COVID-19 : la F1 ternie par ses tergiversations
Formule 1 vendredi, 13 mars 2020. 07:40 mercredi, 11 déc. 2024. 05:44MELBOURNE, Australie - Le cafouillage sur l'annulation du GP d'Australie puis le report de deux autres manches du championnat du monde de F1 a quelque peu terni l'image de la F1 qui s'est montrée davantage préoccupée de ses intérêts financiers que de faire face à la propagation rapide de l'épidémie de coronavirus.
« L'argent est roi » a constaté jeudi sans détours le sextuple champion du monde et tenant du titre Lewis Hamilton alors que les responsables de la F1 ne semblaient même pas encore envisager le report de l'épreuve australienne, ainsi que celles prévues à Bahreïn et au Vietnam.
« Je suis très, très surpris que nous soyons ici », avait ajouté le Britannique lors d'une conférence de presse pendant que le paddock et les tribunes du circuit de Melbourne se remplissaient en prévision du weekend. « C'est bien qu'il y ait des courses automobiles mais, pour moi, c'est choquant que nous soyons tous ici assis dans cette pièce. »
À lire également
« Trump interrompt les vols depuis l'Europe, le championnat NBA est suspendu et pourtant la F1 continue », s'était étonné celui qui est pourtant payé plusieurs dizaines de millions de dollars par an pour piloter sa Mercedes.
Autrement dit, les responsables de la F1 n'auraient pas dû attendre d'être en Australie pour s'interroger sur la tenue du Grand Prix. Ceux du MotoGP ou de la Formule E (qui a suspendu son championnat pour deux mois vendredi) n'ont pas hésité à annuler ou reporter des épreuves avant que les équipes, les pilotes et leur coûteux matériel n'arrivent sur place.
La confirmation jeudi soir d'un cas positif au coronavirus au sein de McLaren, qui a alors décidé de se retirer de la course, a plongé la F1 dans une nuit d'incertitude et de déclarations contradictoires, exposant les rivalités entre écuries mais aussi la difficulté pour ses dirigeants d'agir rapidement.
Des écuries voulaient courir
Selon une source proche des discussions s'exprimant sous couvert d'anonymat, cinq équipes envisageaient encore jeudi soir de courir après l'annonce par McLaren de sa décision de plier bagages. Il s'agissait de Mercedes et de celles qu'elle motorise (Racing Point et Williams), de Red Bull et de son écurie satellite AlphaTauri.
Mais Toto Wolff, patron de l'écurie Mercedes, a reçu un coup de téléphone d'Ola Källenius, le PDG du groupe Daimler auquel elle appartient, lui enjoignant de changer de camp. Il a vite obtempéré, entraînant Racing Point et Williams. Restaient alors seules dans le camp des partisans d'une participation Red Bull et AlphaTauri, toutes deux propulsées par Honda.
Ce n'est pas avec quatre monoplaces que l'on fait une course, d'autant plus qu'un article du règlement sportif de la Fédération internationale automobile (FIA) indique qu'avec moins de douze voitures au départ, un Grand Prix peut-être annulé.
Seul hic, il faut pour appliquer ce point l'accord de la FIA et du promoteur de la F1 Formula One Management (FOM), dont le président Chase Carey était alors dans l'avion le ramenant du Vietnam où il s'était rendu en prévision du Grand Prix, le premier dans ce pays, le 5 avril.
Arrivé à Melbourne vendredi matin, celui-ci n'a toutefois pas eu à trancher puisque le Premier ministre de l'État de Victoria, où se trouve cette ville, avait décidé quelques minutes auparavant d'interdire aux fans de se rendre au circuit, invoquant des « impératifs de sécurité publique ».
Les organisateurs, qui paient très cher la FOM le droit d'accueillir le plateau de la F1, n'avaient dès lors plus d'autre choix que de l'annuler.
Atmosphère délétère
Plutôt que d'annoncer sur le champ à Melbourne des décisions concernant les épreuves de Bahreïn, où avait déjà été décidé un huis clos, et du Vietnam, Chase Carey a encore fait trainer les choses. Ce n'est encore que douze heures plus tard qu'est tombée la décision concernant ces deux manches.
La mauvaise pièce jouée à Melbourne survient dans une atmosphère délétère qui voit les écuries à couteaux tirés sur la polémique née de l'annonce d'un accord confidentiel entre la FIA et Ferrari sur le fonctionnement litigieux de son moteur l'an dernier ou encore sur le cas de la Racing Point 2020, copiée sur la Mercedes championne du monde en 2019.
Des équipes, telles Renault ou Haas, s'interrogent aussi sur leur avenir dans cette discipline coûteuse, tout comme Honda qui lorgne vers la technologie électrique.