Vous avez payé près d’une centaine de dollars pour écouter votre match de boxe préféré. Vous regardez vos deux boxeurs favoris à la télé.  C’est un match de championnat. Le numéro un affronte le numéro deux. 

Après 12 rounds d’un spectacle époustouflant, il faut remettre le sort des deux boxeurs entre les mains des trois juges de boxe. 

Soudainement, l’annonceur maison annonce de sa voix puissante : « C’est un match nul! » 

Jusque-là pas de problème. Ce n’est pas votre choix, mais après tout, les trois juges savent ce qu’ils font. Ce sont des professionnels… non? 

Mais quand vous regardez le pointage de chacun, vous constatez qu’un juge a voté 114-114, l’autre 115-113 pour votre favori et le troisième 117-111, mais pour l’adversaire. 

C’est impossible.  Il ne peut pas y avoir autant de différence dans les pointages? 

Pourtant, c’est exactement ce qui est arrivé lors du match entre Jermell Charlo et Brian Castano alors que les quatre titres majeurs étaient à l’enjeu. 

Quoi faire? 

Que diriez-vous si la boxe y allait d’un round supplémentaire quand les juges décident qu’il s’agit d’un combat nul? Les douze rounds terminés, on aurait droit à un recomptage, à un repos puis la cloche sonnerait pour un 13e round. Trois petites minutes de plus et une deuxième décision. 

Si c’est bon pour le hockey, le football, le basketball et quoi d’autre,  ce doit être bon  pour la boxe? 

Peut-être… Pas sûr… 

Je doute qu’on donne suite à une telle idée. C’est trop intelligent. Et peut-être que le corps médical et les entraîneurs ne seraient pas d’accord. 

La boxe étant ce qu’elle est, on va continuer à laisser des incompétents et parfois des corrompus rendre des verdicts qui n’ont aucun sens. Combien de fois a-t-on vu des juges, le cousin du frère de l’oncle d’un des hauts placés de la Commission de boxe prendre siège sur le bord du ring et donner sa version du combat. Aux États-Unis, c’est pratiquement monnaie courante. Surtout dans certains États. 

Vive Teddy Atlas 

« Si ce n’est pas une erreur de jugement, c’est de  l’incompétence…  ou de la corruption! » 

Vous vous souvenez de cette phrase? C’est nul autre que Teddy Atlas qui l’avait criée haut et fort à la suite de la victoire de Canelo Alvarez sur Gennady Golovkin, lors du premier  affrontement entre les deux hommes. 

Il tempêtait contre le score d’Adalaide Byrd (118-110) pour le Mexicain alors que les deux autres juges y allaient de pointages de 115-113 pour Canelo et 114-114 . 

Et Atlas, un entraîneur et analyste de boxe très compétent, l’a répété  quand Jeff Horn a eu le meilleur sur Manny Pacquiao et il  le répète encore chaque fois qu’il en a la chance. 

Cela ne sert à rien. Cela ne sert à rien de revenir sur cette performance atroce de madame Byrd.  Beaucoup d’autres juges ont aussi connu des ratés au cours des ans. 

Le pire dans tout cela, c’est que ces juges n’ont pas à rendre compte de leurs décisions et contrairement à vous et moi qui devons répondre de nos actes, ils seront souvent récompensés au lieu d’être punis ou bannis.

Et pire encore, c’est que lorsqu’un juge connaît une mauvaise soirée, c’est le boxeur qui en subit les conséquences. Comme ce fut le cas samedi dernier à Houston, où Jermell Charlo s’est vu offrir un verdict nul sur un plateau d’argent contre Brian Castano, alors que les quatre titres majeurs étaient en jeu. 

Andre Ward pas d’accord 

Andre Ward, un ex-champion mondial et excellent analyste de boxe à la télé, ne s’est pas gêné à l’issue de ce match pour admettre haut et fort : « Ce n’est pas une erreur, c’est de l’incompétence… »

Reconnu comme un excellent juge de boxe, Ward prétend que son score était de 117-111 en faveur de Castano. 

Personnellement, j’avais Castano gagnant par 115-113, soit seulement 3 rounds à Castano 

Pour en arriver à son score de 117-111, c’est donc dire que Vasquez n’a accordé que trois rounds à Castano au cours du combat. 

C’est aussi pire que madame Byrd qui avait alloué 10 des 12 rounds à Canelo contre Golovkin. 

Personne n’a été capable de réglé ce problème depuis que la boxe existe. À bien y penser, on ne s’est jamais vraiment penché sur le cas de l’incompétence des juges. Quelques officiels ont décidé d’abandonner à cause de la pression ou de leur âge.  Certains ont remis leur démission à la suite d’enquêtes. Quelques-uns ont été congédiés.  

Jamais plus le même 

Bref, qui ne se souvient pas de la défaite crève-cœur d’Eric Lucas en Allemagne aux dépens de Markus Beyer en avril 2003. Chaque fois que je revois ce combat à la télévision, j’ai une bonne pensée pour Eric.   

Quand on pense que les seconds de Beyer savaient le pointage des juges round après round.  

C’est l’Italien Franco Criminale (il a le nom parfait pour la boxe) qui avait voté pour Beyer 116-113 tout comme l’Américain Chuck Hassett (116-113 Beyer) alors que le Britannique John Kean avait  remis une carte de 115-114 pour Lucas.   

Lucas n’a jamais perdu ce match. Mais cette défaite a totalement chambardé la suite de sa carrière. Il est le premier à l’admettre. 

D’ailleurs entre 2003, le jour de sa défaite contre Beyer, et son retrait de la boxe en 2010, il n’a livré que six combats. Il en a gagné trois contre des boxeurs de classe inférieure et a perdu les trois autres par K.-O. technique/6 contre Danny Green, K.-O. technique/10 contre Mikkel Kessler et finalement par retrait au huitième round contre Librado Andrade. 

Même Hagler  

Jusqu’à sa mort en mars dernier, le grand Marvin Hagler n’a jamais digéré sa défaite par décision partagée aux mains de Sugar Ray Lenard, à Las Vegas, en avril 1987. 

Marvelous a été tellement déboussolé par ce verdict qu’il a décidé d’accrocher ses gants et d’aller vivre en Italie.  

Les trois officiels avaient tous des verdicts différents. Louis Filipo avait 115-113 pour Hagler. Dave Moretti 115-113 pour Leonard. Mais le juge mexicain Jose Juan Guerra avait alloué seulement quatre rounds à Hagler. Incroyable mais vrai, son pointage fut de 118-110 pour Leonard. Encore là, vous pouvez revoir ce match sur YouTube, ce qui pourrait vous permettre de scorer vous-même ce combat. 

D’autres bijoux 

Il y en a eu bien d’autres de ces petits bijoux de décisions. Entre autres le verdict nul de la rencontre entre Lennox Lewis et Evander Holyfield, en 1999, ou bien la décision nulle entre Julio Cesar Chavez, le père et Pernell Whitaker, en 1993. 

Une autre perle est celle où le géant Nikolai Valuev a vaincu Evander Holyfleid par décision majoritaire en 2008, ou bien encore le vol en Australie, où Jeff Horn a obtenu la décision unanime sur Manny Pacquiao, lui ravissant ainsi son titre de la WBO des mi-moyens. Deux des trois juges venaient d’Argentine.  Tous deux ont remis des cartes de pointages de 115-113 pour Horn. La troisième juge est une Américaine. Une grande voyageuse.  Une dame de New York du nom de Waleska Roldan. On l’a déjà vu officier au Centre Vidéotron, à Québec, en novembre 2019 dans un match où Mikael Zewski avait réglé le compte d’Alejandro Davila par K.-O. technique/10. 

En juillet 2017, par un beau jour d’été, la WBO lui payé un voyage de New York à Adélaïde, en Australie, pour aller officier le match entre Pacquiao et Horn. 

Seulement cinq rounds 

Après 12 rounds, elle a remis une carte de pointage de 117-111 en faveur de Horn. Ce qui veut dire que selon elle, Pacquiao n’avait gagné que cinq rounds dans ce match 

Quand les experts de boxe ont contesté son pointage, savez-vous ce qu’elle a répondu? 

« Ce n’est pas ma faute! Ma vue était obstruée. » 

Comment peux-tu avoir la vue obstruée si tu es assis dans la première rangée, sur le bord du ring? 

A-t-elle été punie pour son incompétence? Oh que non. 

Elle était toujours juge active en avril 2021 et prête à prendre l’avion pour aller scorer son prochain combat… 

Malgré tout…

Bonne boxe!