MONTRÉAL - Depuis plusieurs semaines, Francis Lafrenière s’entraînait en vue de disputer un combat contre Francisco Cordero pour la ceinture intercontinentale des poids moyens de l’IBF. L’ajout de ce titre lui aurait enfin permis de faire son entrée dans les classements mondiaux.

Même s’il avait remporté la ceinture internationale de l’IBF après sa victoire sur Renan St-Juste en janvier dernier, la fierté de Coteau-du-Lac n’avait toutefois pas réussi à se hisser au rang des aspirants à Gennady Golovkin en raison d’un dossier entaché par un début de carrière difficile.

Le duel prévu vendredi soir à la Tohu devait marquer le début d’un rêve pourtant inaccessible il y a encore quelques mois à peine. Blessé au coude gauche depuis plus de deux semaines, il avait multiplié les séances de physiothérapie pour s’assurer d’offrir une prestation à la hauteur.

Mais plutôt que d’affronter Cordero, qui a été refoulé à la frontière après ne pas avoir été en mesurer d’obtenir son visa, le Québécois s’est retrouvé devant le Hongrois Attila Koros, dont la fiche combinée des adversaires qu’il avait battus s’élevait à seulement 78-294-8. Le drame.

Sans surprise, l’IBF a décidé de ne pas sanctionner le combat pour la ceinture intercontinentale et ce qui devait arriver arriva, alors que Lafrenière (12-5-2, 7 K.-O.) est passé sur le corps de Koros (9-5-1) avant de gagner par arrêt de l’arbitre dans la première minute du troisième round.

« Ça m’a fait de quoi. J’ai vécu une grosse déception de ne pas avoir la chance de mettre la main sur cette ceinture, a reconnu Lafrenière à sa sortie du ring. Mais c’était hors de mon contrôle et l’organisation a travaillé extrêmement fort pour que le gala ne tombe pas à l’eau.

« J’avais vendu beaucoup de billets et il n’était pas question de décevoir les gens qui s’étaient déplacés. C’est évident que j’aurais aimé affronter un meilleur adversaire, mais il y a des niveaux à atteindre et ça m’a permis d’ajouter un knock-out à ma fiche. Il faut voir le positif. »

Des mentors généreux

Dans la foulée de sa victoire sur St-Juste en sous-carte du deuxième combat entre Jean Pascal et Sergey Kovalev, l’intérêt envers Lafrenière a augmenté et il souhaitait en tirer profit.

Âgé de 28 ans, il sait pertinemment que sa fenêtre d’opportunité pour percer sur la scène mondiale est petite, d’autant plus qu’il préconise une boxe intense qui use prématurément.

« Avec le style que j’ai, c’est certain que je ne boxerai pas aussi longtemps que Bernard Hopkins, expliquait Lafrenière en entrevue à RDS.ca plus tôt cette semaine. Mais je considère que je possède une bonne défense et je crois que j’ai encore cinq bonnes années devant moi.

« Présentement, je passe de 60 à 75 heures par semaine dans mon gymnase de Saint-Clet en plus des entraînements. D’un autre côté, c’est précisément la réalité de tous ceux qui possèdent leur entreprise. En ce moment, je vois ça comme un investissement à long terme. »

Lafrenière est très loin de vivre de son sport et ne touchera vraisemblablement jamais des bourses qui lui permettront d’assurer ses vieux jours. Au moins, ses combats sont vus, étant donné que son promoteur Rixa Promotions présente ses événements sur les ondes de RDS.

« Le fait de passer à la télé conventionnelle facilite la recherche de commanditaires, car nous leur offrons beaucoup plus de visibilité, précise-t-il. Cette notoriété me permet ensuite de redonner à ma communauté en étant porte-parole pour le Défi têtes rasées par exemple. »

Malgré les nombreuses contraintes inhérentes à la vie de boxeur professionnel, Lafrenière se considère comme chanceux et voit maintenant chaque étape comme un cadeau de la vie.

« Je ne suis pas un gars jet-set, alors je ne boxe pas pour le côté glamour du sport, avoue-t-il. De retourner à la Tohu après avoir fait le Centre Bell, ça ne me dérange pas du tout. Peut-être que si je revenais de quatre ou cinq Centre Bell, ç’aurait été plus dur. Mais je suis terre à terre.

« Quand j’ai commencé ma carrière, je me disais que si je devenais champion du Québec, alors j’aurais réalisé quelque chose. En devenant notamment champion canadien par la suite, j’ai dépassé mes attentes. D’où je suis parti, je peux dire que je suis vraiment fier d’être rendu là. »

Malgré le rendez-vous manqué, Lafrenière continuera de travailler d’arrache-pied aux côtés de plusieurs combattants d’expérience dans le gymnase des frères Howard et Otis Grant, qui est devenu un lieu prisé depuis l’arrivée de l’ex-champion des super-moyens de l’IBF Lucian Bute.

« Ç’a apporté une belle vibe, mais j’étais déjà un gars travaillant d’avance, mentionne-t-il. C’est certain que ça donne une fierté additionnelle d’être associé au gymnase. Je suis vraiment entouré d’une belle équipe avec Georges St-Pierre, Patrick Côté, Rory MacDonald et évidemment Lucian. Ils n’hésitent pas à partager leurs trucs ou encore à donner leur opinion. »