MUNICH  - Le patron de la Formule 1, le controversé Bernie Ecclestone, est jugé à partir de jeudi en Allemagne pour corruption dans une affaire qui menace 40 ans de règne sur le sport automobile.

Ecclestone, 83 ans, est accusé par un tribunal de Munich (sud) d'avoir versé 44 millions de dollars de pots-de-vins, en 2006 et 2007, au banquier allemand Gerhard Gribkowsky, qui travaillait pour la banque publique bavaroise Bayern LB, en vue de conclure la vente des droits de la F1 au fonds d'investissement CVC Capital Partners.

CVC avait à l'époque racheté pour 839 millions de dollars les droits de la F1 détenus jusque-là par Bayern LB.

Le milliardaire, qui a débuté comme vendeur de voitures d'occasion avant de devenir le tout-puissant patron de la F1, récoltant au passage le surnom de Napoléon notamment en raison de sa petite taille, clame son innocence et se refuse à plaider coupable.

« Je vais aller à ce procès pour prouver mon innocence », a-t-il encore dit récemment, dans un entretien au journal britannique The Telegraph.

Les motivations liées à ce versement de 44 millions seront au coeur des débats, Ecclestone affirmant avoir été victime d'un chantage tandis que Gribkowsky soutient qu'il s'agissait d'un pots-de-vin.

M. Gribkowsky, alors directeur des risques de l'établissement financier allemand, a été condamné en juin 2012 à huit ans et demi de prison pour corruption et fraude fiscale pour n'avoir pas déclaré les millions versés.

Lors de ce procès, Ecclestone, entendu comme témoin, avait alors reconnu ce versement mais l'avait présenté comme une forme de « prix du silence » pour que M. Gribkowsky ne fasse pas de révélations gênantes sur son patrimoine au fisc britannique.

« En ce moment, c'est moi le perdant, car les gens médisent sur moi, sans vraiment comprendre de quoi il s'agit », a déclaré le Britannique à la télévision allemande ARD, il y a quelques jours.

Deux jours par semaine

À Munich, Ecclestone va comparaître devant le juge qui a condamné Gribkowsky, Peter Noll. Dans les attendus du jugement. le magistrat avait estimé que Ecclestone avait « conduit au crime » le banquier.

Pour mieux se défendre pendant le procès, le patron de la F1 a pris un peu de recul dans la gestion de la compétition. Il est obligé d'être présent deux jours par semaine à Munich, mais le procès se déroulera le mercredi et le jeudi afin qu'il puisse continuer à se rendre sur les courses, à travers le monde. Des audiences sont déjà programmées jusqu'à mi-septembre.

L'avenir de la Formule 1 pourrait en tout cas se jouer à Munich.

« S'il est démontré que M. Ecclestone a commis quelque chose de pénalement répréhensible, nous le limogerons », a ainsi prévenu Donald Mackenzie, cofondateur de CVC, devant la Haute cour de justice britannique, l'an passé.

Dans un entretien au quotidien économique Handelsblatt, mercredi, le patron de la F1 chez Mercedes confiait également que le procès serait suivi avec beaucoup d'attention.

« Nous allons voir maintenant ce qui se passe exactement », a déclaré Toto Wolff, ajoutant : « naturellement, nous pensons à l'avenir de la F1, nous devons le faire ».

Ancien pilote automobile, Ecclestone avait racheté en 1971 l'écurie Brabham, fondée par Sir Jack, qui a ensuite conquis deux titres mondiaux avec le Brésilien Nelson Piquet (1981, 1983).

Les dernières estimations de sa fortune personnelle tournent autour de quatre milliards d'euros.

Roi de la F1, il est également une figure controversée. En 2005, il avait dû s'excuser après des remarques sexistes sur les femmes pilotes de Formule 1 et en 2009, il avait qualifié Adolf Hitler d'efficace.