Des monoplaces au losange prêtes à vrombir à nouveau sur les circuits : Renault a lancé lundi le processus d'acquisition de l'écurie Lotus, première étape d'un retour plein et entier du groupe français en Formule 1 à l'horizon 2016.

Renault et Gravity Motorsports, filiale du propriétaire de l'équipe, Genii Capital, ont signé « une lettre d'intention portant sur l'acquisition potentielle par Renault d'une participation majoritaire dans le capital Lotus F1 Team », a précisé le constructeur dans un communiqué.

Cette annonce très attendue depuis quelques semaines, notamment par les 400 salariés du Lotus F1 Team, est intervenue deux heures avant l'ouverture de la Haute Cour de Londres, où l'écurie anglo-luxembourgeoise est toujours sous la menace d'une liquidation judiciaire à cause de ses dettes.

Lotus s'est vu accorder dix semaines de sursis selon une décision de la haute court de justice de Londres lundi.

En décalant la prochaine audition au 7 décembre, le juge Colin Birss a expliqué que le plus important était de faciliter la future transaction.

Cette décision souhaitée par l'écurie a été acceptée contre la promesse d'un versement de 3,6 M EUR cette semaine à l'administration fiscale britannique.

Cette signature « marque le premier pas vers le projet d'une écurie Renault en Formule 1 en 2016, poursuivant ainsi 38 ans d'engagement de la marque » dans cette discipline, a ajouté Renault. Une référence à l'époque glorieuse de la marque française en F1.

Renault a en effet « inventé » le premier moteur turbo de F1, lancé en 1977 dans une monoplace jaune entrée dans les annales. Et Renault F1 a conquis quatre titres mondiaux (pilotes et constructeurs), en 2005 et 2006, grâce à l'Espagnol Fernando Alonso. Cette même écurie a ensuite été rachetée en 2010 par le fonds d'investissement de l'homme d'affaires Gérard Lopez, Genii Capital, puis rebaptisée Lotus par la suite.

Grâce à un champion du monde finlandais, Kimi Räikkönen, Lotus a terminé 4e du Championnat du monde des constructeurs en 2012 et 2013, avec des moteurs Renault. Puis la saison 2014 catastrophique, en raison principalement de son moteur français, a incité Lotus à faire des économies et Lopez à prendre du recul.

Sursis à Londres

Renault, toujours motoriste cette saison des écuries Red Bull et Toro Rosso, indique aussi vouloir travailler avec Gravity « dans les prochaines semaines, pour transformer cette lettre d'intention en accord définitif, sous réserve que tous les termes et conditions entre eux et avec les parties prenantes se concrétisent ».

Le rachat d'une écurie de F1 est en effet un processus compliqué, surtout s'il y a changement de nom : celui-ci dépend de règlements très stricts, de contrats commerciaux à long terme et nécessite, dans certains cas bien précis, l'accord unanime des écuries rivales.

Genii Capital ayant coupé les vivres, Lotus traverse actuellement de grosses difficultés financières, qui ont retardé la conclusion d'un accord avec Renault. Cette fin de semaine au GP du Japon, ses membres n'ont pas pu accéder à leur bungalow, dans le paddock, en raison d'une facture impayée.

Lundi, quelques heures après l'annonce de la lettre d'intention de Renault, un juge de la Haute Cour de Londres a accordé un sursis de dix semaines à l'écurie anglo-luxembourgeoise, jusqu'au 7 décembre, contre la promesse d'un versement de 3,6 M EUR (5 M$ CAD), cette semaine, à l'administration fiscale britannique.

Fin juin à Londres, le PDG du groupe, Carlos Ghosn, avait affirmé que la présence de Renault en Formule 1 après 2016 dépendrait du « retour sur investissement ». Allusion à la question des juteux droits commerciaux (plus d'un milliard de chiffre d'affaire en 2014) et de leur répartition future par la FOM de Bernie Ecclestone.

Marque « historique » de la F1

Alors que le budget global d'une écurie de F1 varie entre 100 et 300 millions d'euros (150 et 450 millions $ CAD) par saison, le Lotus F1 Team était récemment dans la fourchette basse, et donc incapable de lutter avec les constructeurs comme Mercedes ou Ferrari. Ou même avec le leader mondial de la boisson énergisante, Red Bull Racing, quatre fois champion du monde (2010-2013) avec ses moteurs Renault.

« La F1 est une discipline très intéressante, [...] beaucoup de gens la suivent. Lorsque vous développez des moteurs, vous avez le privilège d'être oublié lorsque vous gagnez et d'être mis en valeur lorsque vous perdez », avait plaisanté Ghosn à Londres.

Fin mai, il avait eu une discussion orageuse avec Ecclestone dans le paddock du GP de Monaco pour que Renault obtienne le statut de marque « historique » de la F1, en vertu de sa présence quasi ininterrompue depuis 1977 sous différentes formes (écurie ou motoriste). À la clé, des revenus commerciaux supplémentaires, confidentiels mais estimés à quelques dizaines de millions par an.

Aucun détail n'a été donné, mais un accord semble avoir été finalement trouvé puisque Ecclestone s'étonnait la fin de semaine dernière en marge du GP du Japon à Suzuka qu'un « grand groupe comme Renault tarde autant » à annoncer la reprise de Lotus, affirmant évasivement que la FOM avait « répondu sur ce point précis » du statut historique.

Le groupe Renault affiche une bonne santé financière, ayant quasiment doublé son bénéfice net au premier semestre 2015 à 1,39 milliard d'euros (2 milliards $ CAD), après avoir dégagé 1,89 milliard (2,8 milliards $ CAD) pendant l'exercice 2014.