PARIS - La saison 2013 de Formule 1, qui débute le 17 mars à Melbourne par le Grand Prix d'Australie, s'annonce comme un nouveau feuilleton à sensations avec en vedette l'écurie Red Bull Racing, sextuple championne du monde avec trois titres pilotes et constructeurs d'affilée.

Pour relever le programme, et malgré la retraite définitive de Michael Schumacher, il y aura encore cinq champions du monde sur la grille de départ.

Après la disparition de HRT, la coalition internationale de la F1 sera composée de 11 écuries rescapées de la crise économique, soit 22 pilotes de haut vol, dont cinq débutants. Trois pays trustent le plateau avec chacun quatre pilotes: l'Allemagne (Vettel, Rosberg, Hulkenberg, Sutil), la Grande-Bretagne (Hamilton, Button, Di Resta, Chilton) et la France (Bianchi, Grosjean, Pic, Vergne).

Tenante du titre, Red Bull s'est bien calmée en 2012 (7 victoires au lieu de 12 en 2011) et Sebastian Vettel n'a conquis sa 3e couronne qu'avec trois points d'avance sur l'Espagnol Fernando Alonso (Ferrari), au bout du suspense d'un dernier GP mémorable.

En attendant le retour des pilotes, ce sont les ingénieurs qui ont repris la main durant l'hiver, sur fond de stabilité de la réglementation technique, pour faire évoluer tout ce qu'il était possible d'améliorer, notamment en terme d'aérodynamique.

Un revenant et cinq débutants

Dans le camp des optimistes, on peut imaginer que Lotus, avec sa créativité, ou Mercedes-AMG, avec ses moyens financiers, vont perturber encore plus le trio infernal Red Bull - McLaren - Ferrari. Si l'on est carrément utopiste, on peut rêver que Sauber, Force India et Williams monteront plus souvent sur le podium.

Reste l'hypothèse la plus réaliste: Red Bull, qui a joué la discrétion tout l'hiver en faisant souvent rouler sa nouvelle RB9 à moteur Renault avec un maximum d'essence dans le réservoir, pour éviter de signer de trop bons chronos, va remettre les pendules à l'heure dès le début de saison, malgré les progrès évidents de ses rivales.

Côté pilotes, il y aura un revenant sur la grille, avec l'Allemand Adrian Sutil, 30 ans, de retour chez Force India, et cinq débutants pleins de talent: le Finlandais Valtteri Bottas (Williams), le Mexicain Esteban Gutierrez (Sauber), le Néerlandais Giedo van der Garde (Caterham), le Britannique Max Chilton et le Français Jules Bianchi, invité de dernière minute, chez Marussia.

Un GP de moins

Pour leur faire une place au soleil, six pilotes ont été éjectés sans frais, malgré la longueur de leur palmarès, leur expérience... ou le poids de leur valise de dollars: deux Allemands, Schumacher et Timo Glock, un Brésilien, Bruno Senna, un Finlandais, Heikki Kovalainen, un Russe, Vitaly Petrov, et un Japonais, Kamui Kobayashi. La F1 est sans pitié, surtout en période de crise.

Comme la crise continue, il n'y aura plus que 19 Grands Prix au calendrier. Bernie Ecclestone, 82 ans, toujours grand argentier de la F1, n'a pas réussi à régler tous les problèmes financiers de la planète. Il a surtout échoué à trouver un client français, turc ou autrichien solvable pour la date du 21 juillet, longtemps restée vacante.

Enfin, chez Pirelli, les pneus seront encore plus tendres et difficiles à gérer, craignent la plupart des écuries. Une tendance se dégage, au vu des essais hivernaux en Espagne: les écarts seront encore plus faibles, donc les courses encore plus animées.

Reste à savoir si le « record » de 2012 sera battu: huit vainqueurs de GP différents, dans six écuries. Du jamais vu depuis la saison 1982, qui avait connu 11 vainqueurs.

L'écurie Red Bull n'est pas seule

Derrière l'écurie Red Bull, le titre honorifique de vice-champion du monde 2012 s'est joué pendant toute la saison entre Ferrari, mal parti, mais bien arrivé avec une F2012 lente, mais solide, et McLaren, qui alignait des MP4-27 plus performantes, mais moins fiables.

Le duel reprend dimanche 17 mars à Melbourne, entre une marque anglaise fondée il y a exactement cinquante ans, en 1963, par un pilote néo-zélandais d'exception, Bruce McLaren, et une firme italienne ayant parfaitement réussi sa reconversion dans le monde moderne de la technologie et du marketing, après la mort d'Enzo Ferrari.

Mardi, au Salon de Genève, les deux rivaux historiques de la F1 ont présenté leurs nouveaux modèles, dits "de série": deux véritables voitures de course à plus d'un million d'euros pièce, baptisées modestement « LaFerrari » et « P1 » (pour première position), que quelques centaines de clients fortunés pourront immatriculer pour aller se promener, entre deux Grands Prix.

Car la F1 reste la raison d'être de Ferrari et McLaren, en plus de son pouvoir d'attraction qui se traduit aussi en ventes de jolies GT hors de prix. De quoi participer au financement de ces monoplaces rutilantes que les présidents, Luca di Montezemolo et Ron Dennis, continuent d'entretenir à grands frais.

Deux équipes aux antipodes

Les uns sont anglais jusqu'au bout des ongles, garants de la tradition anglo-saxonne de la F1 et dirigés sur la piste par l'impeccable Martin Whitmarsh. L'équipe technique, pillée régulièrement par les écuries rivales, a longtemps régné sur la F1. Et elle produit chaque année une monoplace de haut niveau, capable de viser poles positions, podiums et victoires.

Les autres sont à la fois italiens et cosmopolites, avec à leur tête un gars souriant au profil d'étudiant attardé, Stefano Domenicali. « Si Ferrari était comme l'Italie, elle ne pourrait pas gagner: trop lourde, trop coûteuse », a plaisanté Montezemolo lors de la présentation de la nouvelle F138, qui va viser au moins un titre mondial en 2013, dans une pointe d'humour italien, à la sauce Maranello.

Côté pilotes, les rôles sont bien distribués pour 2013: un patron dans chaque équipe. Jenson Button pour McLaren, champion du monde 2009 et débarrassé de la rivalité interne avec Lewis Hamilton, parti chez Mercedes. Fernando Alonso pour la Scuderia, auréolé de la meilleure saison de sa carrière, dixit le double champion du monde espagnol.

Leur énorme expérience, alliée à de grandes qualités humaines, en fait des leaders respectés. Pointe de vitesse, sagesse en course: chaque saison ils sont aux avant-postes, capables de viser titre et victoires.

Leurs coéquipiers ont des profils aussi différents que leur fin de saison 2012: Felipe Massa, 31 ans, comme Alonso, a terminé en trombe et accumulé des points précieux pour la Scuderia, alors que Sergio Pérez, 23 ans (dix de moins que Button), d'abord auteur de trois podiums, n'a plus marqué aucun point pour Sauber après l'annonce de son transfert chez McLaren.

Le Brésilien attaque sa 8e saison chez Ferrari, le Mexicain débute dans l'écurie anglaise. Leur rôle aussi sera crucial.

Une place au soleil pour Mercedes et Lotus?

Lotus a piqué à Mercedes, en 2012, la place de quatrième « top team » derrière les trois caïds de la Formule 1 moderne, Red Bull, Ferrari et McLaren ; la saison 2013 peut permettre à ces deux écuries, qui ont les moyens de leurs ambitions, de grimper encore plus haut.

« Le budget sera supérieur à celui de l'an dernier », a avoué Eric Boullier, le « Team Principal » français de Lotus. En plus des fonds de Genii Capital et du Luxembourgeois Gérard Lopez, qui avait racheté Renault F1, l'équipe d'Enstone a séduit depuis trois géants de l'économie mondiale: Unilever, Microsoft et enfin Coca-Cola.

Comme l'argent est le nerf de la guerre en F1, les résultats sportifs ont suivi. La monoplace 2012, baptisée E20, était à la fois rapide et fiable. Le Finlandais Kimi Räikkönen, champion du monde 2007, a été aussi régulier que brillant. Du coup, les classements finaux ont dépassé les objectifs initiaux: « Iceman » 3e côté pilotes, Lotus 4e chez les constructeurs.

Le plus dur c'est toujours de confirmer, de rester au plus haut niveau. Cet hiver, les Lotus de Räikkönen et Romain Grosjean, conservé par Boullier malgré une fin de saison délicate (accrochages à Spa et Suzuka), ont été moins en vue que l'an dernier à la même époque. Mais ça ne veut pas dire grand chose.

Compteurs à zéro

Pendant ce temps, les "Flèches d'Argent" brillaient de mille feux et Mercedes terminait les derniers essais de Barcelone en tête des chronos: Lewis Hamilton meilleur temps le samedi, Nico Rosberg meilleur temps le dimanche. De quoi faire réfléchir leurs rivales, pas seulement chez Lotus.

« S'il y a bien une équipe qui a été régulièrement rapide, tout en étant consistante, c'est bien Mercedes », a dit Jenson Button, pilote McLaren et spectateur attentif de son ancien coéquipier, Hamilton, dans la W04 conçue par son ex-patron, Ross Brawn, à l'époque de son seul titre mondial, en 2009, chez Brawn GP.

Depuis que Brawn GP est devenu Mercedes-AMG, début 2010, la marque à l'étoile n'a jamais touché les dividendes de ses investissements massifs, notamment dans un staff technique pléthorique. Fin 2012, la retraite définitive de Michael Schumacher a été l'occasion de tirer le bilan et de remettre les compteurs à zéro.

Exit Norbert Haug, le patron historique de Mercedes Motorsport, remplacé par un tandem d'Autrichiens: Niki Lauda, 64 ans, triple champion du monde de F1, et Toto Wolff, 41 ans, homme d'affaires ambitieux, qui visait les commandes de Williams F1 jusqu'à ce que Mercedes lui propose « un job que je ne pouvais pas refuser », a dit Wolff.

Encore mieux, Mercedes est allé chercher chez McLaren l'excellent Hamilton pour succéder à un Schumacher en fin de course. Avec un pilote de ce calibre, l'un des trois meilleurs de la F1 moderne -avec Sebastian Vettel et Fernando Alonso- tous les espoirs sont permis pour l'écurie allemande.

Lotus contre Mercedes, Räikkönen contre Hamilton, mais aussi Grosjean contre Rosberg, en deuxième rideau : il y a là de quoi ravir en 2013 les fans de F1. Ce sera le duel des ambitieux, avec probablement des pole positions, des podiums, et même quelques victoires à la clé.

Les vingt derniers champions du monde des pilotes et des constructeurs de Formule 1 avant le Grand Prix d'Australie, 1re manche de la saison 2013, dimanche 17 mars sur le circuit de l'Albert Park à Melbourne:

Pilotes:

2012: Sebastian Vettel (GER/Red Bull-Renault)

2011: Sebastian Vettel (GER/Red Bull-Renault)

2010: Sebastian Vettel (GER/Red Bull-Renault)

2009: Jenson Button (GBR/Brawn GP)

2008: Lewis Hamilton (GBR/McLaren-Mercedes)

2007: Kimi Räikkönen (FIN/Ferrari)

2006: Fernando Alonso (ESP/Renault)

2005: Fernando Alonso (ESP/Renault)

2004: Michael Schumacher (GER/Ferrari)

2003: Michael Schumacher (GER/Ferrari)

2002: Michael Schumacher (GER/Ferrari)

2001: Michael Schumacher (GER/Ferrari)

2000: Michael Schumacher (GER/Ferrari)

1999: Mika Häkkinen (FIN/McLaren-Mercedes)

1998: Mika Häkkinen (FIN/McLaren-Mercedes)

1997: Jacques Villeneuve (CAN/Williams-Renault)

1996: Damon Hill (GBR/Williams-Renault)

1995: Michael Schumacher (GER/Benetton-Renault)

1994: Michael Schumacher (GER/Benetton-Ford)

1993: Alain Prost (FRA/Williams-Renault)

Constructeurs

2012: Red Bull Racing (Sebastian Vettel et Mark Webber), moteur Renault

2011: Red Bull Racing (Sebastian Vettel et Mark Webber), moteur Renault

2010: Red Bull Racing (Sebastian Vettel et Mark Webber), moteur Renault

2009: Brawn GP (Jenson Button et Rubens Barrichello), moteur Mercedes

2008: Ferrari (Kimi Räikkönen et Felipe Massa)

2007: Ferrari (Kimi Räikkönen et Felipe Massa)

2006: Renault F1 (Fernando Alonso et Giancarlo Fisichella)

2005: Renault F1 (Fernando Alonso et Giancarlo Fisichella)

2004: Ferrari (Michael Schumacher et Rubens Barrichello)

2003: Ferrari (Michael Schumacher et Rubens Barrichello)

2002: Ferrari (Michael Schumacher et Rubens Barrichello)

2001: Ferrari (Michael Schumacher et Rubens Barrichello)

2000: Ferrari (Michael Schumacher et Rubens Barrichello)

1999: Ferrari (Michael Schumacher, Eddie Irvine et Mika Salo)

1998: McLaren-Mercedes (David Coulthard et Mika Häkkinen)

1997: Williams-Renault (Jacques Villeneuve et Heinz-Harald Frentzen)

1996: Williams-Renault (Damon Hill et Jacques Villeneuve)

1995: Benetton-Renault (Michael Schumacher et Johnny Herbert)

1994: Benetton-Renault (Michael Schumacher et Jos Verstappen)

1993: Williams-Renault (Alain Prost et Damon Hill)