Quand Lucian Bute montera sur le ring pour y affronter James DeGale le 28 novembre à Québec, il n’est pas impossible qu’il s’agisse du dernier combat du boxeur québécois d’origine roumaine.

À sa dernière chance de remettre la main sur un titre mondial, Bute aura toute une commande sur les bras et certains anticipent déjà que le triste scénario du duel contre Carl Froch se répète.

Curieusement, personne au sein de l’entourage du pugiliste maintenant âgé de 35 ans n’a de plan précis en cas de catastrophe. En terme clair, il n’est pas du tout question de jeter l’éponge.

« Ce sont des choses qui peuvent arriver. Un coup de poing peut changer le cours d’une carrière, mais qu’est-ce que nous pouvons y faire?, a lancé l’ex-champion des poids super-moyens de l’IBF après un entraînement tenu mercredi dans un gymnase de l’Ouest-de-l’Île de Montréal. »

« Nous n’avons pas discuté de cela, confirme son entraîneur Howard Grant. Dès que nous passons la porte ici, c’est positif. Tout le monde est positif. Si Lucian réussit 70 pour cent de ce qu’il accomplit à l’entraînement pendant le combat, ce sera un combat extrêmement facile. »

« Je suis convaincu que ses entraîneurs lui donneront le bénéfice du doute. Lucian aura toutes les chances au monde de revenir, continue le promoteur Yvon Michel. Il n’est pas question de protéger un jeune boxeur en début de carrière. Il n’est plus en période d’apprentissage. »

Reste que les questions fusent à l’approche du grand jour. Mais Bute ne cherche même plus à confondre les sceptiques ou même à prêcher les convertis. Il a complètement changé d’approche en préférant être lui-même plutôt que de dire des choses auxquelles il ne croit pas.

« Je suis réaliste : (Andrea) Di Luisa n’est pas parmi les meilleurs, mais j’avais besoin de cette victoire par knock-out, explique Bute. Cette victoire m’a beaucoup touché. Je n’aime pas parler de moi, mais je suis quelqu’un de très émotif. J’étais très satisfait de mon travail cette soirée-là.

« Il faut se rappeler que je n’avais jamais eu de pause auparavant. Je n’avais même pas fini un combat qu’il y en avait déjà un autre à l’agenda. Pendant 10 ans, je n’ai jamais pensé à moi. Les boxeurs sont des êtres humains, pas des robots. À 35 ans, je devais enfin commencer à écouter mon corps. Je ne regrette absolument aucune des décisions que j’ai prises jusqu’à maintenant. »

« Je ne sais pas ce qui s’est produit dans le passé, mais je sais que le passé est derrière nous, ajoute Grant. Lorsqu’il est arrivé ici, Lucian était très timide et maintenant, il est très relax. J’ai vu la différence et je suis honoré de travailler avec lui. Il travaille fort et est affamé. Ce n’est pas évident de faire ce qu’il fait à 35 ans. Pour être honnête, je n’avais jamais rien vu de tel avant! »

Même s’il n’a pas le choix de constamment le revisiter parce que les journalistes y font souvent allusion, le gaucher semble déterminé à rompre avec une partie de son passé. Un passé qui a permis à nombre de personnes de déverser leur fiel. De la haine qui l’a profondément meurtri.

« Si je regardais toujours dans le passé, je finirais par trouver toutes sortes d’excuses. Le passé, c’est le passé et je l’ai accepté. En ce moment, je préfère regarder vers l’avant, explique-t-il. Tout le monde parle à gauche, à droite, mais je sais qui je suis et comment je travaille.

« C’est pour ça que j’ai décidé d’arrêter de lire les réseaux sociaux et les journaux. Pourquoi me mettre des choses négatives dans la tête? Ce n’est pas tout le monde qui dit des choses positives. Il y a des gens qui ne sont pas contents de ce que j’ai fait… Et comme je suis un gars très sensible, je n’aime pas ça. Je préfère plutôt me concentrer sur ma stratégie. »

« Je le sens mieux. Il a pris le temps de mettre les choses en perspectives, analyse Michel. Sans pointer qui que ce soit du doigt, on n’a jamais cherché à corriger les erreurs que Lucian pouvait commettre. Il n’y a jamais eu de sentiment d’urgence. On s’est toujours concentré à développer les outils qui lui permettaient de connaître du succès. L’important aujourd’hui, c’est qu’il y croit.

Et c’est visiblement là que réside toute la motivation de Bute. Reconquérir la ceinture qu’il a détenue pendant près de cinq ans et qui lui a été volée à la suite d’un combat qu’il n’aurait jamais dû accepter. Offrir une fois pour toutes une prestation à la hauteur de son talent contre un adversaire unanimement reconnu comme l’un des meilleurs de la division. Sans compromis.