OTTAWA – C’était écrit dans le ciel. Steve Bossé et Sean O’Connell n’allaient pas faire dans la dentelle.

On savait que ça allait frapper pesant. Mais aussi souvent? Que ces deux hommes aient été en mesure de donner et de recevoir à une fréquence pareille dépasse presque l’entendement.

Bossé a remporté la bataille la plus spectaculaire du gala de l’UFC présenté samedi à Ottawa, obtenant l’avantage sur la carte de chacun des trois juges (29-28 x 2, 29-27) après une époustouflante guerre d’usure. O’Connell et lui sont chacun repartis de la capitale avec le traditionnel chèque de 50 000$ remis aux auteurs du combat de la soirée.

« On s'est battu pour les fans »

« Sean a tout un menton, n’a pu que constater Bossé, qui s’est présenté à la conférence de presse avec l’œil droit presque fermé. Je lui ai fait mal avec plusieurs coups en puissance. Je suis heureux qu’on ait donné un bon spectacle aux amateurs. C’est ce que je veux quand je saute dans la cage. »

Pourtant, pendant un instant, on a cru que le « Boss », pour la troisième fois en autant de sorties à l’UFC, ne verrait pas la fin du premier round. Dès la première minute d’action, O’Connell a sorti trois gauches consécutives qui ont envoyé le Québécois choir dans un coin de l’octogone. La patience de l’arbitre Herb Dean a toutefois permis à Bossé de reprendre ses sens et d’éventuellement repartir la machine.

Bossé a commencé le deuxième en déchargeant son poing droit dans le visage de son rival, qui a été assez affecté pour tenter une amenée au sol paresseuse après seulement vingt secondes de supplice. Bossé a continué d’attaquer, ramollissant les jambes du vulnérable Américain avec deux autres coups de massue. Sa cible couchée au tapis, Bossé a tout donné pour tenter d’enfoncer le dernier clou, mais ses coups de marteau se butaient à un crâne en acier. O’Connell a terminé le round complètement épuisé.

Les pieds de Bossé étaient encore légers au troisième. Il a décidé de les planter au sol et de dégainer, mais pour chaque droite envoyée, une gauche venait lui embrasser la joue. La foule en redemandait et Bossé s’exécutait avec plaisir, décochant des attaques renversées comme s’il n’y avait pas de lendemain.

Les deux destructeurs ont reconnu le courage de l’autre en terminant le combat dans une sincère étreinte.

Bossé montre désormais une fiche de 2-1 depuis son entrée à l’UFC.

La spécialité d'Aubin-Mercier

Il y avait belle lurette qu’Olivier Aubin-Mercier n’avait pas servi sa spécialité. Le Montarvillois a renoué avec ses anciennes amours en passant un étranglement arrière au Français Thibault Gouti à 2:28 du troisième round.

C’est la sixième fois de sa carrière qu’Aubin-Mercier (8-2) décroche une victoire grâce à cette prise de soumission, la première fois depuis son succès face à David Michaud en avril 2015.

La patience rapporte à Aubin-Mercier

Aubin-Mercier a affiché ses couleurs dès le début de l’affrontement, mais surtout, il a respecté l’une des résolutions qu’il avait prises à la suite de son dernier échec contre Diego Ferreira. Gouti (11-2) a repoussé avec ses succès les deux premières tentatives d’amenées au sol du Québécois, mais ce dernier a persisté et a fini par amener l’action où il le voulait.

« Il a fallu que je m’ajuste. J’avais de la misère parce qu’il était assez glissant. J’ai donc décidé de fermer mes mains ensemble à chaque fois que je tentais de l’amener au sol. Je suis content de m’être ajusté et de l’avoir fini au troisième round. »

Une première aventure dans les contrées de l’étranglement n’a pas mené au résultat espéré et Gouti a été en mesure de se relever et de porter quelques bons coups avant le son de la cloche.

Le « Québec Kid » s’est fait refuser deux autres invitations à lutter au début du deuxième round, mais il n’était pas d’humeur à se faire dire non. Après deux minutes d’efforts, il a cloué Gouti au tapis et l’y a gardé pour les trois dernières minutes de l’engagement.

Le troisième round n’était vieux que de dix secondes quand OAM a agrippé la jambe gauche de son vis-à-vis. C’était le début de la fin pour Gouti, qui s’est rapidement retrouvé emprisonné dans les jambes de son assaillant. Le Français a finalement abdiqué de la même façon qu’il l’avait fait à son premier combat à l’UFC, alors qu’il n’avait duré que 24 secondes contre Teemu Packalen.

Calderwood passe le K.-O. à Létourneau

Valérie Létourneau n’a pas obtenu le résultat recherché lors du premier combat féminin de poids mouche présenté par l’UFC.

La Québécoise, qui tentait de devenir la première femme de l’histoire de l’organisation à signer une victoire dans trois catégories de poids différentes, s’est fait passer le K.-O. par Joanne Calderwood.

Des coups à l'abdomen dévastateurs

À deux reprises, au troisième round, Létourneau (8-5) a arrêté de combattre sans que l’arbitre, à tort ou à raison, n’ait jugé bon de s’interposer. La deuxième fois a mené à sa perte : grimaçant de douleur après avoir reçu un coup de pied au corps, Létourneau a fait dos à l’action pour retraiter vers le grillage. Calderwood l’a pourchassée et l’a achevée avec un coup de poing renversé au visage à 2:51.

« Je croyais que le combat était terminé ou que l’arbitre aurait dû s’interposer, mais quand j’ai vu que ce n’était pas le cas, j’ai continué d’attaquer. Je n’ai fait que mon travail », a expliqué l’Écossaise.

La Montréalaise exilée en Floride a ainsi subi une deuxième défaite consécutive. À sa sortie précédente, elle avait été battue par la Polonaise Joanna Jedrzejczyk dans un combat de championnat chez les poids pailles.

Létourneau s'incline par K.-O. technique

Calderwood, qui avait établi ses quartiers généraux à Montréal en préparation de ce combat, a quant à elle signé une troisième victoire en quatre apparitions à l’UFC.

La soirée de Létourneau a bien failli prendre fin beaucoup plus tôt. Au premier round, l’ancienne élève de Firas Zahabi s’est fait surprendre par un coup de poing renversé qui l’a brutalement envoyée à l’horizontal. Calderwood s’est rapidement jetée sur sa victime pour en finir, mais non seulement la favorite de la foule a survécu, elle s’est relevée et a livré les coups les plus dommageables dans les 30 dernières secondes de l’assaut.

Calderwood (11-1) a joué son jeu intelligemment au deuxième round, glanant de précieux points avec deux amenées au sol parfaitement exécutées. Mais l’instinct de la spécialiste de muay thaï allait refaire surface en dernier round, lui permettant de ne montrer aucune pitié devant la vulnérabilité de sa proie.

« J’ai l’impression d’avoir finalement fait l’étalage de mon potentiel, se réjouissait Calderwood. Je me sens bien et j’ai la bonne équipe derrière moi maintenant. Tout est tombé en place ce soir, c’était une superbe expérience. »

C’est la première fois depuis son passage à l’UFC qu’un combat de Létourneau n’atteint pas la limite.

Une première dépaysante pour Jonathan Meunier

Avec une préparation de huit jours pour faire ses débuts à l’UFC, la marche s’est avérée un peu trop haute pour Jonathan Meunier.

Le combattant de Québec a subi la première défaite de sa carrière, samedi soir, abandonnant sous l’emprise d’un étranglement arrière de Colby Covington à 4:06 du troisième round.

« J’avais déjà passé du temps au sol, mais en position dominante, a relativisé Meunier (7-1), qui a pris le temps de rencontrer les médias après sa défaite. Me retrouver sur mon dos, c’était la première fois. Je n’ai pas paniqué, mais il réussissait à tenir sa position avec de très bons enchaînements techniques. Il allait de l’avant, il ne me laissait pas un pouce pour réagir et me relever. »

Meunier forcé d'abandonner

Pour son plan de match, Covington n’a pas fait dans la subtilité. Contre une recrue surtout reconnue pour ses talents de cogneur, l’Américain a rapidement cherché l’amenée au sol. Meunier s’est défendu du mieux qu’il a pu, mais a fini par se retrouver avec un assaillant dans sa garde, forcé de se protéger contre une pluie de coups de coude qui a fait apparaître un hématome sur son front.

« On savait que ça allait être son plan de match, on s’en attendait, mais il y a des choses qui se passent vite. Il est arrivé à ses fins, c’est un excellent lutteur. »

Après un deuxième round sensiblement similaire, Meunier pouvait néanmoins toujours rêver à une surprise en débutant le troisième. « Cinq minutes pour changer ta vie! », lui a crié Nordine Taleb, l’un de ses hommes de coin, au début de l’assaut. Mais le « French Spider » s’est fait atteindre solidement par un coup de poing renversé et s’est affalé au sol, où Covington est immédiatement allé prendre son dos. La fin était imminente.

« Toutes ses attaques étaient hors-normes, a remarqué Meunier. À la base, c’est un gaucher, ce qui fait qu’aucun de ses enchaînements n’est familier pour un combattant droitier. Je l’ai vu venir trop tard, si on peut dire. Ça m’a surpris. »

Meunier, qui a accepté de remplacer son coéquipier Alex Garcia à pied levé seulement quatre semaines après son plus récent combat, a atteint le troisième round pour la première fois de sa jeune carrière.

« C’est une excellente expérience. Je suis sur la scène internationale et je suis fier de me mesurer aux meilleurs combattants au monde. C’est juste un ‘Au revoir et à la prochaine’, a promis le résident de Loretteville. À bientôt, même! Cette semaine, je me remets à l’entraînement, trois fois par jour, pour revenir le plus vite possible. »

Plus expérimenté, Covington (9-1) montre maintenant un dossier de 4-1 depuis qu’il a accédé à l’UFC.

Résultats recherchés pour les Canadiens

En ouverture, Geane Herrera a pris les meilleurs coups d’Ali Bagautinov – et il y en a eu plusieurs – mais son endurance n’a fait que repousser l’inévitable. Bagautinov, qui a tout de même dû se sortir d’une fâcheuse tentative d’étranglement triangulaire au deuxième round, n’a eu aucune difficulté à convaincre les trois juges de sa dominance.

Les Canadiens et Randa Markos et Elias Theodorou sont chacun revenus sur le sentier de la victoire grâce à des victoires par décision unanime. Le représentant de l’Île-du-Prince-Édouard Jason Saggo a quitté du bon côté d’une décision partagée arrachée contre le Brésilien Leandro Silva. Puis Misha Cirkunov, un mi-lourd Letton qui s’entraîne à Toronto, est demeuré invaincu à l’UFC en piégeant Ion Cutelaba dans un étranglement triangulaire.

Joe Soto, qui n’avait jamais connu la victoire à l’UFC depuis qu’il avait accepté de sauter sur la chance inespérée d’affronter T.J. Dillashaw pour le titre des poids coqs en 2014, a mis fin à une vilaine disette de trois combats en passant la soumission à Chris Beal. Ce dernier a donné un spectacle relevé, mais a néanmoins subi sa troisième défaite consécutive.

Le Polonais Krzysztof Jotko a réussi le K.-O. de la soirée en assommant Tamdan McCrory d’une solide gauche en moins d’une minute.

Les résultats en un coup d’oeil

Stephen Thompson défait Rory MacDonald par décision unanime (50-45 x 2, 48-47)

Donald Cerrone défait Patrick Côté par K.-O. à 2:35 du troisième round

Steve Bossé défait Sean O’Connell par décision unanime (29-28 x 2, 29-27)

Olivier Aubin-Mercier défait Thibault Gouti par soumission (étranglement arrière) à 2:28 du troisième round

Joanne Calderwood défait Valérie Létourneau par K.-O. technique à 2:51 du troisième round

Jason Saggo défait Leandro Silva par décision partagée (29-28 x 2, 28-29)

Misha Cirkunov défait Ion Cutelaba par soumission (étranglement triangulaire) à 1:22 du troisième round

Krzysztof Jotko défait Tamdan McCrory par K.-O. à 0:59 du premier round

Joe Soto défait Chris Beal par soumission (étranglement arrière) à 3:39 du troisième round

Elias Theodorou défait Sam Alvey par décision unanime (30-27x2, 29-28)

Randa Markos défait Jocelyn Jones-Lyberger par décision unanime (29-28 x 2, 30-27)

Colby Covington défait Jonathan Meunier par soumission (étranglement arrière) à 4:06 du troisième round

Ali Bagautinov défait Geane Herrera par décision unanime (30-27 x 3)