Débriefing
Course mercredi, 23 sept. 2009. 00:30 samedi, 14 déc. 2024. 04:39
Renault s'en sort, pas Flavio. Beaucoup de courriels sur l'affaire du GP de Singapour 2008. Merci entre autres à Jean-François Duplain (Mirabel), Mathieu Papillon (Joliette), Paul Latreille (Laval).
La pénalité
"Une faute de cette gravité mérite une suspension définitive", a souligné le Conseil mondial du sport automobile dans son jugement. Mais compte tenu de la bonne volonté de Renault dans cette affaire, "le Conseil mondial n'appliquera cette suspension que si Renault se rend coupable d'une faute comparable" d'ici à la fin 2011. En clair, il suffit à Renault de ne pas commettre d'infraction pendant deux saisons pour être totalement blanchie.
La pire offense de l'histoire de la Formule Un n'aura donc pas engendré la pire pénalité possible.
Mais pouvait-il en être autrement ?
En novembre 1995, l'écurie Toyota de rallye a été suspendue pour 12 mois après avoir été trouvée coupable d'avoir utilisé des turbos illégaux sur sa voiture. Voilà une punition exemplaire. Dans un monde idéal, la même sévérité aurait dû s'appliquer à Renault.
Mais le monde est loin d'être idéal en 2009, surtout au plus haut échelon du sport automobile. Honda a quitté la discipline en décembre 2008, BMW en juillet 2009. Le Championnat du monde ne pouvait se permettre de perdre un troisième manufacturier.
Renault aurait certainement quitté la F1 à la suite d'une suspension d'un an, ou encore en se voyant infliger une très forte amende comparable à celle de 100 millions $US imposée à McLaren en 2007 (à noter que le fait d'enlever à Renault tous ses points de championnat de 2008 lui aurait fait perdre des revenus estimés à 60 millions $US).
La F1 aurait ainsi perdu non seulement une équipe de pointe, mais aussi un fournisseur de moteur (Red Bull cette année, probablement Williams l'an prochain).
De plus, Renault est un bon « citoyen corporatif » en Formule Un. Cette équipe organise des démonstrations avec ses monoplaces dans les rues de certaines villes à chaque année, les gens de l'écurie sont accueillants dans les paddocks et le département de communications aide à populariser la discipline avec des reportages vidéos, des visites d'usine, etc.
Enfin, il faut savoir que Renault est un constructeur très impliqué en sport automobile. La Régie fournit les moteurs à la série GP2 (le tremplin vers la F1) et, à partir de l'an prochain, le GP3. Renault parraine aussi des séries de formule monotype à travers l'Europe (Formule Renault 1.6 et 2.0 ainsi que le World Series by Renault ex-Formule Renault 3.5). Ainsi que des séries pour voitures de tourisme (Clio, Mégane).
Comme on le voit, la perte aurait été énorme.
Et il ne faut pas oublier les 500+ employés de l'écurie de F1 qui se seraient trouvés au chômage, victimes bien innocentes de cette affaire.
Comment le Conseil mondial du sport automobile a-t-il justifié cette pénalité somme toute bénigne pour l'écurie ? En pénalisant directement les deux principaux acteurs, le directeur général Flavio Briatore et le directeur de l'ingénierie Pat Symonds, qui ont demandé à Nelson Piquet Junior de provoquer l'intervention de la voiture de sécurité en ayant un accident.
Déjà Renault avait bien agi en les démissionnant avant l'audience devant le Conseil mondial.
Tout comme McLaren avait fait disparaître le directeur sportif Dave Ryan (3 avril) puis le patron Ron Dennis (16 avril) avant l'audience du 29 avril sur l'affaire de Lewis Hamilton au Grand Prix d'Australie (mensonge aux commissaires sportifs sur un dépassement effectué lors d'une neutralisation de course). L'écurie avait admis la faute et évoqué un « changement de culture » au sein de l'entreprise (c-a-d le départ de Dennis) pour solliciter la mansuétude du Conseil mondial. La sentence avait été une suspension de trois courses avec sursis.
Suspension à vie pour Briatore, suspension de cinq ans (une éternité en sport automobile) pour Symonds. Le message est quand même assez clair à ce niveau et, finalement, probablement dissuasif. Qui va tenter quelque chose de semblable en se sachant menacé de perdre sa source de revenus? N'est-ce pas le but ultime de ce jugement ?
En terminant, une question : comment Briatore et Symonds ont-ils pu être aussi idiots en pensant que cette histoire n'allait jamais être dévoilée au grand jour ?
Comment Symonds, un homme charmant (pour l'avoir interviewé à plusieurs reprises dans le cadre du GP du Canada) et intelligent (il était l'égal de Ross Brawn en matière de stratégie de course) a-t-il pu utiliser un stratagème aussi gros ?
Une dernière note. Plusieurs se demandent pourquoi la FIA ne corrige pas le classement du Grand Prix de Singapour 2008 en excluant l'écurie Renault. Tout simplement en raison de l'article 179bis du Code sportif international : « dans les épreuves d'un Championnat de la FIA, en cas de découverte d'un élément nouveau, les commissaires sportifs devront se réunir pour recevoir toutes explications utiles et juger à la lumière des faits et éléments exposés Le délai pendant lequel un recours en révision peut être introduit expire le 30 novembre de l'année en cours. »
Rappel historique
En 1994, l'écurie Benetton (l'ancêtre de l'écurie Renault, où se trouvaient déjà Briatore et Symonds) avait été trouvée coupable d'avoir modifié l'embout de l'appareil de ravitaillement (le filtre avait été enlevé pour favoriser un meilleur écoulement de l'essence). L'écurie s'en était sortie en blâmant un membre junior de l'organisation et en congédiant son directeur de l'ingénierie, Tom Walkinshaw. Hé oui, l'histoire est un éternel recommencement.
Flavio
Flavio Briatore, c'est à la fois le meilleur et le pire.
Le meilleur pour son regard extérieur porté sur la F1. Briatore ne venait pas du milieu du sport automobile, contrairement aux Ron Dennis, Frank Williams ou Christian Horner.
Son truc à lui, c'était le marketing.
Il souhaitait non pas une F1 plus technique, mais plus spectaculaire, plus près des spectateurs.
Il trouvait ridicule que les écuries roulent incessamment en essais privés, soit en l'absence de spectateurs. Il avait depuis longtemps avancé l'idée de réduire les essais privés et d'allonger le temps de piste pour les F1 lors des vendredis de Grands Prix. Une excellente idée enfin concrétisée cette année.
Il avait été élu comme l'un des directeurs de la FOTA, l'association des écuries de F1. Nul doute qu'il aurait proposé des idées novatrices pour améliorer le spectacle : deux courses par fin de semaine ? des grilles inversées ?
Peut-être allait-il trop loin avec certaines de ses idées ? Au moins il avait le mérite de tenter de faire progresser les choses.
Le pire de Flavio Briatore ? Il occupait beaucoup (trop) de terrain.
Gérant de pilotes. À hauteur de 20% selon certaines rumeurs. Parfois en faisant le bonheur de ses clients (Alonso, Webber), parfois en s'en débarrassant sans vergogne (mais s'est-il trompé sur les capacités de Frank Montagny, Heikki Kovalainen ?).
Responsable du programme de développement de pilotes de l'écurie Renault. Trois à six pilotes par année, qui signeraient des contrats de dix ans.
Patron d'une société qui assure la restauration pour les structures d'hospitalité de Renault sur les Grands Prix de F1.
À une certaine époque, il vendait des moteurs d'origine Renault, développés par la société Mecachrome, sous les noms Playlife (1998-2000) et Supertec (1999-2000).
Beaucoup de tentacules pour un seul homme
Mais j'avoue qu'il va me manquer ! Sans parler de Naomi, Heidi
La pénalité
"Une faute de cette gravité mérite une suspension définitive", a souligné le Conseil mondial du sport automobile dans son jugement. Mais compte tenu de la bonne volonté de Renault dans cette affaire, "le Conseil mondial n'appliquera cette suspension que si Renault se rend coupable d'une faute comparable" d'ici à la fin 2011. En clair, il suffit à Renault de ne pas commettre d'infraction pendant deux saisons pour être totalement blanchie.
La pire offense de l'histoire de la Formule Un n'aura donc pas engendré la pire pénalité possible.
Mais pouvait-il en être autrement ?
En novembre 1995, l'écurie Toyota de rallye a été suspendue pour 12 mois après avoir été trouvée coupable d'avoir utilisé des turbos illégaux sur sa voiture. Voilà une punition exemplaire. Dans un monde idéal, la même sévérité aurait dû s'appliquer à Renault.
Mais le monde est loin d'être idéal en 2009, surtout au plus haut échelon du sport automobile. Honda a quitté la discipline en décembre 2008, BMW en juillet 2009. Le Championnat du monde ne pouvait se permettre de perdre un troisième manufacturier.
Renault aurait certainement quitté la F1 à la suite d'une suspension d'un an, ou encore en se voyant infliger une très forte amende comparable à celle de 100 millions $US imposée à McLaren en 2007 (à noter que le fait d'enlever à Renault tous ses points de championnat de 2008 lui aurait fait perdre des revenus estimés à 60 millions $US).
La F1 aurait ainsi perdu non seulement une équipe de pointe, mais aussi un fournisseur de moteur (Red Bull cette année, probablement Williams l'an prochain).
De plus, Renault est un bon « citoyen corporatif » en Formule Un. Cette équipe organise des démonstrations avec ses monoplaces dans les rues de certaines villes à chaque année, les gens de l'écurie sont accueillants dans les paddocks et le département de communications aide à populariser la discipline avec des reportages vidéos, des visites d'usine, etc.
Enfin, il faut savoir que Renault est un constructeur très impliqué en sport automobile. La Régie fournit les moteurs à la série GP2 (le tremplin vers la F1) et, à partir de l'an prochain, le GP3. Renault parraine aussi des séries de formule monotype à travers l'Europe (Formule Renault 1.6 et 2.0 ainsi que le World Series by Renault ex-Formule Renault 3.5). Ainsi que des séries pour voitures de tourisme (Clio, Mégane).
Comme on le voit, la perte aurait été énorme.
Et il ne faut pas oublier les 500+ employés de l'écurie de F1 qui se seraient trouvés au chômage, victimes bien innocentes de cette affaire.
Comment le Conseil mondial du sport automobile a-t-il justifié cette pénalité somme toute bénigne pour l'écurie ? En pénalisant directement les deux principaux acteurs, le directeur général Flavio Briatore et le directeur de l'ingénierie Pat Symonds, qui ont demandé à Nelson Piquet Junior de provoquer l'intervention de la voiture de sécurité en ayant un accident.
Déjà Renault avait bien agi en les démissionnant avant l'audience devant le Conseil mondial.
Tout comme McLaren avait fait disparaître le directeur sportif Dave Ryan (3 avril) puis le patron Ron Dennis (16 avril) avant l'audience du 29 avril sur l'affaire de Lewis Hamilton au Grand Prix d'Australie (mensonge aux commissaires sportifs sur un dépassement effectué lors d'une neutralisation de course). L'écurie avait admis la faute et évoqué un « changement de culture » au sein de l'entreprise (c-a-d le départ de Dennis) pour solliciter la mansuétude du Conseil mondial. La sentence avait été une suspension de trois courses avec sursis.
Suspension à vie pour Briatore, suspension de cinq ans (une éternité en sport automobile) pour Symonds. Le message est quand même assez clair à ce niveau et, finalement, probablement dissuasif. Qui va tenter quelque chose de semblable en se sachant menacé de perdre sa source de revenus? N'est-ce pas le but ultime de ce jugement ?
En terminant, une question : comment Briatore et Symonds ont-ils pu être aussi idiots en pensant que cette histoire n'allait jamais être dévoilée au grand jour ?
Comment Symonds, un homme charmant (pour l'avoir interviewé à plusieurs reprises dans le cadre du GP du Canada) et intelligent (il était l'égal de Ross Brawn en matière de stratégie de course) a-t-il pu utiliser un stratagème aussi gros ?
Une dernière note. Plusieurs se demandent pourquoi la FIA ne corrige pas le classement du Grand Prix de Singapour 2008 en excluant l'écurie Renault. Tout simplement en raison de l'article 179bis du Code sportif international : « dans les épreuves d'un Championnat de la FIA, en cas de découverte d'un élément nouveau, les commissaires sportifs devront se réunir pour recevoir toutes explications utiles et juger à la lumière des faits et éléments exposés Le délai pendant lequel un recours en révision peut être introduit expire le 30 novembre de l'année en cours. »
Rappel historique
En 1994, l'écurie Benetton (l'ancêtre de l'écurie Renault, où se trouvaient déjà Briatore et Symonds) avait été trouvée coupable d'avoir modifié l'embout de l'appareil de ravitaillement (le filtre avait été enlevé pour favoriser un meilleur écoulement de l'essence). L'écurie s'en était sortie en blâmant un membre junior de l'organisation et en congédiant son directeur de l'ingénierie, Tom Walkinshaw. Hé oui, l'histoire est un éternel recommencement.
Flavio
Flavio Briatore, c'est à la fois le meilleur et le pire.
Le meilleur pour son regard extérieur porté sur la F1. Briatore ne venait pas du milieu du sport automobile, contrairement aux Ron Dennis, Frank Williams ou Christian Horner.
Son truc à lui, c'était le marketing.
Il souhaitait non pas une F1 plus technique, mais plus spectaculaire, plus près des spectateurs.
Il trouvait ridicule que les écuries roulent incessamment en essais privés, soit en l'absence de spectateurs. Il avait depuis longtemps avancé l'idée de réduire les essais privés et d'allonger le temps de piste pour les F1 lors des vendredis de Grands Prix. Une excellente idée enfin concrétisée cette année.
Il avait été élu comme l'un des directeurs de la FOTA, l'association des écuries de F1. Nul doute qu'il aurait proposé des idées novatrices pour améliorer le spectacle : deux courses par fin de semaine ? des grilles inversées ?
Peut-être allait-il trop loin avec certaines de ses idées ? Au moins il avait le mérite de tenter de faire progresser les choses.
Le pire de Flavio Briatore ? Il occupait beaucoup (trop) de terrain.
Gérant de pilotes. À hauteur de 20% selon certaines rumeurs. Parfois en faisant le bonheur de ses clients (Alonso, Webber), parfois en s'en débarrassant sans vergogne (mais s'est-il trompé sur les capacités de Frank Montagny, Heikki Kovalainen ?).
Responsable du programme de développement de pilotes de l'écurie Renault. Trois à six pilotes par année, qui signeraient des contrats de dix ans.
Patron d'une société qui assure la restauration pour les structures d'hospitalité de Renault sur les Grands Prix de F1.
À une certaine époque, il vendait des moteurs d'origine Renault, développés par la société Mecachrome, sous les noms Playlife (1998-2000) et Supertec (1999-2000).
Beaucoup de tentacules pour un seul homme
Mais j'avoue qu'il va me manquer ! Sans parler de Naomi, Heidi