chose. Même si Stevenson capte énormément l'attention des amateurs, cela n'aura pas de conséquences négatives sur la vente des billets pour le prochain événement Bute-Pascal. En ce moment, on est à quatre ou cinq mille billets d'une salle comble. On ne doute pas qu'une fois le combat Stevenson-Bellew passé, le public s'intéressera à ce combat dont l'issue est très attendue.

On n'a fait aucune promotion récente en regard de ce combat pour une raison évidente. Se placer en travers de la soirée que s'apprête à vivre Stevenson ne servirait personne et constituerait un manque de respect envers le champion. Michel ne doute pas qu'une fois la machine de marketing en marche, Pascal et Bute se battront à guichets fermés.

Bédard dit sensiblement la même chose, mais d'une façon plus colorée. « Attendez dans le temps des Fêtes quand on allumera des feux et que Pascal se mettra à crier et à chialer », souligne-t-il en souriant. Nous avons aussi planifié une sous-carte intéressante que nous communiquerons incessamment. »

De leur côté, les deux boxeurs auront tout intérêt à mousser cette bataille parce que si 5 000 billets restaient invendus, cela influencerait le montant des bourses qu'on leur a promises. Je pense qu'on peut compter sur la personnalité forte et controversée de Pascal pour attirer les réflecteurs sur lui et sur son rival d'ici là.

Le prochain adversaire

La boxe, c'est la boxe. Tout peut arriver, mais peu d'observateurs doutent que Stevenson sorte perdant de sa prochaine bataille. Il est donc normal que les amateurs cherchent dès maintenant à connaître l'identité de son prochain rival, même si, rappelons-le, une clause de revanche est rattachée au combat que se livreront Pascal et Bute. Toutefois, le gagnant ne sera pas tenu d'accorder cette revanche immédiatement. Il pourrait décider de se mesurer d'abord à Stevenson, à Froch ou à tout autre boxeur de son choix. N'oublions pas que Bute, de son côté, a toujours droit à une revanche contre Froch.

Qu'est-ce que tout cela nous dit? Ça nous dit que la boxe québécoise, qui a traversé une période plutôt terne après avoir vu ses champions dépouillés de leurs titres mondiaux au cours des deux dernières années, ressent actuellement une montée d'adrénaline.

Les K.-O. de Stevenson excitent le monde. S'il fallait que son prochain adversaire soit le gagnant de l'affrontement Bute-Pascal, on n'aurait pas fini d'avoir du plaisir.

Mais, on en conviendra, la possibilité de le voir corriger Carl Froch ferait saliver les amants de la boxe.