Assez, c'est assez
Formule 1 jeudi, 4 juil. 2013. 08:26 samedi, 14 déc. 2024. 15:51Pirelli est fatigué de se faire casser du sucre sur le dos.
À la suite des incidents du Grand Prix d’Angleterre, soit un total de six pneus éclatés (Perez samedi matin; Hamilton, Massa, Vergne, Guttierrez et Perez en course), les accusations ont fusé de toute part envers Pirelli qui, selon le paddock F1, devrait exclusivement porter le blâme.
Après avoir pris le temps de la réflexion, le manufacturier italien a sorti les explications et pointé du doigt les écuries : inversion du sens de montage des pneus arrière, pression de pneus trop basse, carrossage trop élevé, les écuries dépassent les limites dans leur quête de performances à tout prix.
Inversion du sens de montage des pneus arrière. Depuis le début de la saison, certaines écuries ont constaté qu’elles obtenaient un gain en performance en inversant les pneus arrière, ce qui signifie que le flanc intérieur du pneu gauche devient le flanc extérieur du pneu droit.
Le problème, c’est que les pneus 2013 disposent d’une structure asymétrique et ne peuvent être interchangeables. Les flancs sont conçus pour supporter des charges spécifiques sur les parties externe et interne du pneu.
Pirelli souligne que l’on pratiquait cette inversion chez les écuries ayant subi des défaillances à Silverstone.
Le manufacturier avoue avoir sous-estimé cette pratique, qui aurait dû être interdite.
Pression de pneus trop basse. Une pression plus basse permet d’obtenir plus d’adhérence en virage, en accroissant la surface de contact du pneu avec le sol. Par contre, cela engendre plus de tensions dans la structure même du pneu.
Les techniciens de Pirelli ne peuvent imposer une pression minimale, ils ne peuvent que faire des recommandations.
Carrossage trop élevé. Le carrossage est l’angle d'inclinaison des roues avant par rapport à la verticale (le haut du pneu est plus près de la voiture que le bas). Généralement, on augmente le carrossage pour maintenir le pneu perpendiculaire au sol lorsque la voiture prend du roulis en virage.
Cette combinaison de pression basse et de carrossage élevé offre plus d’adhérence, mais fait souffrir le pneu à la jonction du flanc et de la bande de roulement, et ce, du côté intérieur du pneu. Celui qui a cédé à Silverstone.
Pour mettre fin à ces pratiques potentiellement dangereuses, Pirelli souhaite que la FIA s’en mêle et fasse respecter certains paramètres de réglages.
Par ailleurs, Pirelli va apporter les changements suivants :
- GP Allemagne : évolution des pneus actuels tels que testée au Canada
- GP Hongrie et suite (soit le temps de les fabriquer) : nouvelle gamme de pneus symétriques, dotés d’une structure en kevlar 2012 et de gommes 2013
Pirelli vs Red Bull prise 1
Cette histoire de carrossage trop élevé m’a trotté dans la tête jusqu’à ce que je me souvienne du Grand Prix de Belgique 2011.
Rappelez-vous d’Adrian Newey, le concepteur des Red Bull, au bord des larmes à la fin de la course.
Pourquoi? Parce que l’écurie avait pris un risque en faisant courir les RB7 avec un carrossage plus élevé que la recommandation de Pirelli (4,3 au lieu de 4 degrés). Ce qui rendait les pneus très fragiles sur le circuit rapide de Spa-Francorchamps.
À l’issue du Grand Prix, remporté par Vettel devant Webber, Newey voyait s’envoler le stress de son choix technique qui aurait pu mal se terminer. « Je dois dire qu’il s’agit d’une des courses les plus angoissantes dans lesquelles j’ai été impliquées… j’étais soulagé que les deux pilotes soient hors de danger », a-t-il déclaré à la BBC.
Pirelli n’avait pas apprécié. Dès la course suivante, le manufacturier italien avait réduit le carrossage maximum de 4 à 3,5 degrés. De plus, la FIA s’en était mêlé en prenant sur elle-même de mesurer le carrossage et de menacer d’expulsion toute écurie ne respectant pas la mesure maximum.
Depuis, on n’en n’a plus entendu parler. Mais gageons que la guerre de mots qui oppose Red Bull à Pirelli cette saison a pris naissance en août 2011.
Le malheur des uns fera le bonheur des autres
On peut présumer que Pirelli va fournir des pneus plus robustes (gomme et structure) d’ici la fin de la saison.
Cela risque fort d’affecter le niveau de performances des voitures.
La Lotus E21 est la voiture la plus douce avec les pneus, notamment grâce à sa suspension hydraulique. On en voudra comme preuve que cette écurie n’a pas connu d’ennuis de pneus à Silverstone. Mais la E21 possède le défaut de ses qualités : une difficulté à faire monter les pneus en température, qui sera exacerbée avec des pneus plus durs.
La Ferrari F138 n’est pas aussi douce avec ses pneus que la Lotus, mais elle éprouve aussi des difficultés à faire monter ses pneus en température (ce qui explique ses difficultés en qualifications).
Ces deux écuries pourraient souffrir de la nouvelle orientation de Pirelli pour la suite de la saison.
À l’opposé…
On le sait, la Mercedes W04 maltraite ses pneus arrière. Or, la structure en kevlar que Pirelli va utiliser d’ici la fin de la saison génère des températures plus basses sur les pneus arrière, de l’ordre de 10 °C.
Quant à la Red Bull RB9, qui est un peu trop exigeante sur les pneus avant, elle profitera aussi de la nouvelle donne pneumatique. Rappelons que Red Bull se plaint des pneus trop « fragiles » de Pirelli depuis le début de la saison, réclamant même un retour aux pneus 2012.
Verra-t-on une fin de saison Mercedes vs Red Bull?