DUBAÏ - La police a dispersé par la force des centaines de personnes manifestant près de Manama contre le Grand Prix de Formule 1 de Bahreïn prévu la semaine prochaine, avant un rassemblement similaire attendu vendredi à l'appel de l'opposition chiite, selon des témoins.

Bahreïn, petit royaume du Golfe, est le théâtre de troubles récurrents depuis février 2011 en raison d'un mouvement de contestation animé par les chiites, majoritaires, contre la dynastie sunnite des Al-Khalifa au pouvoir.

Lors de l'édition 2012 du Grand Prix, l'opposition chiite avait organisé des manifestations, parfois violentes, pour attirer l'attention sur ses demandes de réformes politiques, mais sans entraver le déroulement de la course. Celle-ci avait été néanmoins annulée en 2011 en raison des troubles.

Dans la nuit de jeudi à vendredi, des centaines de personnes ont manifesté dans un village chiite contre la nouvelle édition du GP de F1 prévue du 19 au 21 avril sur le circuit de Sakhir, au sud de Manama, selon des témoins.

« Votre course, un crime », ont scandé les protestataires à Khamis. « Le peuple veut la chute du régime », « À bas Hamad », le souverain bahreïni, a crié la foule qui répondait à un appel du Mouvement du 14 février, un groupe radical qui organise la contestation sur les réseaux sociaux.

Des heurts ont éclaté lorsque les forces anti-émeutes sont intervenues pour disperser la manifestation en lançant des gaz lacrymogènes et des bombes assourdissantes. Les manifestants ont riposté en lançant des cocktails molotov contre elles, ont précisé les témoins.

Un policier a été blessé par l'explosion d'un engin de fabrication artisanale, activé à distance, a indiqué le ministère de l'Intérieur.

Une nouvelle manifestation est prévue dans l'après-midi dans la banlieue chiite de Manama, à l'initiative du principal groupe d'opposition chiite, Al-Wefaq, qui a appelé à 10 jours de protestations, du 12 au 22 avril, coïncidant avec le GP, pour soutenir ses « revendications d'une transition démocratique ».

Dans une lettre ouverte adressée aux participants au Grand Prix de Bahreïn, la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) et d'autres ONG ont appelé les pilotes à s'engager « à soutenir la liberté et la justice à Bahreïn », par des déclarations à la presse ou sur les réseaux sociaux.

« Vous pouvez également dédier publiquement votre course à l'un des nombreux prisonniers d'opinion détenus pour avoir exercé leurs droits à la liberté d'expression, d'association et de réunion », ajoutent-elles.

Human Rights Watch a dénoncé mercredi une vague d'arrestations « arbitraires » de militants de l'opposition à l'approche du GP de F1.

Le Britannique Damon Hill, champion du monde de F1 en 1996, a appelé le président de la Fédération internationale de l'automobile (FIA), Jean Todt, à prendre position sur la situation à Bahreïn.

« Je pense que la position de Jean est de ne rien dire parce qu'autrement il fera de la politique. C'est une erreur car en réalité il est dans la politique [...] par sa participation à l'économie et à la réputation » de Bahreïn, a-t-il ajouté.

Selon la FIDH, au moins 80 personnes ont été tuées depuis le début de la contestation il y a plus de deux ans.

Opposition et pouvoir ont entamé le 10 février une nouvelle session du dialogue national, mais les discussions piétinent.