Les questions de la saison 2010.

Le champion Sebastian Vettel

Le plus grand nombre de positions de tête (10), le plus grand nombre de victoires (5) sur un pied d'égalité avec Fernando Alonso. Des statistiques qui ne mentent pas.

Sans ennuis, Sebastian Vettel aurait conquis le titre bien avant la dernière épreuve de la saison.

Voici les points perdus par malchance :

- 13 à Bahrein (perte puissance moteur en raison d'une bougie défectueuse : de 1er à 4e)

- 25 en Australie (sortie de piste sur bris de freins)

- 3 en Espagne (doit ralentir en raison du bris d'un disque de frein : de 2e à 3e)

- 12 en Grande-Bretagne (pneu arrière crevé par Hamilton: de 2e à 7e)

- 25 en Corée (bris de moteur)

Pour un total de 78 points : plus que trois victoires!

Bien sûr Vettel a commis des erreurs :

- accrochage avec son coéquipier Mark Webber en Turquie

- perte de contrôle menant à un contact avec Jenson Button en Belgique

Sa bévue sous la neutralisation en Hongrie, alors qu'il n'a pas respecté la distance maximale de dix longueurs derrière la voiture de sécurité? Ultimement de sa faute, mais j'ai toujours cru qu'en de telles occasions l'écurie avait une part de blâme à assumer, pour ne pas avoir “accompagné” le pilote tout au long de la procédure de neutralisation; de la même façon qu'on lui rappelle de réchauffer ses pneus et ses freins.

Mais les autres prétendants au titre ont aussi gaffé, notamment Alonso :

- départ anticipé en Chine (pénalité de passage aux puits)

- accident aux essais libres du samedi matin à Monaco (rate la séance de qualifications et part dernier)

- chicane court-circuitée en Grande-Bretagne (pénalité de passage aux puits)

- sortie de piste en Belgique

Peut-on déjà affirmer que Vettel est un super pilote, une super vedette en puissance, compte tenu qu'il pilotait une Red Bull RB6, indéniablement la meilleure voiture du plateau?

Probablement. Mais avant de le claironner, j'aimerais voir une chose : Vettel partir loin dans le peloton et effectuer une remontée incroyable.

Jusqu'ici, ses 10 victoires en carrière ont été acquises en partant de la pole (7 fois), de la deuxième place sur la grille (2 fois) ou au pire de la 3e place (1 fois).

J'aimerais aussi le voir exécuter des manœuvres de dépassement d'anthologie, comme Alonso ou Lewis Hamilton.

Interdiction des ravitaillements

LA grande nouveauté de la saison 2010 était le règlement interdisant les ravitaillements. Objectif : forcer les pilotes à se dépasser en piste au lieu d'attendre de passer devant un rival via une stratégie d'arrêts aux puits.

Résultat positif Effectivement, on a vu des pilotes dans l'obligation d'effectuer un dépassement en piste pour gagner une place, mais sans pour autant être capable de le faire!

Lors de la première course de la saison, à Bahrein, les pilotes se sont plaints de l'impossibilité de dépasser. Mêmes déclarations lors de la dernière course, à Abou Dhabi.

Certains en sont même venus à regretter les ravitaillements!

Mark Webber, en conférence de presse d'après-course au Brésil : «La majorité des courses se décident le samedi (en qualification) ou lors du premier tour. Sinon on doit se contenter de se suivre… auparavant on pouvait utiliser une stratégie, jouer avec le niveau d'essence à bord pour décider de la longueur du premier relais. Avant on pouvait jouer son jeu, mais ce n'est plus le cas.»

Dans un courriel, monsieur Jean-Pierre Marchand de Boisbriand me souligne qu'il n'a relevé, cette saison, qu'un seul dépassement pour passer en tête d'un Grand Prix. C'était à Montréal : Hamilton passe Alonso au 15e tour.

J'y ajoute le Grand Prix de Turquie, alors que Hamilton a passé Button au 49e tour.

On peut aussi donner une mention honorable à ces courses :

- Malaisie : Vettel 3e sur la grille dépasse Rosberg (Q2) au départ puis Webber (pole) dans le premier virage pour passer en tête

- Grande-Bretagne : Webber 2e sur la grille dépasse Vettel (pole) dès le départ

- Brésil : Vettel 2e sur la grille dépasse Hulkenberg (pole) dès le départ

Mais pourquoi avons-nous, quand même, connu une saison si spectaculaire?

J'y vois trois raisons. Premièrement un plateau d'une qualité jamais atteinte, avec deux pilotes de pointe dans chacune des quatre grandes écuries (Red Bull, McLaren, Ferrari, Mercedes), auxquels il faut ajouter Robert Kubica chez Renault et Kamui Kobayashi chez Sauber.

Deuxième raison : la pluie, qui s'est manifestée lors de six Grands Prix, en qualifications (Malaisie, Brésil) ou en course (Australie, Chine, Belgique, Corée).

Dernière explication : l'intervention de la voiture de sécurité lors de 12 des 19 courses, ce qui est beaucoup.

Mais demeure que l'objectif déclaré derrière l'interdiction des ravitaillements n'a pas été réellement atteint. Pourquoi? les pneus.

Pneus

LE grand facteur ayant contribué à des courses prévisibles est la trop grande durabilité des pneus Bridgestone.

De conjonction avec l'interdiction des ravitaillements, les pneus devaient jouer un rôle important, notamment en se dégradant rapidement, ce qui allait forcer les pilotes et écuries à gérer une situation délicate à chaque course : un arrêt, deux, trois?

De plus l'obligation, pour les dix monoplaces participant à Q3, de prendre le départ avec les pneus leur ayant permis de réaliser leur meilleur chrono devait “introduire un élément de stratégie” selon la FIA. Ce que l'on n'a pas vu.

Les courses se sont généralement déroulées avec un seul changement de pneus, entre 25% et 30% de la distance.

On a connu le pire du pire au Grand Prix d'Italie, alors que Sebastian Vettel a effectué 52 des 53 tours de la course sur un train de pneus “optionnels” (à savoir la plus tendre des deux gommes offertes par Bridgestone pour cette course, l'autre étant la gomme dure).

Cela allait complètement à l'encontre de ce qui devait se produire.

Ce qui devait se produire, on l'a vu à Montréal (en raison d'un nouveau revêtement), où la dégradation des pneus a forcé les pilotes et écuries à improviser, à réagir à ce qui se passait en course. La majorité des pilotes ont dû faire deux arrêts, d'autres trois, ce qui a donné un Grand Prix complètement imprévisible.

L'an prochain, Pirelli sera le fournisseur exclusif des pneumatiques en F1. Le fabricant italien s'est déjà montré ouvert à offrir des gommes moins “béton”. Mais à une condition : que les gens de la F1 - surtout les pilotes - ne se plaignent pas ensuite, sur la place publique, de pneus « s'usant trop rapidement », ou « détruits après quelques tours ». À suivre.

Développement

Le développement des voitures a connu un rythme effréné cette saison.

L'écurie Renault estime que sa R30 était, à Abou Dhabi, pas moins de 2 secondes plus rapide que dans sa version de début de saison.

Le programme de développement a fait que la R30 a reçu 10 ailerons avant différents, 5 planchers, 2 capots moteur, 6 ailerons arrière, 7 ensembles de refroidissement des freins avant et 3 ensembles de refroidissement des freins arrière (liste non exhaustive).

De plus, l'équipe a dû adapter sur sa voiture les deux trouvailles techniques de la saison, soit les échappements bas à la Red Bull (installés sur la R30 au GP Europe fin juin) et l'aileron arrière soufflé inventé par McLaren (installé en Belgique fin août).

La saison a été longue pour les pilotes, mais aussi pour les ingénieurs et mécaniciens.

Barème de points

Certains attendaient beaucoup du nouveau barème de points. Or il n'a rien changé dans l'attribution du titre.

Par contre, Webber se classe 3e, alors qu'il aurait été 4e sous l'ancien système.

classement final barème 2010 :

Vettel 256 points

Alonso 252

Webber 242

Hamilton 240

classement final barême 2003-09 :

Vettel 104 points

Alonso 101

Hamilton 100

Webber 97

Webber compte une victoire de plus que Hamilton, mais il accumule aussi des points cruciaux avec trois 8e places et une 9e place. Est-ce une bonne affaire de décider du classement avec d'aussi piètres résultats?

Les circuits de monsieur Tilke

Dans un courriel, monsieur Julien Tremblay de Blainville me reproche (gentiment) mon amour des circuits dessinés par l'architecte allemand Hermann Tilke.

Je persiste à dire que Tilke a la bonne approche avec ce qui constitue la signature de ses circuits : une longue ligne droite menant à un virage serré, ce qui donne une bonne occasion de dépassement.

La majorité du temps, cette approche fonctionne très bien : Istanbul, Shanghai, Sepang, Hockenheim remanié. Singapour est pas mal, la Corée reste à évaluer. L'ancien A1 Ring était épatant.

Mais oui, le résultat est moins probant à Abou Dhabi. Le problème est simple : le virage qui précède la longue ligne droite est trop lent. Tous les pilotes le négocient en 2e vitesse, à 70 km/h, puis ont tous la même ré-accélération. Autrement dit, tout le monde a le même rythme, il est impossible de se démarquer.

Avant la ligne droite, il faudrait une courbe plus rapide (3e ou 4e vitesse) où un pilote pourrait faire la différence, comme à Shanghai avec le virage incliné qui mène à la ligne droite.

Cela dit, Tilke doit travailler avec ce qu'il a: un terrain vallonné peut donner un magnifique circuit (Istanbul). Une île créée artificiellement (Abou Dhabi), moins.

Mais j'avoue que Tilke a deux ratages à sa fiche : Bahrein et Valence!

Et je conclus en soulignant que les vieux circuits qui ont été modifiés par d'autres que Tilke sont parmi les plus ennuyants du championnat: Barcelone et le Hungaroring.

2011

Les gens de la FOTA (Association des équipes de F1) se préoccupent du spectacle en piste et ont déjà décidé de quelques mesures pouvant contribuer notamment aux dépassements :

- le retour du SREC (système de récupération d'énergie cinétique), avec plus de puissance

- un aileron arrière réglable (fonctionnement et modalités d'utilisation à déterminer)

Et nous aurons encore un plateau exceptionnel. Reprenez les Red Bull, McLaren et Ferrari, ajoutez des Mercedes compétitive, peut-être une Renault pouvant rouler à l'avant : quel spectacle en perspective!

Et le tout recommence dans moins de quatre mois.

Merci!

En terminant, merci à tous ceux et celles qui nous ont écrit tout au long de la saison. Sachez que tous les courriels ont été lus avec beaucoup d'intérêt.