LE MANS, France – En-fin ! Malchanceuse en 2017, 2019 et 2020, la Toyota no7 du Britannique Mike Conway, du Japonais Kamui Kobayashi et de l'Argentin José Maria Lopez a fini par remporter les 89e 24 Heures du Mans devant 50 000 spectateurs, dimanche, malgré une grosse frayeur.

Retour en début de matinée : l'équipe repère un problème empêchant d'utiliser à pleine capacité le réservoir de carburant de sa voiture soeur, la no 8, triple tenante de l'épreuve, qui s'est classée deuxième après avoir subi également un accrochage au premier virage.

« Quand c'est arrivé, on a vraiment cru qu'on n'allait pas finir », se remémore le directeur technique de Toyota, Pascal Vasselon. Les larmes dans sa voix après le doublé ne trompent pas. Pourtant, pendant la course, ils n'ont rien laissé paraître.

« On ne pouvait pas changer les pièces car ça aurait pris trop de temps, continue Vasselon. Donc on a essayé autrement et on y est arrivé. » La solution : demander aux pilotes de pousser une série de boutons sur le volant à chaque freinage, tour après tour, pendant des heures!

La no 8 sert de « cobaye », selon les mots du Néo-Zélandais Brendon Hartley, permettant à la no 7, auteur de la position de tête, de garder les commandes de la course quand le problème la touche à son tour.

« Ça n'était pas facile, on a essayé de maximiser ce qu'on pouvait faire pour survivre et on l'a fait. C'est un peu irréel », réagit Kobayashi. « Souvent, les 24 Heures du Mans ne nous ont apporté que de la malchance mais, aujourd'hui, on gagne. C'est génial! »

Des épaules de Conway, c'est « un poids qui s'enlève ».

Sans concurrence

Les deux autres constructeurs engagés dans la nouvelle catégorie reine des Hypercars, Alpine (troisième) et Glickenhaus (quatrième et cinquième), ne sont pas parvenus à mettre les favoris sous pression.

Ils n'ont pas bénéficié, non plus, de ce problème de fiabilité qu'on pouvait attendre d'une voiture inaugurée en 2021.

Sans grand constructeur comme concurrent, Toyota a gagné tous les ans depuis 2018 au Mans, soit quatre victoires consécutives. L'année prochaine, la marque nippone sera opposée à Peugeot, puis à Ferrari, Porsche ou encore Audi en 2023.

Ce galop d'essai l'aidera-t-il, sachant que le règlement permet de peaufiner la voiture mais pas de la faire évoluer?

Pour Vasselon, il est trop tôt pour se prononcer. « C'est un avantage d'être prêt avant les autres parce qu'on peut améliorer notre prise en compte des réglementations et organiser l'équipe autour », estime-t-il. « D'un autre côté, nos futurs compétiteurs nous observent, ils vont apprendre quelque chose et avoir le temps de le mettre en place dans leurs voitures. »

Surclassée en performance pure, l'Alpine no 36 – engagée dans la catégorie reine avec une ancienne LMP1 adaptée et non une nouvelle Hypercar – voulait « attaquer » et « mettre sous pression » les Toyota pour les pousser à l'erreur.

Après un tête-à-queue du Français Nicolas Lapierre au troisième tour et une sortie de piste de son compatriote Matthieu Vaxiviere peu après 23 h samedi, elle n'a pas été en position de le faire.

L'équipe française, dont on attend de savoir si elle poursuivra l'aventure dans les années à venir, a tout de même égayé une course un peu morne dimanche matin en se bagarrant avec la Glickenhaus no 708.

Fin cruelle en LMP2

Pour le petit constructeur américain, qui ne disputait que sa troisième course en endurance, la première sur le circuit de la Sarthe, terminer au pied du podium tient de l'exploit.

Le projet de l'Américain James Glickenhaus, 71 ans, reconnaissable à son chapeau de cowboy, mérite d'être connu. Sa fortune, faite dans les années 1980 en produisant et en réalisant des films comme « Le Droit de tuer » et « Le Retour du Chinois » avec Jackie Chan, a permis à ce passionné d'automobile de réaliser son rêve d'ado de faire courir ses propres voitures au Mans.

En LMP2, le Team WRT s'est imposé avec seulement 727/1000 d'avance pour l'Oreca no 31, mais passe à côté du doublé après le cruel arrêt en piste de la no 41 à trois minutes de l'arrivée à 16 h! En LMGTE Pro et Am, victoires des Ferrari no 51 et no 83.

La voiture no 84, confiée à deux pilotes paraplégiques, le Japonais Takuma Aoki et le Belge Nigel Bailly, s'est classée 32e.

Le Championnat du monde d'endurance auto (WEC) bouclera sa saison 2021 avec deux courses à Bahreïn, l'une de 6 heures le 30 octobre et l'autre de 8 heures le 6 novembre. Les prochaines 24 Heures du Mans doivent retrouver leur date habituelle, les 11 et 12 juin 2022.

Classement général des 89e 24 Heures du Mans :

1. Mike Conway - Kamui Kobayashi - José Maria Lopez (GBR-JPN-ARG/Toyota no 7/Hypercar hybride) 371 tours

2. Sébastien Buemi - Kazuki Nakajima - Brendon Hartley (SUI-JPN-NZL/Toyota no 8/Hypercar hybride) à 2 tours

3. André Negrao - Nicolas Lapierre - Matthieu Vaxiviere (BRA-FRA-FRA/Alpine no 36/Hypercar) à 4 tours

4. Luis Felipe Derani - Franck Mailleux - Olivier Pla (BRA-FRA-FRA/Glickenhaus no 708/Hypercar) à 4 tours

5. Ryan Briscoe - Richard Westbrook - Romain Dumas (AUS-GBR-FRA/Glickenhaus no 709/Hypercar) à 7 tours

6. Robin Frijns - Ferdinand Habsburg-Lothringen - Charles Milesi (NED-AUT-FRA/Oreca no 31/1er LMP2) à 8 tours

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20. Alessandro Pier Guidi - James Calado - Côme Ledogar (ITA-GBR-FRA/Ferrari no 51/1er LMGTE Pro) à 26 tours

25. François Perrodo - Nicklas Nielsen - Alessio Rovera (FRA-DEN-ITA/Ferrari no 83/1er LMGTE Am) à 31 tours

Classement du Championnat du monde d'endurance automobile après 4 manches sur 6 :

Pilotes :

1. José Maria Lopez (ARG) 120 pts

   Kamui Kobayashi (JPN) 120

   Mike Conway (GBR) 120

2. Brendon Hartley (NZL) 111

   Kazuki Nakajima (JPN) 111

   Sébastien Buemi (SUI) 111

3. André Negrao (BRA) 90

   Matthieu Vaxiviere (FRA) 90

   Nicolas Lapierre (FRA) 90

4. Richard Westbrook (GBR) 53

   Romain Dumas (FRA) 53

5. Franck Mailleux (FRA) 39

6. Ryan Briscoe (USA) 38

7. Luis Felipe Derani (BRA) 24

   Olivier Pla (FRA) 24

8. Gustavo Menezes (USA) 0

Constructeurs :

1. Toyota 141 pts

2. Alpine 90

3. Glickenhaus 37