NEW YORK – Johny Hendricks replace ses lunettes sur son nez, passe sa main gauche dans sa barbe fournie et, soudainement, se met à ricaner comme un vieillard qui se remémore ses mauvais coups du passé.

« Je savais qu’il y aurait des questions à propos de GSP », s’exclame-t-il, les yeux brillants.

Quatre ans après leur dernière rencontre, Hendricks et Georges St-Pierre se retrouvent cette semaine dans des circonstances bien différentes. Le premier se battra probablement pour sauver son job samedi soir. L’autre effectue un glorieux retour à la compétition, toujours au sommet de sa popularité après s’être réfugié dans l’ombre pour refaire ses forces.

Mais le controversé combat de championnat qu’ils se sont livrés le 16 novembre 2013 à Las Vegas, celui qui allait pousser St-Pierre vers la délivrance et Hendricks vers la désillusion, est un sujet qu’il est impossible de contourner en marge de ces retrouvailles. Ils sont plusieurs à croire que St-Pierre aurait dû perdre son titre ce soir-là, que Hendricks aurait dû se retrouver du bon côté de la décision partagée rendue par les juges.

Qui sait si St-Pierre aurait décidé de renouer avec la compétition s’il n’avait pas quitté son sport au sommet? Qui sait si l’avenir aurait été plus clément envers Hendricks si la chance avait été de son côté lors du plus important combat de sa vie?

« Les jeunes gars avec qui je m’entraîne, je leur répète souvent de ne pas suivre le chemin que j’ai emprunté, racontait candidement le sympathique Texan mercredi. Ce chemin, il mène à un trou très sombre, un trou dont il est difficile de sortir. J’ai laissé les déceptions répétées me sortir de ma trajectoire jusqu’au point où je n’avais plus rien à foutre des MMA. »

Après sa défaite contre St-Pierre, Hendricks est parvenu à ses fins en battant Robbie Lawler pour mettre la main sur le titre vacant de la division des mi-moyens. Mais son règne fut de courte durée. Le combat revanche lui a glissé entre les mains – une autre injustice, décrie-t-il – et il n’a plus jamais été le même, perdant quatre de ses six combats suivants.

« Je perdais chaque fois que je méritais de gagner, alors j’en suis venu à me demander à quoi ça pouvait bien me servir de m’entraîner! Je ne mentirai pas, ça m’a pris du temps avant de vaincre ce désenchantement. Le sentiment de victoire qui se transforme en défaite, l’impression que vous perdez complètement le contrôle et que tout vous échappe. C’est ça que j’ai dû surmonter, mais ça n’a pas été facile. »

Hendricks n’est plus l’ombre du menaçant cogneur qui semait jadis la peur dans la division des mi-moyens de l’UFC. Il a subi trois défaites consécutives à 170 livres avant de passer chez les poids moyens, où une victoire contre Hector Lombard a vite été effacée par une brutale défaite contre Tim Boetsch. Plus humiliant encore que les revers, « Bigg Rigg » a été incapable de respecter la limite de poids dans trois de ses quatre dernières sorties.

Compte à rebours vers l'UFC 217

S’approchant dangereusement du rôle de faire-valoir, Hendricks (18-7) disputera le premier combat de la carte principale de l’UFC 217 contre le jeune cogneur brésilien Paulo Borrachinha (10-0), qui n’a que deux combats à son actif à l’UFC.

La fin semble donc proche, mais Hendricks, qui assure n’entretenir aucune rancœur envers son ancien tombeur, clame qu’il ne s’en va nulle part. St-Pierre et lui sont de retour dans la même catégorie de poids et il ne demanderait rien de mieux que de régler un vieux différend si les planètes devaient s’aligner en conséquence.

« On verra bien ce qui arrivera, mais si je gagne, qu’il perd et qu’il ne veut pas prendre sa retraite... j’adorerais avoir ce combat. »

St-Pierre – Bisping : qui est le plus fort?

Hendricks croit-il que St-Pierre gagnera son pari de revenir à la compétition après quatre ans d’absence et de battre Michael Bisping, le champion d’une catégorie qui n’a jamais été la sienne?

« J’y ai beaucoup réfléchi, mais je n’en ai aucune idée. Si je donne l’avantage à Bisping au niveau du combat debout, St-Pierre est sans aucun doute le meilleur lutteur. Mais peut-il lutter contre un adversaire aussi costaud? Parce qu’il en avait arraché contre moi... »

Hendricks soulève probablement la question la plus importante en vue de cet intrigant duel. Le modus operandi de St-Pierre est bien connu : à son apogée, il pouvait clouer n’importe quel rival au sol et le ruer de coups jusqu’à l’épuisement. « Si l’autre parvenait à se relever, c’était une question de temps avant que le manège soit répété », rappelle l’ancien aspirant.

Parce qu’Hendricks est lui-même un lutteur émérite, mais surtout parce qu’il était physiquement beaucoup plus fort que les précédentes victimes de St-Pierre, ce dernier avait été incapable de lui imposer sa médecine et avait, par conséquent, dû faire quelques aller-retour en enfer avant d’avoir finalement le dernier mot.

« Georges est-il plus fort que Bisping? », questionne Hendricks. « Certaines personnes m’ont dit que oui, d’autres que non. C’est la clé. Je me souviens d’avoir pu, à quelques reprises, me débarrasser de son emprise assez facilement. Si Bisping et lui sont plutôt égaux dans cet aspect, j’ai tendance à favoriser GSP. Mais si Bisping est le plus fort, je crois que Georges commencera à en ressentir les effets vers le troisième ou le quatrième round. »

Hendricks souligne aussi la possibilité que St-Pierre soit ralenti par la rouille.

« Il ne s’est pas battu depuis quatre ans. Est-ce que ça l’aidera, est-ce que ça lui nuira? C’est une autre question qui me chicote. Et j’ai hâte d’avoir mes réponses. »