Je suis extrêmement déçu de ne pas participer à l'épreuve de Milwaukee à la suite d'une collision avec un mur lors de la pratique du matin, d'autant plus que la voiture allait très bien. Je suis émotif et triste à la fois car on laisse passer une course qui aurait pu être notre plus belle de la saison.

Je n'ai pas les mots pour expliquer comment je me sens. Des fois, je me considère chanceux de ne pas m'être blessé sérieusement et l'instant après, j'ai juste le goût de pleurer parce que je sais comment nous étions dominants. En quittant Milwaukee, plusieurs pilotes m'ont dit qu'ils étaient chanceux de me voir quitter parce qu'ils savaient que ma voiture était dominante. Même Sébastien Bourdais ne pouvait pas me résister.

Je suis déchiré mentalement et triste car c'était le genre de week-end, où sans trop forcer, j'aurais pu obtenir la pole position. Je suis convaincu qu'en partant premier, j'aurais été en mesure de dominer l'épreuve et de la gagner.

Tout allait pourtant très bien durant la pratique. Nous étions d'ailleurs les plus rapides en piste, avec une avance de 7/10e de seconde, mais l'équipe a décidé d'apporter un changement au niveau des réglages pour tenter d'aller encore plus vite et c'est à mon retour en piste que l'accident s'est produit.

Après les nouveaux réglages en place, la voiture allait effectivement encore plus vite. L'auto a toutefois surviré, le derrière est parti à la sortie du virage, ce qui est très rare, et la voiture est allée frapper le mur. La voiture a alors subi des dommages importants.

À mon retour, j'ai consulté les données avec mon ingénieur pour constater que tout allait effectivement très bien et que les données n'expliquaient pas ce qui s'est produit subitement. Il n'y avait aucun signe que la voiture était instable. C'est peut-être le vent très fort qui est à l'origine de l'accident.

Dans l'accident, j'ai été coupé à la main droite et j'ai eu besoin de six points de suture pour fermer la plaie. J'ai la main droite très enflée au point où on voit difficilement les jointures.

Je le répète, tout allait très bien. D'ailleurs Sébastien Bourdais a réussi à faire mieux que moi par seulement 6/100e de seconde lors de son dernier tour à la toute dernière minute de la séance. J'étais à l'infirmerie pour recevoir les premiers soins et j'étais encore le meneur même si je n'avais été en piste que pendant les cinq premières minutes.

Je n'en veux pas à mon ingénieur d'avoir voulu aller plus vite mais après coup, je me demande si le jeu en valait la chandelle parce que nous étions déjà très rapides. C'est sûr que c'est plus facile à dire une fois que l'incident s'est produit plutôt qu'avant. Il y avait aussi beaucoup de vent à Milwaukee et dans de telles circonstances, je pense qu'il n'est pas nécessaire de toujours continuer à rouler.

Moi, je me serais contenté de fignoler la voiture au lieu de faire des gros changements. En cinq minutes de pratique, j'avais fait un chrono de 21,1 secondes et j'étais sur un tour de 20,9 quand l'équipe m'a arrêté. L'équipe me trouvait trop rapide et elle ne voulait pas montrer nos cartes aux autres équipes. Les données démontrent aussi que nous étions en plein contrôle de nos affaires et ce, dans toutes les conditions météorologiques.



Question d'argent

C'est plate tout ce qui est arrivé samedi et voir que cette course vient de nous glisser entre les mains est désolant. Avec nos résultats du jour, je débordais de confiance et je savais que les chances de l'emporter étaient réelles. La situation me jette à terre parce que je tiens tête à des équipes beaucoup plus fortunées que nous, en me débattant comme un forcené course après course.

Bruno Junquiera a également frappé le mur comme moi mais lui, il disposait d'un mulet pour faire la qualification et il prendra le départ dimanche.

Pour participer à la course, il aurait fallu emprunter et acheter des pièces aux autres équipes. Comme on ne mise pas sur un gros budget, il aurait absolument fallu éviter un autre incident en piste pour ne pas hypothéquer notre participation à la prochaine course à Portland le 18 juin. D'autant plus que vendredi, il a fallu acheter des pièces quand la pédale est restée collée à Houston, ce qui avait provoqué un accident.

Je ne veux pas m'apitoyer sur mon sport car je me considère très chanceux de courir en série Champ Car. Je sais toutefois que cette absence à Milwaukee va nous pénaliser au championnat.

Il faut maintenant se regrouper et tout oublier pour se préparer pour les autres épreuves. Il faut être sur le podium dans les six prochaines courses pour rattraper le temps perdu à Milwaukee. Je suis un batailleur et quand je suis dans ma voiture, je ne me dis pas que j'appartiens à une équipe à petit budget. Je fonce simplement parce que je sais que je peux rivaliser avec n'importe qui, n'importe où.

Je rentre à la maison à Las Vegas soigner ma blessure et poursuivre mon entraînement en vue de la course de Portland dans deux semaines.

À bientôt,


*propos recueillis par RDS.ca