Stéphane Ouellet peut retourner dans son patelin du Saguenay-Lac St-Jean la tête haute. C’est rare de parler ainsi d’un boxeur qui vient de livrer un combat de quatre rounds. Après tout, ces rencontres sont réservées aux débutants.

Mais samedi soir, sur le tapis du ring du Centre Bell, Stéphane Ouellet a fait un dernier tour de piste au grand plaisir de ses fans, les vrais. Il n’a pas gagné le combat, mais il a gagné le respect de tous. D’ailleurs, plusieurs d’entre nous n’avaient jamais vraiment tenu rancune au Poète pour ses frasques des années passées.

« Que celui qui n’a jamais pêché lance la première pierre! » Vous vous souvenez de cette phrase célèbre d’antan que l’on devait apprendre par cœur?

Ce que j’ai aimé de Ouellet dans cet affrontement contre un jeune homme qui aurait pu facilement être son fils, c’est que par moment, il nous a montré quelques coups bien placés comme dans le bon vieux temps, au moment où il tenait la boxe du Québec sur ses épaules. Mais à 43 ans,  il est difficile de tenir tête à un jeune et fringant boxeur de 25 ans.

Ce qui devait s’avérer comme un match d’exhibition est devenu dès les premiers instants un vrai combat de boxe où les deux pugilistes ne se sont pas ménagés.

Au tapis

Stéphane a visité le tapis au cours du combat non pas parce qu’il se battait sur les talons, mais plutôt parce qu’il voulait y aller coup pour coup avec son jeune rival. Comme dans le bon vieux temps. Oui… Stéphane est allé au tapis, mais il s’est relevé, tout comme il l’a fait dans sa vie personnelle.

Il a perdu le combat mais il est revenu dans la famille de la boxe.  Il reprend donc sa place qu’il avait perdue à cause de ses frasques d’antan. Il redevient le jeune qu’Yvon Michel avait dirigé pendant autant d’années et qu’il avait presque rendu au sommet de la classe internationale.

Pendant un temps, Ouellet a décidé de faire la grosse vie. Il l’admet lui-même. Oui, Stéphane a connu des problèmes majeurs dans sa vie, mais il n’a jamais reculé devant ses démons.

Un fait demeure. Le Stéphane que nous avons vu sur le ring samedi soir dernier est le nouveau Stéphane. Celui qui est maintenant en paix avec lui-même. Celui qui a vaincu sa peur. Peur de quoi au juste? Peur de la vie!

Je retiens cette phrase d’Yvon Michel, son maître à penser pendant autant d’années, pour ne pas dire son père spirituel : « Stéphane est beaucoup plus un artiste qu’un boxeur ». Et quand le Poète parle, on comprend encore mieux cette phrase de celui qui est redevenu son ami.

Salut Stéphane… Reprends la place qui te revient… Et merci pour ces belles années que tu nous as fait revivre en ce début d’automne.

Beterbiev, la future vedette de chez nous

Depuis des lunes qu’Yvon Michel me chante qu’Artur Beterbiev va devenir un jour champion du monde. Par moment, on aurait dit qu’Yvon croyait vraiment que Beterbiev pourrait marcher sur les eaux et ne calerait pas. Et vous savez quoi? Yvon a peut-être raison.

Contre des boxeurs de deuxième ordre, Beterbiev a maintenu un rythme infernal. Ses cinq adversaires précédents présentaient une fiche de 75 victoires contre 88 revers. Pire encore… Il n’avait livré que 11 rounds de boxe, soit une moyenne de 2,2 rounds par bataille, et soudainement, il se retrouve dans la gueule du loup, contre un ex-champion du monde qu’Adonis Stevenson avait pris sept rounds à bûcher avant de finalement l’obliger à abdiquer dans son coin.

Artur BeterbievJ’aurais dû écouter les conseils d’Yvon Michel. « Tu vas voir, Beterbiev va battre Tavoris Cloud. Il va l’assommer. Il a toutes les qualités pour devenir champion du monde, tout comme ce fut le cas dans les rangs amateurs. »

Champion amateur 

Fort de plus de 300 combats amateurs, il a été couronné champion du monde amateur. Puis aux Jeux olympiques de 2008 à Pékin, en Chine, il a perdu en quart de finale 17-13 contre Aleksandr Ysyk, de l’Ukraine.

Tout cela c’est bien beau, mais jusqu’à son arrivée à Montréal en 2013, il n’avait jamais affronté un boxeur qui gagnait sa vie à se battre.

Beterbiev a plusieurs qualités comme boxeur. Il a une assez bonne défensive mais sa force de frappe est tellement puissante qu’il peut se permettre quelques lacunes en défense. Disons qu’il est un Sergey Kovalev, en plus gros.

Tavoris Cloud l’a appris à ses dépens.  Sentant la pression de son rival dès les premiers instants du combat, il a tenté d’y aller coup pour coup avec lui. Mal lui en prit. Et aujourd’hui on peut se demander si Cloud n’a pas livré son dernier combat en carrière.

Pour une deuxième fois de suite, il a été vaincu  par K.-O. et auparavant, il avait perdu une décision aux mains de Bernard Hopkins. Si ce n’est pas la fin du rouleau, c’est très  près.

Je vous gage que la prochaine fois qu’Artur Beterbiev va monter sur un ring, il y aura ou bien Showtime ou bien HBO pour présenter le combat à la télévision.

J’ignore combien a reçu Beterbiev pour sa performance de samedi soir, mais je peux vous assurer que la prochaine fois, il touchera une bourse dix fois supérieure à celle reçue pour sa soirée de travail face à Tavoris Cloud.

Eh oui… Stéphane a fait ses adieux à la boxe avec un large sourire en dépit d’une vilaine entaille à l’œil  et au  même moment Beterbiev vient d’ouvrir toute grande  la porte qui l’amènera un jour à un titre mondial. Et croyez-moi, ce jour n’est pas loin.

Bonne boxe.