En début de saison l’an passé, les écuries ne comprenaient pas les pneus Pirelli, ce qui a donné une série historique avec sept vainqueurs différents en autant de courses. Une fin de semaine donnée, un Pastor Maldonado sur Wiliams ou un Nico Rosberg sur Mercedes pouvait s’avérer intouchable.

Les courses étaient enlevantes, avec une moyenne de deux ou trois arrêts aux puits. Certaines écuries se fourvoyaient dans leur stratégie de pneumatiques, comme Ferrari à Montréal. Rappelez-vous Alonso qui ne change pas de pneus en fin de course et termine 5e alors qu’une 2e place était possible.

Puis tout le monde (ou presque) a fini par comprendre comment traiter ces pneus et une hiérarchie – normale - s’est installée. Et les courses sont revenues à un seul arrêt, avec peu de bouleversements.

Pour remettre un peu d’action dans les courses, Pirelli, qui décidément veut faire partie prenante du spectacle, a changé ses pneus pour la saison 2013. Le manufacturier italien a produit de nouvelles gommes, plus tendres (la gomme dure 2013 est l’équivalente de la gomme médium 2012), ainsi que de nouvelles constructions.

Certains des objectifs de Pirelli feront plaisir aux pilotes : des pneus qui offrent plus d’adhérence (+ 3 % pour un gain moyen de 0,5 s au tour); des pneus qui montent plus rapidement en température (un problème des Ferrari en qualifications l’an passé), une plage d’utilisation plus large.

Conséquence heureuse de cette approche pour les ingénieurs : l’augmentation de l’appui mécanique (pneus) va se traduire par une diminution de l’importance de l’appui aérodynamique. Avantage réduit pour Red Bull qui demeure LA référence en matière de finesse aérodynamique ?

Les autres objectifs visés par Pirelli : une plus forte dégradation thermique des pneus, ce qui se traduira par un minimum de 2 à 3 arrêts par course; un plus grand écart (au moins 0,5s) entre chaque spécification de pneu (extra tendre, tendre, médium, dur) pour créer plus de dépassements.

Après les essais hivernaux, la bonne nouvelle est que déjà tout le monde comprend les pneus. La mauvaise nouvelle, c’est que ces pneus subissent rapidement une forte dégradation.

En raison des températures fraîches rencontrées lors des essais hivernaux, l’usure était vraiment préoccupante. Romain Grosjean (Lotus-Renault) parlait de chronos qui chutaient de cinq ou six secondes au bout de trois tours!

La situation ne devrait pas être aussi terrible en Australie, mais les écuries aborderont le premier Grand Prix avec une certaine appréhension.

Red Bull

Le directeur technique de Red Bull, Adrian Newey, a lancé quelques phrases intéressantes lors du lancement de sa dernière création, la RB9.

« RB9 est une voiture évolutionnaire ».

Ce qui a rapidement amené certains à affirmer qu’elle était le fruit d’une approche peut-être un peu conservatrice.

« Il a été difficile de poursuivre le développement de la voiture de l’an passé tout en faisant de la recherche pour la RB9. Bien sûr cela nous a bien servi, mais cela nous a aussi laissé bien peu de temps pour concevoir et construire cette voiture. »

Tentative pour endormir l’adversaire ou aveu d’un manque de temps? A-t-il eu le temps de trouver ces zones grises du règlement qu’il sait si bien exploiter? Les qualifications de Melbourne devraient nous donner une première indication…

« Le changement le plus important ne concerne pas les règlements, mais les nouveaux pneus Pirelli. »

Voir ci-dessus…

Red Bull pourrait aussi souffrir de certaines applications du règlement technique, à savoir des tests encore plus sévères pour la rigidité de l’aileron avant, ainsi qu’une limitation de la cartographie moteur.

Mais il faut toujours se méfier du cerveau en ébullition de Newey.

Les autres

Qu’en est-il des adversaires de Red Bull?

McLaren tentera de poursuivre là où elle avait laissé fin 2012, à savoir avec la voiture la plus rapide. D’ailleurs Lewis Hamilton aurait été champion du monde s’il n’avait souffert du manque de fiabilité de sa monture et de quelques gaffes dans les puits.

Lors des essais hivernaux, la nouvelle MP4-28 s’est montrée rapide à quelques occasions. Mais cette voiture a aussi poussé Jenson Button à déclarer qu’elle était bien difficile à cerner, ce qui peut s’expliquer par le fait que le MP4-28 est la voiture 2013 la plus modifiée par rapport aux monoplaces 2012. Et chez McLaren, on affirme que la voiture a été délibérément conçue pour offrir de grandes possibilités de développement en cours de saison.

La Ferrari F138 est d’emblée bien meilleure que la F2012 (Alonso parle d’une autre planète). Mais le train arrière ne semble pas offrir autant d’adhérence que les meilleurs modèles 2013; l’écurie avoue avoir encore du travail à faire pour perfectionner son système de soufflage des échappements.

Pour cela, elle peut cependant compter sur les améliorations apportées à son département de simulation sur ordinateur (une faiblesse chronique détectée par Pat Fry, le directeur technique arrivé en mai 2011 en provenance de McLaren). De plus, la F138 a été développée dans la soufflerie Toyota à Cologne en Allemagne, puisque la soufflerie Ferrari est en rénovation, afin d’éviter les ennuis de corrélation entre les résultats en soufflerie et les résultats en piste qui ont affecté le programme de développement de la Scuderia en 2012.

La Lotus E21, si elle conserve les qualités de sa devancière en matière de préservation de pneus, pourraient connaître d’emblée de bons résultats, compte tenu du haut niveau de dégradation des pneus Pirelli 2013. L’an passé, Lotus avait été à la traîne dans l’exploitation des gaz d’échappement à des fins aérodynamiques. Si elle maîtrise mieux ce domaine et si elle arrive à bien faire fonctionner son système passif de double DRS, attention!

Mercedes semble avoir réalisé un grand pas en avant avec sa W04. La voiture a signé des temps canons lors de la dernière semaine d’essais hivernaux à Barcelone. Résultat légitime ou envie de se faire plaisir avec une voiture légère?

La Williams FW35 est la première création de Mike Coughlan, l’ex-concepteur en chef de McLaren (1999-2007) arrivé en novembre 2011 à la suite d’un exil en NASCAR pour avoir été pris dans l’affaire d’espionnage entre McLaren et Ferrari. La voiture, neuve à 80%, a été la seule à rater la première séance d’essais présaison. Quatre jours de plus pour développer la voiture ou quatre jours de perdus dans la compréhension des pneus 2013?

La Sauber 2012 a récolté quatre podiums, mais son concepteur (James Key) est parti chez Toro Rosso. Son successeur (Matt Morris) tente quelque chose de différent avec des pontons très étroits (120 mm de moins que la norme).

Force India tentera de se maintenir à la 6e / 7e place comme au cours des trois dernières années. Et possiblement mieux avec un ou deux exploits, comme la position de tête et la 2e place à l’arrivée de Giancarlo Fisichella à Spa en 2009, ou les 30 tours menés en tête du Grand Prix du Brésil 2012 par Nico Hulkenberg.