Il était une fois un pilote de F1 et son fils.

Non pas Gilles et Jacques Villeneuve. Ni Graham et Damon Hill. Ni Keke et Nico Rosberg.

Il s’agit ici de Jan et Kevin Magnussen. L’un a été pilote McLaren, l’autre le deviendra.

Et cette fois-ci, le fils doit sauver l’honneur de la famille.

Tel père, tel fils : pas dans ce cas-ci, espérons-le pour la famille Magnussen.

Jan

Jan était un grand espoir de la F1.

En 1994, ce Danois de 21 ans domine le Championnat britannique de Formule 3, en remportant 14 des 18 courses de la saison, brisant ainsi le record d’un certain Ayrton Senna (12/20 en 1983). Un record qui tient toujours. Et à l’époque, la F3 était LE tremplin vers la F1.

Jan MagnussenEn 1995, il est le pilote d’essai de l’écurie McLaren F1. Il remplace Mika Hakkinen, qui se remet d’une appendicectomie, au GP du Pacifique; Magnussen termine 10e, tout juste derrière son coéquipier Mark Blundell. Une performance impressionnante.

Alors que tout le paddock voit Magnussen comme pilote titulaire aux côtés de Mika Hakkinen en 1996, McLaren décide plutôt d’embaucher David Coulthard.

Le Danois doit se contenter du rôle de pilote d’essai. Pour l’occuper, McLaren le fait courir en voiture de tourisme et le place chez Penske-Mercedes en IndyCar pour quatre courses. Et on lui fait refaire toutes les dents, pour qu’il soit digne de l’image de marque de l’écurie.

Les deux pilotes titulaires étant encore sous contrat pour 1997, Magnussen décide d’aller voir ailleurs.

Quel hasard, la saison 1997 marque les débuts en F1 de Stewart Grand Prix, une écurie totalement nouvelle mise sur pied par Paul Stewart, avec l’aide (et les contacts) de son père Jackie, triple champion du monde.

Les Stewart connaissent bien Jan, puisque c’est au sein du Paul Stewart Racing qu’il avait triomphé en F3. Et Jackie lui-même avait déjà déclaré que Jan Magnussen était « l’un des jeunes hommes les plus talentueux à faire son apparition depuis Ayrton Senna, et peut-être LE plus talentueux ».

La déception fut d’autant plus forte. Magnussen a de la difficulté à s’adapter à la F1 et connaît une première demi-saison très décevante. Sir Jackie prend même le volant d’une voiture sur le circuit d’Oulton Park avec Jan à ses côtés pour lui donner quelques conseils!!!

Le Danois réussit quelques bonnes courses en fin d’année et conserve son volant pour 1998.

Mais ça ne débloque pas. Après le Grand Prix du Canada 1998, où il récolte le seul point de sa carrière en F1, il est congédié!

Mais que s’est-il passé?

Le directeur technique Alan Jenkins : « On croyait énormément en lui, mais parfois il était difficile de savoir ce qu’il avait en tête quant à sa détermination. Mais il est aussi vrai que nous n’avions pas les moyens de bien l’appuyer, comme lui donner du kilométrage en essais privés, ou de bien prendre le temps d’analyser ses performances. Les habiletés sont là. Mais il doit prouver qu’il a la volonté d’y arriver ». En d’autres mots : aussi indiscipliné (préparation mentale et physique) que talentueux. Au sein d’une écurie trop jeune/petite pour l’encadrer.

La F1, c’était d’ores et déjà terminé, à 25 ans.

Depuis ce temps, Jan n’a cessé de piloter dans diverses catégories. C’est en course d’endurance qu’il a pu exprimer son talent, notamment en American Le Mans Series et aux 24 Heures du Mans (victoire en GTS en 2004, et en GT1 en 2005, 2006 et 2009, au volant d’une Corvette).

Cette année, à 40 ans, il a participé à la série ALMS.

Pendant ce temps, l’écurie Stewart est devenue Jaguar (2000-2004) puis Red Bull (2005+)…

Kevin

Son fils Kevin, qui a eu 21 ans le 5 octobre dernier, vient de remporter le championnat de Formule Renault 3.5, considéré cette année comme supérieur au GP2. Autrement dit, LE tremplin vers la F1, comme l’était la F3 du temps de son paternel.

Sans totalement dominer la concurrence, Kevin a fait très bonne impression avec 5 victoires, 8 positions de tête, 13 podiums et 15 top-10 (en 17 courses), en plus de terminer toutes ses courses. Parmi ses faits saillants, une remontée de la 16e à la 2e place sous la pluie au Hungaroring. Il s’est aussi démarqué par une excellente gestion du risque.

Aussi (sinon plus) important, le jeune Magnussen a impressionné chaque fois qu’il a pris le volant d’une F1, plus précisément d’une McLaren, puisqu’il fait partie du programme de développement de l’écurie depuis mars 2010.

Tests des jeunes pilotes, Abou Dhabi, novembre 2012

6 novembre : 1er, 40 tours

8 novembre : 2e, 51 tours

Séance d’essais privés, Silverstone, juillet 2013

17 juillet : 1er sur 12 pilotes, devant Paul di Resta (Force India), 100 tours

Après 1094,51 km d’essais privés, le patron de McLaren, Martin Whitmarsh, n’était pas encore prêt à lui donner un volant : « Je sais que nous avons fait des exceptions, mais généralement nous ne donnons pas de volant à des recrues. »

Convaincu du talent de Magnussen, Whitmarsh a plutôt tenté de le placer au sein d’une autre écurie : Force India et Marussia (deux équipes qui entretiennent des partenariats techniques avec McLaren), et même Lotus. Sans succès.

Que faire lorsque l’on a un diamant brut entre les mains? On s’attelle à le polir pour 2015, alors qu’on pourra le placer dans un écrin signé Honda.

Alors voilà : Kevin Magnussen sera chez McLaren en 2014, 19 ans après son père.

Et bravo à McLaren, qui n’a pas peur de promouvoir de jeunes talents.

Car si l’expérience Lewis Hamilton (arrivé en F1 en 2007 après 10 000 km d’essais privés) a été un succès, ce ne fut pas le cas pour Heikki Kovalainen (arrivé en 2008 après une saison chez Renault) et, maintenant, pour Sergio Perez (qui n’a pas eu une deuxième saison pour se faire justice, contrairement à Kovalainen).

On sait la pression que connaissent les pilotes de deuxième génération. En plus de faire sa carrière, Kevin Magnussen doit aussi refaire celle de son paternel.

Sergio

Personnellement, je trouve que Sergio Perez n’a pas fait une aussi mauvaise saison chez McLaren que son congédiement le laisse supposer.

Bien sûr, il n’a que 35 points versus les 60 de son coéquipier Jenson Button.

Mais en piste, il a su démontrer un très beau coup de volant. Notamment aux dépens de Button (Bahreïn, Monaco, Allemagne, Japon)!

Mais il commet encore des erreurs, comme sa sortie de piste à Suzuka lors des essais libres du vendredi, le genre d’incident qui énerve ingénieurs et patrons d’écurie.

Et il y a cette rumeur, qui vient de l’écurie, selon laquelle Perez aurait des lacunes sur le plan de la compréhension technique de la voiture. Avec la F1 actuelle, cela ne pardonne pas.

F1 Magazine

Horaire de F1 Magazine no 11 : le jeudi 14 novembre à 19 h 30, le vendredi 15 novembre à 16 h 30, le dimanche 17 novembre à 13 h.

Au menu cette semaine...

- Sebastian Vettel de passage à l'usine Red Bull en Angleterre

- le tour parfait, selon McLaren

- comment un Torontois s'est retrouvé sur le podium à Abou Dhabi

- une entrevue avec le patron de Caterham, le Français Cyril Abiteboul, sur les difficultés d'une petite écurie

- lexique F1

- et en conclusion, le circuit d'Austin au Texas, analysé par Romain Grosjean et Pirelli

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